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ÇáÊÓÌíá

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ÞÏíã 30-11-09, 08:45 PM   ÇáãÔÇÑßÉ ÑÞã: 11
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bonne lecture

 
 

 

ÚÑÖ ÇáÈæã ÕæÑ **ÃãíÑÉ ÇáÍÈ**   ÑÏ ãÚ ÇÞÊÈÇÓ
ÞÏíã 01-12-09, 12:05 AM   ÇáãÔÇÑßÉ ÑÞã: 12
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de ts ceux ke g lu c la plus passionante chui impatiente pr la suite merci ma belle pr c magnifiqs romans

 
 

 

ÚÑÖ ÇáÈæã ÕæÑ aghatha   ÑÏ ãÚ ÇÞÊÈÇÓ
ÞÏíã 05-12-09, 02:39 PM   ÇáãÔÇÑßÉ ÑÞã: 13
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chapitre 7



En voyant le lit vide, Blaidd jura dans sa barbe. Où était passé Trevelyan ?
Le jeune homme avait bu plus de bière qu’il ne pouvait en supporter pendant le souper, puis il avait quitté la grande salle en titubant avant même que Blaidd n’ait eu la possibilité de lui parler. Le chevalier avait trouvé une excuse pour quitter la table à son tour et s’était rendu directement dans la chambre où il avait pensé trouver Trevelyan…
Peut-être s’était-il rendu à la salle des gardes ou au logis de la garnison pour passer un moment avec les hommes d’armes parmi lesquels il s’était fait des amis, dont Dobbin ? Il avait sans doute une dette à régler car il avait parié comme les autres au début de l’affrontement au tir à l’arc entre Blaidd et Rebecca, et il avait, évidemment, fait le mauvais pari.
Il se pouvait aussi qu’il se fût rendu à l’écurie pour vérifier que les chevaux y étaient bien soignés et qu’il s’y fût endormi sur une botte de foin. Lorsqu’il avait quitté la salle, il semblait avoir assez bu pour s’effondrer n’importe où.
Blaidd, décidé à partir à la recherche de Trevelyan, fit volte-face et se trouva face à face avec Meg. Il eut un soupir de soulagement. Le jeune homme, du moins, n’était pas avec elle.
La servante rougit et, tordant dans ses mains le coin de son tablier, elle déclara en butant sur les mots :
— Je suis venue… euh… je voudrais vous parler, sire chevalier… s’il vous plaît.
Bien qu’il fût curieux d’entendre ce que la servante avait à lui dire, Blaidd était surtout impatient de retrouver son écuyer.
— Est-ce que cela ne peut pas attendre jusqu’à demain matin ?
Elle secoua la tête, visiblement au bord du désespoir.
— C’est important.
Une explication de la présence et de la gêne de la jeune fille lui vint à l’esprit. Ce n’était pas la première fois qu’une dame envoyait sa servante en ambassadrice.
— Est-ce damoiselle Laelia qui vous envoie ? demanda-t il.
— Non ! répondit la jeune fille, atterrée qu’il pût lui poser pareille question.
— Alors, c’est damoiselle Rebecca ? dit-il avec un sursaut de joie.
— Mon Dieu ! Non !
Surpris de manquer à ce point d’intuition, il resta perplexe un instant avant de venir de nouveau en aide à la servante qui, le sang aux joues, gardait le silence en tordant son tablier :
— Meg, je vous en prie, parlez. Pourquoi êtes-vous là ?
— Je suis venue pour vous dire…
La voix de la jeune fille s’étrangla. Elle tremblait comme si elle avait quelque révélation de la plus haute importance à lui faire, quelque secret à lui confier.
S’agissait-il des activités de son hôte ? Etait-il passé à côté d’une source de renseignements majeure à laquelle il n’avait prêté aucune attention ?
— Je vous écoute, dit-il calmement pour ne pas l’intimider davantage.
Meg reprit sa respiration et, cette fois, un torrent de mots prononcés à mi-voix jaillit de ses lèvres :
— Damoiselle Rebecca est la plus noble personne que j’aie jamais servie… Je sais qu’elle vous aime et que vous l’aimez aussi. Il faut, d’ailleurs, que vous l’aimiez car elle vaut cent fois mieux que sa sœur. Tout homme doué de sagesse la préférerait à sa sœur. Mais vous l’aimez, n’est-ce pas ?
Blaidd, qui ne s’était pas attendu à ce plaidoyer en faveur de Rebecca, ne savait ce qu’il devait répondre. Il ne pouvait confier à cette domestique qu’il préférait, en effet, Rebecca à Laelia alors que, officiellement, il était censé courtiser l’aînée des deux sœurs.
— Oui, en effet, reconnut-il enfin, mais…
— Il n’y a pas de « mais », messire ! J’espère que vous ne voulez pas me dire que, puisqu’elle n’est pas aussi belle que sa sœur, vous ne la jugez pas digne d’être votre femme ? Damoiselle Laelia est une égoïste qui a été trop gâtée, et puis…
En proie à une vive tension, elle lui jeta ces derniers mots au visage comme si elle le défiait d’oser les contredire :
— Elle est certainement stérile !
Dans l’expression désespérée de la servante, Blaidd reconnut l’accent de la sincérité et de la loyauté, et il se sentit porté à l’admiration pour celle qui lui inspirait un tel dévouement. Il n’osa pas, cependant, révéler ses vrais sentiments à Meg de crainte qu’elle ne les colportât. Il s’avérait, en effet, qu’elle était d’un naturel loquace.
— Je comprends que vous agissez dans l’intérêt de votre maîtresse…
— Ce que je vous dis, interrompit la jeune fille d’un air passionné, c’est de l’épouser et de l’emmener loin d’ici !
Cette fois, un accent dramatique dans la voix de la servante éveilla les soupçons de Blaidd.
— Pourquoi pensez-vous qu’elle doive quitter Throckton et s’éloigner des siens ?
— Parce qu’ils ne l’apprécient pas à sa juste valeur et ne la respectent pas.
— N’y a-t il pas une autre raison ?
La jeune fille leva sur lui son regard vert et le fixa avec insistance.
— Je veux qu’elle soit heureuse et je crois que vous êtes capable de lui donner le bonheur. Sinon, je crains que le comte ne la marie à quelqu’un qui la rendra malheureuse.
— Rien d’autre ?
— Qu’est-ce qui pourrait être pire que ça ?
Blaidd savait quel sort bien plus dramatique pouvait être réservé à Rebecca. Lorsqu’un traître était démasqué, il n’était pas le seul à souffrir. Tous ses biens étaient confisqués par la Couronne. Si la culpabilité du comte était établie, ses filles seraient plongées dans la misère. Elles seraient obligées de trouver par elles-mêmes leur subsistance dans un monde qui n’offrait aucune place honorable aux femmes seules. Leur seule chance serait d’épouser un marchand ou quelque autre individu de basse condition, à moins qu’elles n’entrent au couvent.
Mais, si elles étaient considérées comme complices de leur père, elles seraient emprisonnées et, selon toute vraisemblance, conduites à l’échafaud.
Blaidd chassa de son esprit la vision épouvantable qui s’imposait à lui. Il ne devait pas penser aux conséquences de son enquête. S’il réussissait à prouver la culpabilité du comte, la justice le condamnerait à un trépas mérité… et nul ne savait ce qu’il adviendrait de ses filles.
Il écarta de nouveau de sa pensée les images intolérables qui y naissaient. C’était au roi et au roi seul qu’il devait foi et hommage, c’était envers lui seul qu’il était lié par serment. Il était à Throckton pour y défendre les intérêts du roi d’Angleterre pas pour y protéger les filles d’un baron félon.
Il était, toutefois, quelque peu soulagé par la réflexion de Meg au sujet des pires menaces qui pesaient sur Rebecca. Si elles se résumaient à un mariage avec un homme qui ne serait pas de son choix, cela signifiait que la servante n’était pas au courant d’intrigues particulières dans l’entourage du comte.
Blaidd s’efforça de sourire lorsqu’il répondit enfin :
— Je devrais vous faire remarquer, Meg, qu’en dépit de votre conviction que votre maîtresse serait plus heureuse si elle était ma femme, il n’est pas certain qu’elle le veuille.
— Au moment où vous le lui demanderez, c’est possible qu’elle refuse, mais si vous insistez et que vous vous montrez persuasif, je suis sûre qu’elle acceptera.
— Et l’amour, Meg ? Ne devrais-je pas l’aimer pour agir comme vous le suggérez ?
— Vous ne l’aimez donc pas ?
La question de la jeune fille le laissa complètement déconcerté. Meg était une servante loyale qui, de toute évidence, était très attachée à sa maîtresse. Sinon, pourquoi se serait-elle donnée la peine de plaider la cause de Rebecca ?
— J’ai beaucoup d’affection et d’estime pour elle, mais cela ne signifie pas que je l’aime.
Meg le considéra d’un air sceptique.
— Si vous le dites… mais c’est un début. Si vous passiez plus de temps avec elle, vous constateriez qu’elle mérite une meilleure vie.
— Et si elle décidait que je ne suis pas l’homme qui lui convenait ?
Meg sourit comme s’il venait de poser une question vraiment saugrenue.
— Je ne pense pas que cela puisse se produire. Elle vous aime bien, elle aussi, je le sais. Et elle vous respecte. Il n’y a guère d’hommes en dehors de Dobbin et de son père pour lesquels elle éprouve de tels sentiments.
Meg commença de s’écarter un peu.
— Vous ne lui direz pas que je vous ai parlé, n’est-ce pas, messire ? Je ne crois pas que ça lui plairait.
— Non, certainement pas, mais je vous promets de garder à l’esprit tout ce que vous m’avez dit.
La servante acquiesça d’un hochement de tête puis s’éloigna sans bruit comme une petite souris, laissant Blaidd seul avec ses nombreuses préoccupations.
Il se dirigea directement vers les écuries comme il en avait eu initialement l’intention. Le ciel était étoilé à l’exception d’une masse nuageuse qui le masquait en partie. La brise cependant n’était pas chargée de pluie, pas même d’un crachin. Il ferait beau, sans doute, le lendemain. Il emmènerait peut-être Aderyn Du faire un galop et, avec un peu de chance, Rebecca serait dans le même état d’esprit.
Il lui arriverait peut-être de la rejoindre comme Trevelyan mais, cette fois, ce serait lui qui jouirait toute la journée de sa compagnie. Ce serait avec lui qu’elle plaisanterait et rirait. Elle le laisserait l’aider à monter et descendre de cheval. Il emprisonnerait sa taille fine entre ses mains et la laisserait glisser contre lui jusqu’au sol.
En ouvrant la porte de l’écurie, il entendit Aderyn Du hennir comme s’il le saluait. Il s’en approcha et lui caressa le chanfrein avant de fouiller en vain chaque stalle et le grenier à foin.
Eternuant une nouvelle fois à cause de la paille qu’il avait remuée, il sortit dans la cour en se demandant où le jeune gaillard avait bien pu se cacher. Pas très loin, sans doute, étant donné la quantité de bière qu’il avait bue ! Enfin… à son âge on ne manquait pas d’énergie et on avait le goût de l’aventure…
Des souvenirs lointains, enfouis dans sa mémoire, revinrent à l’esprit de Blaidd. Il se revoyait, un certain soir où il avait trop bu et alors qu’il n’avait que seize ans…
Comment n’y avait-il pas pensé plus tôt ? Le père de Trevelyan ne lui pardonnerait jamais s’il arrivait quelque chose de fâcheux à son fils !
Blaidd pressa le pas vers la porte d’entrée du château devant laquelle deux gardes se tenaient, appuyés à leurs lances.
— Vous dormez ! s’exclama-t il de sa voix grave.
Les deux hommes sursautèrent et prirent une position qui donnait à penser qu’ils restaient vigilants.
— Avez-vous vu passer mon écuyer ?
Les gardes échangèrent un regard.
— Oui, messire, répondit le plus âgé.
— N’avez-vous pas remarqué qu’il n’était pas en état de marcher seul ?
— Non, messire. Il nous a semblé dans un état normal.
— Mais il était soûl !
— Il tremblait un peu sur ses jambes, reconnut le plus jeune. Rien de plus. Il parlait assez clairement.
— Il est allé au village ?
Les deux gardes opinèrent.
— Vous ne direz pas à messire Throckton que nous nous étions assoupis ? demanda le plus jeune sur un ton suppliant.
— Pas cette fois, cria Blaidd en passant en courant sous la porte.
Il poursuivit son chemin à travers la basse-cour et ne ralentit son allure qu’en arrivant au niveau de la barbacane où il avait rencontré pour la première fois Rebecca. Dobbin s’y trouvait en compagnie de quatre gardes avec lesquels il discutait. En reconnaissant Blaidd, il vint au-devant de lui.
— Vous cherchez votre écuyer, n’est-ce pas ? demanda-t il en souriant.
— Oui.
— Il a un peu bu ?
— Trop, selon moi.
— Et il a eu envie de fantaisies ?
— J’en ai peur.
— Eh bien… messire… pourquoi ne pas le laisser faire des expériences ?
— Parce que je suis responsable de lui et que vous savez comme moi ce qui peut lui arriver dans un bordel.
Dobbin acquiesça de la tête mais ne s’écarta pas pour laisser le passage au chevalier.
— Un garçon comme lui, orgueilleux et vif ; il risque de ne pas apprécier que vous le poursuiviez ainsi. Ce serait peut-être plus sage de le laisser goûter au fruit défendu ? Il me semble qu’il est en âge de vivre en homme.
— Je ne le pense pas. Urien Fitzroy compte sur moi, d’ailleurs, pour veiller sur son fils et ça signifie que je doive le préserver contre toutes formes de dangers.
Sans attendre la réponse du capitaine, il franchit la dernière porte de l’enceinte puis descendit en courant la route conduisant au village en contrebas.
Trevelyan n’était peut-être que dans une auberge où il continuait de s’abreuver, espéra en lui-même Blaidd. Ou il était impliqué dans une bagarre, ce qui présenterait un peu moins de danger que la fréquentation d’une prostituée.
Jurant contre lui-même pour ne pas lui avoir tenu la bride plus serrée, il décida de vérifier d’abord s’il n’était pas allé voir les filles.
Il fit irruption à l’intérieur du cabaret aux fenêtres duquel s’étaient montrées les filles à leur arrivée à Throckton et s’arrêta, les poings sur les hanches, promenant son regard autour de lui pour tenter de discerner le jeune homme dans la salle faiblement éclairée où des hommes buvaient en compagnie de souillons à moitié dévêtues qui se vautraient sur eux.
Parmi les catins, il ne reconnut pas la jeune blonde qui avait retenu l’attention de Trevelyan lors de leur passage. Etait-il monté avec elle dans l’une des chambres de l’étage ?
La brune pulpeuse qui s’était adressée à lui s’approcha en roulant les hanches.
— Alors, mon beau chevalier, tu as eu envie de revenir ? dit-elle de sa voix câline alors qu’elle levait sur lui des yeux de braise.
— Est-ce que mon écuyer est ici ?
— Ton écuyer ?
— Vous savez de qui je veux parler. Est-il avec la blonde ?
— Les trois quarts des filles sont blondes chez nous, mon lapin, répondit-elle de sa voix de velours.
— C’est de loin la plus jolie… elle vient du château.
La brune hocha la tête.
— Ils sont peut-être ensemble et peut-être pas… Qu’est-ce que ça peut te faire, s’il paie son dû ?
Blaidd planta son regard impérieux dans le sien.
— Je suis venu pour le chercher et vous feriez mieux de m’indiquer où il est si vous ne voulez pas que je défonce toutes les portes jusqu’à ce que je le trouve !
La femme fronça les sourcils d’un air désapprobateur et indiqua l’escalier du menton.
— La première porte à droite.
Tandis que Blaidd montait quatre à quatre l’escalier branlant, il entendit la brune crier :
— Ester !
Il était déjà devant la porte qu’il ouvrit d’un coup d’épaule. Se précipitant dans la chambre, il y trouva la jeune prostituée, dans sa robe en lambeaux qu’elle n’avait pas eu à retirer, Trevelyan étant étendu tout habillé, la face contre les draps souillés du lit.
— Il s’est endormi, expliqua Ester, visiblement effrayée. Je ne lui ai rien fait.
Sans répondre, Blaidd saisit le jeune homme par les épaules et le fit asseoir. Ayant constaté qu’il ne portait aucune trace de blessure, il fut rassuré.
— Où est sa bourse ? demanda-t il.
La jolie blonde désigna une poche de cuir arrondie pendue à la ceinture de l’écuyer.
— S’il y manque de l’argent, je reviendrai, menaça Blaidd en plaçant son épaule sous le bras de Trevelyan pour le dresser sur ses jambes.
Le jeune homme marmonna quelques paroles inaudibles sans sortir de sa léthargie.
— Vous devriez revenir pour moi, dit la prostituée en battant des paupières. Venez seul.
— Je ne fréquente pas les femmes de mauvaise vie…
Il s’interrompit et, maladroitement, reprit :
— Je suis désolé… Rebecca de Throckton m’a parlé de vous. Je sais que vous n’êtes pas là par votre pleine volonté.
Le regard de la jeune femme s’élargit et une expression d’innocence parut sur son visage dont Blaidd découvrit combien il avait dû être beau.
— Je vais vous demander une faveur, Ester, reprit le chevalier. Si Trevelyan revient vous voir, chassez-le. Il n’a jamais connu de femme et il ne devrait pas commencer ainsi.
La jolie prostituée retrouva son air effronté lorsqu’elle répondit :
— Comment voulez-vous que je vive si je renvoie mes clients ?
Blaidd fouilla dans sa bourse et en sortit une pièce d’argent qu’il donna à la jeune femme.
— Chaque fois qu’il viendra, renvoyez-le et je vous dédommagerai, dit-il en se tournant vers la porte avec son fardeau.
Ester acquiesça en silence puis se leva et rejoignit Blaidd au moment où il allait sortir de la chambre devant laquelle plusieurs filles s’étaient rassemblées.
— Revenez, seigneur chevalier, dit-elle de sa voix de gorge. Vous ne le regretterez pas.
Profitant des rires des autres femmes, elle ajouta en se dressant sur la pointe des pieds pour parler à l’oreille de Blaidd :
— Pour l’amour de damoiselle Rebecca, revenez, murmura-t elle, l’air soudain grave et sincère. J’ai quelque chose d’important à vous dire.
Puis elle joignit son rire à ceux des autres prostituées et ajouta d’une voix caressante :
— Revenez, beau seigneur, je vous en prie, et amenez vos amis pour mes compagnes, mais seulement s’ils supportent la bière.
Blaidd se demanda si la jeune femme avait réellement quelque information importante à lui révéler ou si elle ne voyait en lui qu’un client qui ne se laissait pas aisément persuader.
Mais alors, pourquoi aurait-elle évoqué Rebecca ?
Dans une même soirée, il avait entendu les propos inquiets de Meg au sujet de sa maîtresse et, à présent, ceux de cette fille…
Peut-être, en effet, des tractations secrètes étaient-elles conduites derrière les murs épais de Throckton ?
— Qu’est-ce qui t’a pris ? demanda Laelia de son lit qu’elle n’avait pas quitté depuis le matin, quand Rebecca pénétra dans la chambre.
Et sans attendre la réponse de sa sœur, Laelia, selon son habitude, se lança dans une énumération des derniers méfaits de la jeune fille.
— Que faisais-tu dans la basse-cour avec les hommes d’armes ? Tu as interrompu leur entraînement et tu as eu l’audace de défier à l’arc le chevalier Morgan !
— Comment va ta migraine ? demanda Rebecca avec une compassion feinte. Elle est moins forte, j’espère.
— N’essaie pas de changer le sujet de la conversation ! Pourquoi as-tu encore foulé aux pieds ton nom et ton titre ?
— J’ai dérangé les hommes à l’entraînement parce que je cherchais le chevalier Morgan pour le prévenir que tu étais malade et qu’il ne s’étonnât pas de ne pas te voir au dîner. Si j’ai eu tort, je t’en demande pardon. Quant à la compétition à l’arc, c’est le chevalier lui-même qui en a eu l’idée. Ne l’aurais-je pas offensé en lui refusant le plaisir de me battre ?
Laelia plissa les yeux tandis que ses lèvres ne formaient plus que deux traits.
— Comment a-t il su que tu savais tirer à l’arc ? C’est toi qui le lui as dit, n’est-ce pas ?
Rebecca prit un air offusqué.
— Tu me soupçonnes de me vanter de maîtriser un art aussi peu féminin ? Tu te trompes.
— Alors, c’est Dobbin qui a commis cette indiscrétion. Je vais parler à père…
— Je te l’interdis ! s’écria Rebecca, ulcérée. Laisse Dobbin en dehors de tout ça ! C’est moi qui ai accepté de relever le défi, pas lui.
On frappa doucement à la porte et, sans attendre la réponse de l’une ou l’autre des sœurs, la porte s’ouvrit.
— Tu es en retard ! cria Laelia comme Meg entrait timidement dans la chambre.
— Oui, ma damoiselle. Je vous en demande pardon.
Elle marcha jusqu’à la table de toilette où elle prit une brosse à cheveux.
— Je vais commencer par vos cheveux, n’est-ce pas ?
— Oui, répondit laconiquement Laelia en sortant de son lit.
Elle passa une robe en laine et des chaussons garnis de fourrure, et alla s’asseoir devant la table.
Rebecca, qui espérait que les jérémiades de sa sœur étaient finies, eut le déplaisir de l’entendre reprendre :
— Et quand je pense que tu as mis le chevalier dans l’obligation d’envoyer à ta suite son pauvre écuyer qui a été privé de la chasse…
— Il n’était pas obligé de le faire ! interrompit Rebecca. C’était inutile. Je suis certaine, d’ailleurs, que père le lui a clairement fait comprendre.
Elle prenait conscience, à présent, que Laelia avait été vivement importunée par cet incident dont elle n’avait pourtant pas parlé sur le moment.
— Le chevalier a le respect de son rang, lui, et il agit en fonction de ses devoirs. Ce n’est pas comme certaines autres personnes. Rebecca, quand te comporteras-tu avec la dignité d’une jeune fille de noble naissance ?
Rebecca retira le capuchon dont elle était coiffée et secoua sa lourde chevelure.
— Je ne sais pas pourquoi tu m’en veux tant de cette escapade. Ce n’est pas le chevalier qui s’est lancé à ma poursuite. Je ne t’ai pas privée de sa compagnie. Tu as pris tout ton temps avec lui pendant votre lent retour à Throckton. Tu n’aurais pas aimé avoir son écuyer avec vous à cette occasion, n’est-ce pas ? Tu devrais m’être reconnaissante de t’en avoir débarrassée..
— Eh bien, je ne le suis pas ! répondit Laelia en s’emportant. Pourquoi le Seigneur m’a-t il donné une sœur qui s’habille comme une simple servante, tire à l’arc comme un soudard et bat la campagne à cheval seule comme une sauvage ! Ce n’est pas étonnant que tu sois la risée de tous les habitants du château.
— Dobbin a voulu montrer…
— Dobbin ? dit Laelia. Je croyais qu’il n’y était pour rien ?
Meg lança un regard d’encouragement à Rebecca pour qu’elle ne baissât pas pavillon devant sa sœur. Elle s’en voulait d’avoir évoqué Dobbin. Il avait évoqué son talent, certes, mais elle était libre de refuser de tirer à l’arc au milieu des hommes comme elle l’avait fait. En vérité, elle avait voulu montrer à Blaidd ce dont elle était capable.
— C’est vrai, reconnut-elle. C’est moi qui aie voulu me mesurer au chevalier. J’ai eu tort, et j’en suis désolée.
— Tu peux l’être ! Tu manques vraiment de dignité !
— Comment en aurais-je ? Oublies-tu ma vilaine cicatrice au front ? Les jeunes filles nobles ont toujours la peau diaphane, elles sont belles comme le jour… Oui, tu as raison, je suis indigne d’être ta sœur, de porter le même nom que toi. Mon visage est une insulte au sang qui coule dans mes veines.
Laelia se retourna pour regarder sa sœur, interrompant les soins de Meg dont la brosse resta en arrêt au-dessus de ses magnifiques cheveux blonds.
— Pourquoi éprouverais-tu ces sentiments misérables ? Tu n’as qu’à avoir un comportement digne et approprié.
— Si je vivais comme tu me le suggères, je m’ennuierais à mourir, répondit Rebecca dans un élan de sincérité. Père ne semble pas si préoccupé par ma façon de faire ou, du moins, a-t il fini par s’y habituer. Alors, tu n’as aucune raison de te mettre dans de pareils états.
— Père a simplement fini par se lasser d’essayer d’amender ta conduite. Il a renoncé à te faire changer ta manière de vivre, mais pas moi ! Il n’est pas trop tard, Rebecca. Avec des efforts, tu peux encore avoir des chances de te…
— De me marier ? suggéra Rebecca.
— Oui !
— Tu devrais arrêter de te faire du souci à ce sujet, Laelia, car, moi, je ne m’en fais aucun.
— Tu es mon unique sœur, Rebecca. C’est normal que ta vie me préoccupe.
— J’apprécie ta sollicitude, Laelia ; vraiment, tu peux me croire, mais je ne veux pas changer. Et si ça signifie que je ne me marierai pas, qu’il en soit ainsi.
Rebecca se dirigea vers la porte.
— Je prends conscience à l’instant que j’ai oublié de dire quelque chose au cuisinier pour le dîner de demain.
La jeune fille, heureuse d’échapper aux récriminations de sa sœur, quitta la chambre et descendit l’escalier à vis. Elle n’avait rien de particulier à dire à Rowan qui, d’ailleurs, devait déjà dormir, mais elle avait besoin de s’éloigner de Laelia. Au moins pour un petit moment. Elle n’avait déjà que trop parlé avec sa sœur de toutes ses déficiences et du chevalier Morgan. A présent, elle avait besoin d’être seule.
Elle traversa le hall qui n’était éclairé que par les braises rougeoyant dans l’âtre, auprès duquel dormaient les grands chiens de chasse. Certains relevèrent la tête et grognèrent avant de reconnaître la jeune femme.
Elle s’arrêta à la porte, jeta un coup d’œil dans la cour. Il n’y avait pas âme qui vive en dehors des sentinelles, qui allaient et venaient le long du chemin de ronde, et des gardes près de la porte d’entrée.
Elle pressa le pas vers la chapelle dans laquelle elle pénétra. A peine eut-elle refermé la porte derrière elle qu’elle se demanda si le chevalier y viendrait à son tour. Mais il n’avait pas pu l’y voir entrer et à moins qu’il n’eût un don de double vue…
Il fallait le chasser de son esprit. Elle était venue là pour prier et demander que cessât le tourment qui l’accablait depuis qu’elle avait vu Blaidd, le torse nu, l’épée à la main…
Il maniait les armes à merveille et, pourtant, il ne ressemblait à aucun autre chevalier. Elle en avait pour preuve la façon admirable dont il avait accepté la défaite face à elle, une faible femme ! Jamais aucun autre homme de guerre n’aurait accepté une telle humiliation et lui, au contraire, avait semblé très heureux pour elle.
Il sortait assurément de l’ordinaire et à cause de cela, peut-être, ne serait-il pas repoussé par le comte et sa fille aînée. Laelia semblait même l’apprécier et il ne faisait aucun doute que le comte de Throckton l’estimait et appréciait sa compagnie.
Mon Dieu ! pensa en elle-même Rebecca. Comment supporterait-elle de savoir Laelia entre ses grands bras, de les voir vivre ensemble, et, un jour, de devoir prendre sur ses genoux leurs enfants ?
Les images qui s’imposaient à son esprit lui firent prendre conscience brutalement qu’elle avait menti à Laelia en lui disant qu’elle se moquait de se marier ou non. Elle n’en avait pas eu envie jusqu’alors car aucun des prétendants qui s’étaient présentés à Throckton pour Laelia n’avait touché son cœur ni, même, éveillé son intérêt. Mais c’était très différent dans le cas de Blaidd Morgan. Elle avait très nettement l’impression qu’elle aimerait l’épouser… ou un autre comme lui.
Il n’y en avait, cependant, pas deux comme lui. Elle le savait bien au fond d’elle-même. En pensant à l’avenir, n’éprouvait-elle pas d’ailleurs, pour la première fois, un sentiment de solitude qui la glaçait jusqu’au fond du cœur ?
Elle aurait pu, certes, être encore plus malheureuse. Elle avait la chance d’être la fille d’un puissant seigneur. Elle n’aurait jamais ni faim ni froid. Et elle avait des amis, Dobbin, en particulier, qui était comme un second père pour elle.
Elle dit une prière de louange pour remercier le ciel de tout ce qu’elle avait et pour avoir la force d’accepter que Laelia devînt la femme du chevalier Morgan s’il s’avérait que c’était celui qu’elle choisissait.
Rebecca fit le signe de la croix et se redressa. Elle sortit de la chapelle et aperçut aussitôt deux hommes dont l’un était soutenu par l’autre, et qui venaient de franchir la porte d’entrée du château.
Comme ils approchaient, elle constata que celui qui aidait l’autre à marcher avait les cheveux longs. Le chevalier Blaidd… et son écuyer ?
Craignant que le jeune homme n’eût été blessé, Rebecca pressa le pas dans leur direction.
— Que s’est-il passé, chevalier ? demanda-t elle quand elle fut à leur niveau. Trevelyan est-il blessé ?
— Non, ma damoiselle, répondit Blaidd en s’arrêtant. J’ai le regret de vous dire qu’il a bu jusqu’à en perdre conscience.
Le jeune homme releva la tête et marmonna :
— J’ai pas trop bu… juste un peu fatigué…
Le chevalier leva les yeux au ciel d’un air entendu.
Rebecca ne voulut pas aggraver le dissentiment qu’elle avait déjà fait naître entre eux en se montrant, maintenant, exagérément consternée.
— C’est de son âge, dit-elle. Laissez-moi vous aider.
Elle vint se placer à la droite de Trevelyan et étendit le bras du jeune homme sur son épaule.
— Ce n’est pas nécessaire, protesta Blaidd. Je peux me débrouiller tout seul.
— Si vous le traînez avec vous depuis le village, vous devez être fatigué. A deux, ce sera beaucoup plus facile.
La fermeté du ton de la jeune fille ne laissait pas à Blaidd la liberté de refuser.
— Je vous remercie, se résigna-t il à répondre.
— J’avais remarqué pendant le souper qu’il était un peu éméché, dit Rebecca. J’aurais dû dire à Meg de ne plus lui servir à boire.
— C’est moi qui aurais dû lui conseiller de ne plus boire. Je suis responsable de lui.
— Où l’avez-vous trouvé ?
— Dans un lieu qu’il ne convient pas d’évoquer devant une jeune et noble personne. Heureusement, il a perdu conscience avant de ne rien commettre d’irréparable.
— J’ai suggéré plusieurs fois à mon père de fermer ces lieux de débauche, mais il prétend qu’ils sont nécessaires aux hommes.
— Je n’en suis pas certain. Ils y attrapent tant de maladies. Il vaudrait mieux pour eux de ne pas y mettre les pieds.
Blaidd parlait avec une telle conviction que Rebecca en fut impressionnée. Il était vraiment très différent de tous les chevaliers qu’elle avait vus jusqu’alors.
— Mais il y a des femmes réduites à une telle misère qu’elles n’ont pas le choix, dit-elle à mi-voix.
— C’est vrai, reconnut-il en soupirant.
Ils venaient de traverser le hall et se trouvaient au pied de l’escalier de pierre dont ils gravirent lentement et en silence les marches jusqu’au deuxième étage. Ils passèrent sous une porte basse et étroite et pénétrèrent dans la vaste chambre que partageaient le chevalier et son écuyer.
La lune, qui brillait dans le ciel, répandait une lumière nacrée qui pénétrait dans la pièce par deux étroites fenêtres aux vitres cerclées de plomb.
Ils gagnèrent le lit de Trevelyan, le plus petit des deux, et y firent étendre le jeune homme. Ils se saisirent, ensuite, chacun d’une botte et tirèrent dessus ensemble. Après quoi, Blaidd jeta une courtepointe sur l’écuyer qui ronflait déjà.
Se tournant vers la jeune fille, il lui sourit. Dans la clarté faible de la lune, ses yeux brillaient avec une grande douceur.
— Vous m’avez bien aidé, reconnut-il. Sans vous, il m’aurait été difficile de faire monter l’escalier à Trevelyan. J’aurais été obligé de le porter sur mon dos.
— J’ai été heureuse de pouvoir vous aider, répondit Rebecca. Et maintenant, je vais vous laisser dormir.
Elle se dirigea vers la porte et Blaidd lui emboîta le pas. Il sortit de la pièce derrière elle.
— Merci encore, dit-il tout bas.
Elle se retourna et le regarda, immobile et sans voix. Il la fixait et semblait hésiter comme s’il avait quelque chose à lui dire. Se penchant enfin sur elle, il la regarda intensément dans les yeux et lui demanda dans un souffle :
— Ma damoiselle… N’êtes-vous pas en danger ici ?
Elle s’était attendue à tout sauf à cette question.
— Non… Pourquoi le serais-je ? Je suis chez moi.
— N’y a-t il rien qui vous donne lieu de redouter l’avenir ?
Elle avait, en effet, de bonnes raisons de craindre ce que l’avenir lui réservait, mais elle n’était certainement pas prête à le reconnaître devant Blaidd.
— Non. Pourquoi ?
— Il était convenu entre Meg et moi que je ne vous en parlerais pas, mais elle m’a dit certaines choses vous concernant qui m’ont alarmé.
— Elle a perdu la raison ! Je vais très bien.
Elle dirait à la servante ce qu’elle pensait de ses indiscrétions. Ignorait-elle qu’elle ne devait en aucun cas parler de sa maîtresse avec un hôte ?
— Si elle m’a parlé, c’est parce qu’elle est soucieuse de votre bonheur. Elle trouve que vous n’êtes pas appréciée à votre juste valeur. Je le pense aussi d’ailleurs.
Il étendit la main et caressa la joue de la jeune fille.
— Etes-vous heureuse à Throckton, ma damoiselle ?
Un frisson courut dans le dos de la jeune femme. Elle aurait dû lui dire d’arrêter, mais elle en était tout bonnement incapable…
— Oui, répondit-elle avec un soupir.
Puis, recouvrant soudain la maîtrise d’elle-même, elle recula d’un pas.
— Vous ne devriez pas faire ça.
— Je vous demande pardon.
— Si je vous fais ce reproche, c’est parce que vous êtes ici pour faire la cour à Laelia.
— Je suis venu ici, en effet, dans cette intention. C’est une très jolie jeune fille, je le reconnais, mais…
« Mais quoi ? » voulait hurler Rebecca qui avait l’impression qu’elle allait perdre la raison.
— … elle ne me semble pas être la femme qui me convienne.
Déchirée entre le doute et l’espoir, Rebecca laissa échapper un faible :
— Oh !
— Je commence à croire, en effet, reprit Blaidd, que je ferais mieux de courtiser sa sœur.
Confuse et ravie, bouleversée et enchantée, Rebecca resta sans voix.
Observant l’adage selon lequel « qui ne dit mot consent », le chevalier prit la jeune fille dans ses bras et s’empara de ses lèvres…0

 
 

 

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chapitre 8


Blaidd avait embrassé beaucoup d’autres femmes, mais jamais aucune n’avait éveillé en lui un tel désir.
Depuis longtemps, il craignait d’être condamné à n’avoir que des relations sans lendemain jusqu’au jour où il se déciderait à prendre femme par devoir, pour qu’elle lui donnât un héritier. Jamais il n’avait osé rêver de faire un vrai mariage d’amour comme ses parents.
L’espoir d’échapper à ce destin grâce à Rebecca fut sa dernière pensée cohérente avant de s’abandonner à la passion qu’elle faisait naître en lui. Il oublia tout instantanément : ses parents, Laelia, le roi d’Angleterre, le comte de Throckton, et même Trevelyan qui ronflait derrière la porte.
Tout ce dont il était conscient, c’était d’elle, douce et chaude dans ses bras, alors qu’elle lui rendait ses baisers et qu’elle lui passait ses longs doigts fins dans les cheveux. Et plus il la serrait contre lui, plus elle se laissait aller, souple et abandonnée, ployant sous sa force et son désir comme un saule sous le vent.
Il l’embrassa plus profondément tandis qu’il la poussait contre le mur de pierre dont elle ne sentit pas le froid humide et glacé dans le dos. Elle était *******e de s’y appuyer alors qu’il remontait lentement les mains vers sa poitrine, traçant des arabesques autour des aréoles qui pointaient sous l’étoffe de sa robe.
Sous l’effet de ses caresses et de ses baisers, Rebecca avait l’impression de fondre comme neige au soleil. Une chaleur enivrante courait sous sa peau, se transmettait à toutes les fibres de son corps, et un désir inconnu montait en elle, guidait ses bras qui enlaçaient à présent la taille du chevalier, ses doigts qui bientôt vinrent explorer le relief de son dos musclé. Elle se serra plus fort contre lui, montrant par ce geste qu’elle s’offrait…
Ayant glissé une main sous sa robe, il tira un lacet de son corset puis un deuxième et, quand il fut assez ouvert, il effleura du doigt la pointe tendue de ses seins. La jeune fille retint son souffle, émerveillée par ce plaisir ineffable.
Interrompant le long baiser qui scellait leurs lèvres, il baisa les épaules blanches puis revint butiner la poitrine frémissante de la jeune fille qu’il couvrit de baisers alors qu’elle cambrait les reins, présentant ses seins à sa bouche sensuelle.
Très vite, Rebecca fut prise d’un délicieux vertige et elle ferma les yeux en enfouissant les doigts dans la lourde chevelure de Blaidd, maintenant sa tête là où elle se trouvait.
Comme elle gémissait, il se redressa et s’empara de nouveau de ses lèvres avec une ardeur presque sauvage, comme s’il se jetait à l’assaut d’une forteresse.
Et Rebecca réagit avec la même fougue et la même passion. Il n’y avait plus ni tendresse ni capitulation dans ses gestes. Elle était devenue l’égale de Blaidd, et ils rivalisaient d’audace et de fol désir…
Elle sentit la force de son corps contre elle qui lui disait plus clairement que par des mots ce qu’il voulait d’elle. Et elle le serra dans ses bras, ondulant contre lui avec une impatience fiévreuse. Jamais elle n’avait éprouvé de telles sensations ; jamais elle n’avait été dévorée par un feu aussi ardent. Elle voulait être avec lui totalement, qu’il n’y eût plus aucun obstacle entre eux, qu’ils fussent comme une seule chair…
Un feu fulgurant l’embrasait toute, la possédait. Et pour stimuler son plaisir, Blaidd continuait à tisser autour de son corps un voile d’ivresse et de caresses…
Une tension inconnue l’envahit, un besoin pressant et irrésistible qui la poussait vers un sommet où tout se libérerait, se consumerait. Puis, soudain, la tension cessa et elle fut soulevée par une vague d’une indicible volupté…
Blaidd la soutint dans ses bras comme elle tremblait et qu’un sanglot montait de sa gorge.
— Rebecca, douce damoiselle, dit-il dans un souffle. Nous nous sommes oubliés…
Pantelante, vibrant encore de l’émoi merveilleux qu’elle venait de connaître, elle le fixait de ses grands yeux bleus. Il avait les cheveux dans un désordre inextricable, la tunique à moitié ouverte, les lèvres gonflées, le regard brillant…
Qu’avait-elle fait ? Que lui avait-il fait ? Les pans de sa robe étaient ouverts, son corset était défait, ses seins nus exposés au courant d’air frais qui montait de l’escalier… Que Dieu lui pardonne, elle ne s’était pas comportée autrement qu’une gourgandine dans une ruelle sombre ! Elle avait oublié qui elle était : une jeune fille de haute et noble naissance qui était censée se comporter avec dignité. Comme Laelia était justifiée dans les critiques qu’elle lui faisait inlassablement !
Et pourtant, elle n’avait pas d’autre désir que de se jeter de nouveau dans les bras du chevalier, de boire à la fontaine de ses lèvres et de le supplier d’agir avec elle à sa guise.
Mais Blaidd posa les mains sur les épaules nues de la jeune fille, sembla hésiter un instant, puis remit en place un à un ses vêtements.
— Pardonnez-moi, dit-il en lui prenant le visage entre ses mains. Je n’aurais pas dû agir ainsi.
— C’était à moi de vous arrêter, répondit Rebecca, qui luttait pour ne pas prendre ses mains dans les siennes et les couvrir de baisers.
— Je n’aurais pas dû commencer par vous embrasser.
— C’était à moi de vous gifler quand vous avez approché votre visage.
Il sourit d’un air rêveur.
— Je crois, belle damoiselle, que nous nous sommes entichés l’un de l’autre au-delà de toute limite raisonnable. Nous savons quels sont nos rangs, quels sont nos devoirs, et pourtant…
— Nous sommes impuissants devant la force de l’appel…
Il hocha la tête.
— La métaphore est juste. C’est comme le hurlement du loup les nuits de pleine lune. Les chiens ne tiennent plus en place. Ils veulent sortir, gagner la sombre forêt où guettent le danger et l’aventure… Et quand je suis devant vous, j’éprouve ce frémissement de tout mon être, cette quête sans fin qui s’empare de moi aux lisières d’une terre inconnue.
Elle le contemplait, le regard très doux.
— Vous avez l’âme d’un poète, preux chevalier.
Alors qu’il gardait ses beaux yeux bruns baissés sur elle, il reprit avec un petit sourire interrogateur :
— Nous sommes manifestement devant un dilemme à moins que… je ne cesse de courtiser votre sœur.
— En avez-vous le désir ?
Le sourire de Blaidd s’élargit.
— Je suis absolument certain de ne plus du tout avoir le goût de passer mes journées en compagnie de la fille aînée du comte de Throckton. Je préférerais cent fois rester auprès de sa petite sœur.
Une joie immense s’empara de cette dernière, mais elle ne voulait pas infliger à sa sœur une souffrance inutile.
— Je crains que Laelia n’en soit très affectée, et mon père aussi.
Blaidd la reprit dans ses bras et lui caressa doucement le dos.
— Elle sera peut-être un peu jalouse, mais je ne pense pas que cela dure plus de quelques jours. Je suis sûr qu’il faudra très peu de temps avant qu’un autre prétendant se présente pour elle aux portes de Throckton. Quant à votre père, ne m’apprécie-t il pas ?
— Si.
— Alors pourquoi m’imposerait-il de courtiser l’une plutôt que l’autre de ses filles ?
— Vous avez raison, sans doute, mais j’aimerais autant que nous ne causions pas de problème. Il vaudrait mieux que vous laissiez d’abord entendre que vous n’avez pas l’impression que Laelia vous soit destinée, et qu’en conséquence vous partiez. Après quelque temps, vous pourriez revenir en visite. Dans la mesure où vous vous entendez très bien avec mon père, cela ne devrait pas sembler louche.
Rebecca sourit gaiement en jouant avec la broderie autour du col ouvert de sa tunique.
— Et, à peine de retour, voilà que vous me découvrez ! Peut-être, en effet, un autre prétendant se sera-t il présenté entre-temps ce qui rendra la chose beaucoup plus aisée.
Blaidd eut un air pensif.
— On croirait que vous aviez déjà tout prévu.
— Il m’arrive de penser très vite.
— Et avec beaucoup de logique. Je vais me conformer à votre plan, mais je ne pense pas que je doive partir tout de suite. Je n’en ai pas le désir d’ailleurs.
Il lui passa doucement la main sur la joue et elle sourit avec suavité.
— Ne partez pas avant une semaine, suggéra-t elle en le regardant dans les yeux.
— Cela me donnera le temps de faire comprendre à Laelia que mes sentiments pour elle ne sont pas ce qu’ils devraient être, et, surtout, je profiterai de ces jours pour apprendre à mieux vous connaître, ma tendre amie.
Il se pencha sur elle et ajouta en chuchotant :
— Si mes sentiments pour vous continuent de grandir au même rythme, je serai fou d’amour lorsque le moment de partir sera venu.
Ils s’embrassèrent de nouveau et, enflammés de passion, commençaient à oublier où ils étaient quand un bruit sourd dans la chambre interrompit leur merveilleuse étreinte.
— Mon Dieu ! s’exclama Blaidd, inquiet. J’ai l’impression que Trevelyan est tombé du lit.
— Je ferais mieux d’aller me coucher avant que quelqu’un ne nous remarque, dit Rebecca en prenant conscience, soudain, de l’effet que leur étreinte aurait produit sur un témoin.
Elle n’avait pas une notion très claire du temps qu’elle avait passé avec Blaidd. Laelia dormait-elle déjà ou l’attendait-elle dans son lit, se demandant où elle était et ce qu’elle faisait ?
Elle ne craignait pas que sa sœur devinât ce qui lui était arrivé, mais, néanmoins, elle ne voulait pas avoir à donner une explication.
— A demain donc, dit Blaidd en lui effleurant les lèvres d’un rapide baiser.
— A demain, répondit-elle dans un souffle avant de tourner les talons et de s’enfuir.
Elle descendit les marches de pierre avec légèreté, le cœur en fête…
Trevelyan n’était pas tombé de son lit comme l’avait redouté Blaidd. Il avait seulement renversé le bougeoir sur la petite table placée près du chevet.
Rassuré, Blaidd s’adossa à la porte de la chambre qu’il venait de refermer derrière lui et laissa échapper un soupir.
Mon Dieu ! Dans quel pétrin s’était-il mis ?
Quels que fussent ses sentiments pour Rebecca, il était ici en mission pour le compte du roi. Dans de telles circonstances, il n’était pas censé s’intéresser à autre chose qu’aux seuls intérêts de la Couronne et aurait dû s’interdire de tomber amoureux de façon à rester parfaitement lucide et impartial.
Or, comble de l’aberration, il s’entichait de la fille même du supposé traître !
Que penserait Rebecca de lui s’il démasquait son père et réunissait des preuves contre lui au point qu’il soit traduit par sa faute devant la juridiction royale et condamné à être décapité ?
Pourrait-elle encore l’aimer ? Rien n’était moins sûr. Et même à supposer que ce soit le cas, que diraient le roi et ses propres parents lorsqu’il leur annoncerait qu’il voulait épouser la fille du félon ?
Blaidd se passa la main dans les cheveux et alla s’asseoir lourdement sur son lit. Peut-être se faisait-il du souci sans raison ? Il se pouvait fort bien, après tout, que les soupçons du roi ne fussent pas fondés. Au cours de toutes les conversations qu’il avait eues avec le comte, il ne lui avait jamais rien entendu dire qu’il n’eût déjà entendu dans la bouche d’autres seigneurs du royaume considérés comme parfaitement loyaux.
Lui-même ne se privait pas de critiquer certains aspects de la politique royale et l’influence excessive de la reine et de son entourage. Si le destin de Rebecca n’était pas lié à celui de son père et s’il n’avait pas envie de prolonger son séjour à Throckton pour jouir plus longtemps de sa compagnie, il chevaucherait déjà en direction de Londres pour aller rassurer le roi et lui dire que ses soupçons étaient infondés.
Mais il avait beau se répéter en lui-même ces paroles rassurantes, il n’en restait pas moins que certains aspects de la vie à Throckton laissaient à penser que le comte avait des revenus autres que ceux de sa terre. L’importance de la forteresse et de la garnison l’attestait, ainsi que la qualité des hommes d’armes. Et puis il y avait cette inquiétude de Meg pour sa maîtresse, son impatience à la voir mariée et loin de Throckton, sans compter les propos sibyllins de la belle prostituée.
Il sentait confusément que Throckton recelait de nombreux secrets et il était de son devoir de s’assurer qu’ils n’étaient pas liés d’une manière ou d’une autre à un complot contre Henry.
Combien de temps lui faudrait-il pour élucider ces points mystérieux ?
Il retira ses bottes puis sa tunique tandis que Trevelyan gémissait et se retournait dans son lit.
Levant les yeux vers la lune qu’il apercevait, haute dans le ciel, par l’une des étroites fenêtres, il prit la décision de rester un peu plus longtemps que ne l’avait suggéré Rebecca. Deux semaines devraient lui suffire à tirer au clair tout ce qui l’intriguait. A l’issue de ce délai, s’il n’avait rien trouvé de réellement compromettant pour le comte, il retournerait rassurer le roi à Westminster.
Trevelyan entrouvrit les yeux et fut soulagé de constater qu’il était au château dans la chambre qu’il partageait avec Blaidd. Il avait une migraine atroce, la bouche desséchée et une sensation nauséeuse horrible…
Il avait à peine pris conscience de son malaise qu’il se pencha hors du lit et rendit dans la cuvette que quelqu’un lui présentait.
Lorsqu’il fut libéré, il retomba sur le dos et distingua Blaidd qui repoussait du pied la cuvette devant la porte de la chambre.
— Mon Dieu ! Ayez pitié de moi, marmonna Trevelyan. Je meurs.
— Pas encore, répondit Blaidd en s’asseyant au pied du lit. Tu as trop bu et, maintenant, tu en supportes les conséquences.
Trevelyan se tourna vers le mur pour échapper au regard sévère du chevalier. Comment pouvait-il comprendre ce qu’il ressentait ? Tout lui souriait. S’il désirait une femme, il n’avait aucun effort à faire, elle le désirait plus encore. Les frères aînés de Trevelyan, qui enviaient Blaidd d’avoir autant de succès, en parlaient souvent entre eux.
— Pourquoi ne me laissez-vous pas seul jusqu’à ce que je me sente mieux ? demanda l’écuyer. Vous pourrez me faire ensuite tous les reproches que vous voudrez.
— Pour ce qui est de la bière, je pense que tu auras compris tout seul qu’il ne faut pas en abuser, reprit le chevalier, mais c’est la fréquentation des établissements de plaisir que je voudrais te faire passer.
Trevelyan ferma les yeux. Alors, il n’avait pas rêvé ? Il était allé dans ce lieu de perdition ? Autant qu’il essayât de se souvenir, il se voyait entrer dans le cabaret et suivre dans l’escalier cette jolie blonde qui lui souriait d’un air enjôleur par-dessus son épaule et, du doigt, lui faisait signe de la suivre.
— Tu ne te souviens de rien ?
Trevelyan aurait voulu le faire taire et qu’il s’en allât. Il était déjà accablé par suffisamment de remords sans qu’il eût besoin qu’on lui fît remarquer l’étendue de son erreur. A présent, dans la lumière crue du jour, il était désolé de constater que sa première rencontre avec une femme aurait été avec une prostituée. Ce qui aurait dû être un beau souvenir le remplissait au contraire de honte et de dégoût, sans compter la peur. Cette fille n’était-elle pas malade ? Ne risquait-il pas de mourir ou de souffrir horriblement ? Que savait-il, au juste, de ces maladies honteuses ?
Il se retourna vers Blaidd et essaya de se redresser.
— J’ai eu des relations avec elle, n’est-ce pas ? demanda-t il, la voix étranglée par l’inquiétude. Savez-vous si elle est malade ?
— Je n’ai aucun moyen de le savoir, pas plus que toi, d’ailleurs, répondit Blaidd. Alors, c’est heureux que tu ne sois pas allé très loin avec elle.
Trevelyan se laissa retomber sur l’oreiller.
— Je ne l’ai pas fait ?
— Non. Tu étais toujours habillé lorsque je t’ai trouvé, et elle aussi d’ailleurs.
« Sauvé ! » pensa le jeune homme, soulagé.
— Tu as de la chance parce que, sinon, tu m’aurais entendu.
— Je ne sais pas ce qui m’a pris…
— Tu ferais bien d’y réfléchir. J’aimerais que tu me donnes une raison, même pitoyable, pour être allé là-bas.
— J’étais fâché contre vous, répondit Trevelyan après un instant d’hésitation.
— Encore ? Je t’ai dit, pourtant, que je regrettais de t’avoir réprimandé devant Rebecca. Mais ça n’est pas, à mes yeux, une raison suffisante pour que tu ailles te souiller avec une fille de joie.
— Ce n’était pas pour ça que j’étais furieux.
Blaidd fronça les sourcils d’un air déconcerté.
— Explique-toi.
Trevelyan haussa les épaules et regarda ailleurs.
— Qu’est-ce qui a pu bouleverser à ce point le benjamin du baron Fitzroy ? demanda Blaidd sur un ton qui exigeait une réponse.
Le jeune homme releva les yeux en rougissant.
— Meg, marmonna-t il. C’est tout juste si elle remarque ma présence lorsque vous êtes là.
Blaidd allait lui répondre à quel point ce prétexte était idiot quand il se souvint d’une très forte jalousie qu’il avait ressentie autrefois, à quinze ans, pour une bergère dont il ne se souvenait même plus du nom aujourd’hui.
— Au fond, tu as essayé de noyer ton chagrin dans la bière et après, ragaillardi par l’alcool, tu as voulu retrouver l’estime de toi-même en te jetant dans les bras d’une femme qui ne se refuserait pas à toi.
Blaidd remua la tête d’un air désolé.
— Trevelyan ! Mon ami… Tu aurais dû venir me trouver. Si cette jeune fille fait attention à moi, ce n’est pas parce qu’elle recherche mes faveurs, mais parce qu’elle essaie de me persuader de m’intéresser à sa maîtresse.
L’écuyer eut l’air de ne pas comprendre.
— Je veux dire, reprit Blaidd, que Meg ne m’aime bien que dans la mesure où elle pense que je pourrais faire un bon mari pour sa maîtresse, mais pas celle pour laquelle je suis ici officiellement. C’est Rebecca qu’elle aimerait me voir épouser.
Trevelyan eut un air interloqué.
— Mais elle a une grosse cicatrice au visage…
Blaidd bondit sur ses pieds et planta un regard ulcéré dans celui du jeune homme qui ne lui avait jamais vu cette expression.
— Je vois que je vais être obligé de te donner une leçon sur la façon de juger les personnes, dit-il entre ses dents, luttant visiblement pour ne pas laisser éclater sa colère.
Sur ces mots, il tourna les talons et alla remplir d’eau une coupe pour le jeune homme. Cela lui donna le temps de se reprendre et de lui trouver des excuses. Il n’avait fait qu’exprimer à haute voix ce que d’autres pensaient secrètement. Il était préparé ainsi à leur future réaction s’il se présentait à la cour, un jour, avec Rebecca.
Il revint près du jeune homme et lui tendit la coupe :
— Tiens, bois. Ça te fera du bien.
Tandis que Trevelyan buvait l’eau fraîche avec délectation, Blaidd reprit :
— La fille cadette du comte de Throckton n’est peut-être pas d’une beauté aussi époustouflante que son aînée mais elle a beaucoup d’autres qualités. Elle a de l’esprit, du cœur, joue de la harpe comme un ange, monte à cheval d’une façon incomparable, gouverne les domestiques de ce château avec une efficacité admirable… Est-ce que tout ceci ne peut pas faire oublier une marque au visage que je ne trouve d’ailleurs pas, pour ma part, si disgracieuse ?
— Si, bien sûr, reconnut Trevelyan en posant la coupe sur sa table de chevet. Je n’avais pas conscience que vous l’aimiez autant.
Blaidd retourna à la table et souleva un linge qui recouvrait un plateau. Une odeur agréable de pain frais se répandit aussitôt dans la pièce.
— Crois-tu pouvoir manger quelque chose ?
— Je ne sais pas… Qu’en pensez-vous ?
— Il y a bien longtemps que je n’ai pas été soûl. Une fois m’a suffi, et j’espère qu’il en sera de même pour toi. Ce n’est pas le meilleur moyen de te faire respecter.
Trevelyan baissa les yeux sur le pain à l’aspect très appétissant.
— Peut-être qu’un petit morceau me fera du bien à l’estomac ?
Blaidd acquiesça et rompit un morceau de pain qu’il donna au jeune homme. Alors qu’il commençait de le manger lentement en mastiquant avec application, Blaidd s’assit de nouveau au pied du lit.
— Et maintenant, dit-il, par quel sermon est-ce que je commence ? La folie de fréquenter les prostituées ou la bêtise de juger des êtres d’après les apparences ?
Trevelyan soupira. La matinée allait être longue.
Souriant à la vie et ses surprises, Rebecca chantonnait doucement en prenant dans le coffre la jolie robe de velours bleu que lui avait offerte son père au Noël dernier. A présent où elle n’avait pas besoin de s’habiller avec raffinement pour attirer l’attention d’un homme, elle avait envie d’être belle.
— Tu es très gaie ce matin, observa Laelia alors que Meg nouait les lacets dans le dos de la robe vert émeraude et or qu’elle avait choisie de porter aujourd’hui.
— Parce qu’il fait beau, répondit Rebecca avec un sourire.
Ce qui était tout à fait vrai. Le soleil brillait dans un ciel parfaitement bleu, l’air était déjà presque tiède alors que la journée commençait à peine, le parfum des plantes et des fleurs du jardin envahissait la chambre par la fenêtre ouverte, confirmant que le printemps était bien arrivé.
Mais la raison principale de la joie qui l’habitait, ce matin, c’était la confession de Blaidd. Il avait des sentiments pour elle. Il la préférait à Laelia ! Il l’aimait assez pour l’embrasser à en perdre le souffle et, même, revenir lui faire officiellement la cour. Enfin, du moins en avait-il parlé. Et, alors, peut-être, son engouement pour elle se transformerait-il en amour durable ?
La veille, lorsqu’elle était venue se coucher, elle avait eu la satisfaction de trouver Laelia endormie. Elle s’était pelotonnée sous les couvertures et souvenue des baisers de Blaidd, de ses caresses, de la passion qui s’était emparée d’eux, de chaque parole qu’il avait prononcée devant elle. Elle n’aurait pas pu être plus heureuse si, par miracle, la marque de sa chute de cheval s’était effacée de son visage.
Elle regarda de nouveau la robe et fronça les sourcils. Si elle ne voulait pas soulever de soupçons, elle ne devait pas s’habiller différemment du jour au lendemain. D’autre part, elle avait l’intention de monter à cheval et ce vêtement ne conviendrait pas.
— Je ne pensais pas que tu serais d’une telle humeur, ce matin, après t’être couchée si tardivement, insista Laelia.
Rebecca tourna la tête vers sa sœur et rencontra le regard de Meg, qui ouvrait de grands yeux avides de curiosité.
— Oui… J’ai dû réveiller Rowan pour lui dire qu’il nous faudrait des anguilles. Père nous a dit aujourd’hui qu’il avait envie d’une terrine de ce poisson.
Ce n’était pas vraiment un mensonge. Elle avait, en effet, informé Rowan du désir exprimé par le comte, mais avant le souper et non après.
— Vas-tu enfin t’habiller convenablement, aujourd’hui ? demanda Laelia en regardant la robe que Rebecca avait toujours à la main.
— J’avais cru voir une déchirure, répondit la jeune fille en replaçant la robe dans le coffre, mais je m’étais trompée.
Elle sortit du coffre une autre robe d’un bleu foncé en laine fine qui, sans être aussi luxueuse que la précédente, était jolie aussi et mieux adaptée à l’équitation.
— C’est peut-être trop espérer également que tu aies aujourd’hui un comportement de jeune fille bien née et que tu évites de tirer à l’arc ? dit Laelia en soupirant avec exaspération tandis qu’elle laissait tomber les bras. Je sais que tu es très fière de savoir t’en servir, mais je me demande comment nous trouverons un homme qui voudra bien t’épouser s’il te voit accomplir des gestes aussi peu féminins.
Laelia s’approcha alors de sa sœur qui eut la surprise de lire dans ses yeux une expression de sollicitude qui semblait sincère.
— Je suis soucieuse de ton bonheur, Rebecca, dit-elle en tendant les bras vers elle. Crois-moi.
Rebecca lui prit les mains et répondit avec la même sincérité :
— Je ne suis pas opposée au mariage, Laelia, mais si je me marie, je veux que ce soit avec un homme qui m’aime et me respecte. Sinon, je préfère rester seule.
— Nous ne sommes pas si différentes, remarqua Laelia d’un air nostalgique. Moi aussi, je veux être aimée, et pas seulement pour ma beauté. J’ai l’impression qu’avec le chevalier Morgan j’ai trouvé, enfin, un homme qui voit au-delà des strictes apparences.
Pour la première fois de sa vie, Rebecca se rendit compte qu’elle n’était pas la seule à n’être considérée qu’en fonction d’une unique facette de son être. Elle avait toujours pensé que ce devait être merveilleux d’être jolie comme sa sœur, mais elle prenait conscience, à présent, que la beauté trop parfaite de sa sœur pouvait aussi constituer un obstacle à l’amour.
Elle espéra que Laelia ne lui en voudrait pas lorsqu’elle découvrirait le lien qui existait déjà entre le chevalier et elle. La beauté de son aînée, après tout, lui donnait un avantage qu’elle-même n’aurait jamais : la chance de susciter l’amour chez presque tous les prétendants qui se présentaient à Throckton.
Laelia retira ses mains de celles de Rebecca et, abandonnant brutalement le sujet, se tourna vers la porte.
— Ne sois pas en retard à la messe, dit-elle avant de sortir de la chambre.
Dès qu’elle fut seule avec Rebecca, Meg se tourna vers elle avec enthousiasme :
— Alors, ma damoiselle ? dit-elle, le regard brillant d’espoir.
Rebecca se sentit gênée devant une telle attente.
— Qu’y a-t il, Meg ?
La servante avança d’un pas et, les yeux levés sur sa maîtresse :
— Eh bien… le chevalier Morgan… ne vous a-t il rien dit ?
Meg était incapable de garder un secret, pensa Rebecca. Elle avait déjà, peut-être, deviné beaucoup trop de choses. Que diraient le comte et Laelia s’ils apprenaient de la bouche de Meg ce qui s’était passé entre Blaidd et elle ?
Elle s’efforça de prendre une expression sévère lorsqu’elle répondit à la jeune fille :
— Je crains que tu n’aies oublié qu’il incombe à un domestique d’être réservé et de ne jamais parler de ses maîtres avec un hôte.
Meg devint toute rouge.
— J’ai voulu seulement essayer…
— Je ne t’ai pas demandé d’explication que je sache ?
Meg baissa la tête.
— Non, ma damoiselle. Je suis désolée.
— Moi aussi. Tu aurais pu créer de profondes discordes avec tes suppositions, Meg. Dois-je te rappeler que nous n’aurions pas pu garder une servante qui aurait causé de tels problèmes ?
— Non, ma damoiselle.
Rebecca était assaillie de remords de faire honte ainsi à la pauvre Meg, mais elle n’en laissait rien paraître.
— Si tu me donnes ta parole que tu ne recommenceras jamais, je n’en toucherai pas un mot à mon père. Ceci restera entre nous.
— Je vous promets de ne plus jamais parler à un hôte, ma damoiselle.
— C’est bien. Je te crois, et maintenant retourne travailler.
— Oui, ma damoiselle, murmura la servante en se dépêchant de quitter la pièce.
Rebecca quitta la chambre peu après elle. Elle était triste d’avoir fait de la peine à Meg, mais elle ne pouvait pas prendre le risque de la laisser compromettre son espoir de bonheur.

 
 

 

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