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ÇáÊÓÌíá: Jun 2006
ÇáÚÖæíÉ: 7370
ÇáãÔÇÑßÇÊ: 363
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chapitre 2

— Eh bien, voilà, Kelly, dit Harold Bremmer en retirant ses lunettes. Ce n’est peut-être pas une consolation, mais le
testament de votre grand-père prévoit tout de même de vous léguer un certain nombre de propriétés.
La mine défaite après la nuit agitée qu’elle venait de passer, Kelly préféra ne rien répondre. Depuis son entrée dans le bureau du notaire, elle avait à peine prononcé deux mots. Les yeux fixés sur Harold Bremmer, elle n’avait pas non plus accordé un seul regard à Brant. Même si, la veille, il l’avait prévenue de ce que le testament contenait, Kelly avait eu le plus grand mal à le croire. Ce matin, la déception était de taille. Comment son grand-père avait-il pu lui jouer un aussi mauvais tour ?
— Mademoiselle McConell, vous allez vous retrouver à la tête d’une grande fortune. Mais, en ce qui concerne la société Harcourt et McConell...
— Alors que c’est justement ce qui me tenait le plus à cœur ! dit-elle avec dépit.
— Enfin, comme je vous l’ai dit, il vous reste une possibilité pour conserver la société dans votre famille.
A ses yeux, cette solution représentait au contraire une impossibilité majeure. Mais elle ne dit rien. Fouillant dans ses ********s, le notaire ajouta encore quelques précisions.
— Au sein de la société Harcourt et McConell, Jœ possédait cinquante et un pour cent...
— Comment ? s’exclama-t-elle, incrédule. Il possédait quatre-vingts pour cent !
— Non, mademoiselle McConell. M. Harcourt possède les quarante-neuf pour cent restants.
Brusquement, la jeune femme se tourna vers Brant.
— Jœ vous a donné quarante-neuf pour cent des actions ! s’écria-t-elle, scandalisée.
— Je peux vous assurer que je les ai payés très cher. Il ne me les a pas donnés, répondit Brant.
— Il ne m’a jamais dit qu’il en avait vendu autant ! Le silence pesant fut rompu par une intervention du notaire.
— Désirez-vous que je relise cette partie du testament ?
— Ce n’est pas nécessaire, Harold, déclara Brant. Kelly et moi avons bien compris ce que Jœ a proposé. Dans le cas d’un mariage, je recevrai les cinquante et un pour cent restants de la société. Combien de temps avons-nous pour nous décider ?
Pour évoquer ce mariage, Brant avait pris le ton de l’homme d’affaires qui traite un marché. Cette froideur bouleversait la jeune femme.
— Vous avez deux mois. Si, au terme de ce délai, vous n’êtes pas mariés, les parts seront vendues à l’unité en bourse, avec une clause interdisant l’achat de plus de dix parts. Kelly en recevra automatiquement dix. Mais de toute façon, monsieur Harcourt, vous resterez l’actionnaire principal.
— Oui, peut-être, mais je n’aurai pas le contrôle de la compagnie ! s’exclama-t-il avec irritation. Le seul moyen de l’obtenir est d’épouser Kelly.
En entendant ces mots, Kelly sentit son cœur se serrer. Quel sinistre marché ! pensa-t-elle. Accablée, elle resta silencieuse.
— Euh ! Oui, c’est cela, convint M. Bremmer, l’air embarrassé. Dans le cas d’un mariage, vous auriez les pleins pouvoirs. Kelly, de son côté, recevrait chaque année un pourcentage des bénéfices. Sur le plan financier, l’un et l’autre, vous avez tout à y gagner. Bien sûr, si vous divorciez, vous perdriez vos avantages...
La chaise de Kelly grinça contre le parquet quand elle se leva.
— Merci, monsieur Bremmer, j’en ai assez entendu.
— Je n’ai pas terminé, il reste encore quelques pages sur ce sujet.
— Certainement, mais je n’ai pas besoin d’en savoir plus.
En hâte, Kelly serra la main du notaire qui la regarda d’un air surpris. Puis, sans jeter un seul coup d’œil à Brant, elle quitta la pièce. Un tremblement nerveux l’agitait quand elle se retrouva sur le grand boulevard. Abritée sous le porche de l’immeuble, elle regarda un instant les passants qui avançaient sous la pluie.
Enfin, relevant le col de son trench-coat, elle s’engouffra dans la foule. Avant qu’elle ait eu le temps d’aller très loin, quelqu’un l’arrêta d’une main énergique.
— Venez, ma voiture se trouve au coin de la rue.
Brant ne lui laissa pas le temps de discuter. En dix secondes, il l’avait fait monter dans sa Rolls-Royce blanche. Kelly était furieuse.
— Je peux très bien rentrer toute seule !
— Vous êtes venue avec votre voiture ? demanda-t-il avec un calme exaspérant.
— Non, j’avais pris un taxi.
— Alors je vous raccompagne.
Aussitôt la luxueuse voiture démarra et s’engagea dans le trafic. Kelly jeta un regard sur les mains de Brant qui tenaient fermement le volant. Une montre Gucci, très chic et très sobre à la fois, jetait des éclats dorés. Déjà midi et Kelly n’était pas encore au bureau ! Depuis hier soir, abasourdie par les paroles de Brant, incapable de penser à autre chose, elle n’avait pas vu le temps passer. De son côté, Brant se taisait, le visage fermé. Dehors, il pleuvait à verse. Quelle lugubre journée ! Encore bouleversée, Kelly ne remarqua pas tout de suite que Brant ne prenait pas la direction des bureaux.
— Mais où m’emmenez-vous ? s’écria-t-elle, affolée.
— A vous entendre, on croirait que c’est un enlèvement ! Comme nous n’avons pas dîné ensemble hier soir, je pensais que nous pourrions déjeuner au restaurant aujourd’hui.
— Je ne souhaite pas déjeuner avec vous, Brant. Pour être claire, je préférerais que nous limitions nos rencontres au strict minimum.
Les nerfs à fleur de peau, Kelly tremblait mais elle essayait de contenir son émotion.
— Ça suffit maintenant ! Pour qui vous prenez-vous ? s’exclama-t-il en faisant une brusque embardée. D’accord, vous en voulez à votre grand-père, mais ne passez pas votre colère sur moi ! Je ne le supporterai pas, Kelly. Comme vous, je suis victime des décisions de Jœ. Il savait que je voulais prendre la direction de la compagnie. L’année dernière encore, je lui ai proposé de la racheter à un très bon prix. Il a refusé...


— Une victime ! Vous ! Faites-moi rire ! Vous seriez bien du genre à avoir convaincu mon grand-père de l’avantage de cet arrangement ! Tous les moyens vous seraient bons pour mettre la main sur la société !
— Kelly, croyez-moi, je ne suis pas si bête ! Si j’avais eu ce pouvoir de persuasion sur votre grand-père, la condition pour obtenir ses actions n’aurait pas été de vous épouser !
La gorge serrée, Kelly se tut. L’émotion de la jeune femme laissa Brant insensible, toutefois il changea de ton.
— Ecoutez, allons-nous enfin nous comporter en adultes raisonnables ? Nous discuterons de tout cela en déjeunant.
Kelly, incapable de parler, se *******a de hocher la tête. Dix minutes plus tard, ils entraient dans un des restaurants les plus réputés de la ville. Toutes les tables semblaient occupées et pourtant, le maître d’hôtel qui vint les accueillir les guida immédiatement jusqu’à sa meilleure table.
— Dois-je en conclure que vous aviez déjà réservé ? demanda-t-elle lorsque le maître d’hôtel les eut quittés.
— J’ai l’impression que si je réponds oui, vous allez encore vous mettre en colère.
— Je ne vais pas me mettre en colère, simplement je n’aime pas que l’on présume de mes actes.
— Très bien. Vous voyez, j’ai beaucoup à apprendre de vous, Kelly.
Sans savoir pourquoi, Kelly se sentit rougir et elle baissa les yeux sur le menu. Quelques secondes après, elle jeta sur lui un regard à la dérobée. Cet homme était d’une beauté irrésistible. La coupe élégante de son costume de cachemire laissait deviner un corps d’athlète et le blanc éclatant de sa chemise faisait ressortir son teint hâlé et le noir de ses cheveux. Elle remarqua que ses cils noirs et épais ombraient légèrement ses joues. Soudain, Brant leva les yeux et surprit ce regard.
— Je crois que je vais prendre du saumon, dit-elle à l’improviste.
— Moi aussi.
Il referma le menu et adressa à Kelly un sourire inattendu. Aussitôt, le cœur de la jeune femme se mit à battre la chamade. Heureusement, le serveur, qui venait prendre la commande, fit diversion. Quand il fut reparti, ils reprirent la conversation.
— Etes-vous déjà venue ici ?
— Oui, cela m’est arrivé, avec...
— Avec Daniel, ajouta-t-il, l’air indifférent.
— Oui.
— Vous sortez souvent ensemble depuis quelque temps ?
En posant cette question, Brant s’attarda sur le beau visage de Kelly, fixa sa bouche pulpeuse puis contempla le vert profond de ses yeux.
— C’est vrai, répondit-elle, laconique.
— Votre liaison est-elle sérieuse ?
— Votre question est indiscrète, Brant !
— Vous savez pourquoi je vous le demande, Kelly.
Le serveur apporta une bouteille de bordeaux. Brant le goûta et le servit lui-même.
— Alors ? demanda-t-il en versant le vin dans son verre.
— Vous me posez ces questions à cause du testament de mon grand-père ?
— Nous sommes ici pour en discuter, je vous le rappelle.
— Selon vous, on peut en discuter comme s’il s’agissait d’une chose envisageable ?
— Exactement. Ecoutez, Kelly, ce mariage pourrait être une bonne affaire pour tous les deux. Essayez d’y réfléchir et vous serez de mon avis.
— Mais vous parlez comme si vous alliez conclure un marché ! Dans un mariage, d’autres choses entrent en jeu, non ?
— Je fais simplement preuve de réalisme ! Je veux avoir la direction de la compagnie McConell et je sais que vous aimeriez y participer vous aussi. Le mariage peut nous permettre à tous deux de réaliser nos projets. Et cela me semble tout à fait raisonnable ! Bien sûr, je comprends très bien votre première réaction. Elle est normale. En général, les femmes voient la vie de façon sentimentale. Mais vous, vous êtes au-dessus de cela. Vous êtes une femme de tête et je suis certain qu’avec le temps, j’arriverai à vous convaincre.
Etourdie par ce qu’elle venait d’entendre, Kelly préféra ne pas répondre. Ses pensées se précipitaient dans sa tête et elle ne parvenait pas à réfléchir calmement. D’un air distrait, elle promena son regard dans le restaurant. Des couples d’amoureux discutaient à voix basse et leurs chuchotements se mêlaient à la musique romantique que jouait un pianiste. Peut-être parlaient-ils de leur futur après-midi ensemble, peut-être échangeaient-ils des serments d’amour ? En tout cas, personne n’aurait pu deviner le sujet de la conversation qui se tenait entre Kelly McConell et Brant Harcourt. Quel contraste entre cette sordide transaction et l’aspect enchanteur du restaurant ! Soudain, devant le ridicule de la situation, Kelly eut envie de rire, d’un rire nerveux. Mais bien vite, les larmes lui piquèrent les yeux. Prenant son verre, elle termina les quelques gorgées de bordeaux. Déjà sa tête tournait.
— Prenez votre temps avant de me donner une réponse.
A ce moment, l’entrée fut apportée par le serveur. Arrangé avec art, agrémenté de caviar, le saumon semblait excellent. Mais Kelly n’avait pas le cœur à manger. Une question la tourmentait depuis la veille.
— Depuis combien de temps connaissiez-vous les termes du testament, Brant ?
— Une semaine avant sa mort, répondit-il en emplissant les verres. Alors que je me trouvais auprès de lui pour le tenir au courant des affaires, votre grand-père m’a confié que son plus grand souhait était que j’épouse sa petite-fille.
Cela, elle le savait déjà ! Son grand-père lui en avait parlé à diverses reprises et cela avait provoqué des discussions houleuses entre eux.
— Je suis étonnée que vous n’ayez pas essayé de le raisonner !


— Avez-vous déjà réussi à faire changer d’avis Jœ McConell ?
Dans un éclair, Kelly revit le visage obstiné de son grand-père qu’elle aimait tant. Ce souvenir la fit sourire d’attendrissement.
— Vous voyez ! Et puis, plus j’y ai réfléchi, plus j’ai trouvé son projet sensé.
— Pour vous, peut-être. Il est dans votre intérêt que j’accepte ce marché ! La société McConell est à la clé !
— Kelly, vous savez que cet arrangement vous permettrait de ne plus avoir de soucis financiers jusqu’à la fin de vos jours...
— De toute façon, ce problème ne se posera pas !
— Ce que vous recevrez sera très inférieur à ce que je pourrais vous offrir. Et puis, si les actions sont vendues, pensez que la compagnie sortira de votre famille définitivement.
Cette perte serait difficile à accepter ! Comment Jœ McConell avait-il pu jouer un aussi mauvais tour à sa petite-fille ? pensa Kelly. Il n’ignorait pas combien elle tenait à cette entreprise qui évoquait pour elle le souvenir lointain de son père. De plus, y travailler lui avait permis de découvrir son grand-père et de se rapprocher de lui. Mais, si au prix de gros efforts, Kelly avait tenté de gagner son respect sur le plan professionnel et de trouver une place dans sa compagnie, force était de constater qu’elle n’y était pas parvenue.
Après avoir retiré les assiettes, le serveur apporta le plat suivant. La musique avait changé : le chanteur de l’orchestre racontait une belle histoire d’amour. Combien Kelly en était loin ! Le cœur serré, elle vida son verre de vin d’un trait.
— Avez-vous vraiment l’intention de gâcher votre vie par un mariage sans amour pour satisfaire votre ambition ?
— Il ne s’agit pas seulement d’ambition, Kelly. Diriger la société est l’objectif que je me suis fixé. Et puis, pour ce qui est du mariage, vous savez, j’ai trente-sept ans. J’ai passé l’âge des amourettes ! Je suis sûr que nous pouvons être heureux ensemble. Nous avons beaucoup d’intérêts communs sur le plan professionnel, et en plus vous êtes une très jolie femme. Que pourrais-je désirer d’autre ?
Malgré son agacement, Kelly ne put s’empêcher d’être flattée par le compliment que Brant venait de lui adresser. Peu habituée à boire de l’alcool, après deux verres de vin, Kelly avait l’impression que tout commençait à tourner autour d’elle. Elle avait perdu le sens des limites et ses questions se firent indiscrètes.
— Mais, si je ne me trompe, vous avez eu des histoires d’amour ? Vous avez été marié, non ? Je suppose que vous n’avez pas épousé votre femme pour des raisons purement professionnelles ?
A ces mots, le visage de Brant s’assombrit.
— Les raisons pour lesquelles j’ai épousé Francesca étaient en effet très différentes, répondit-il.
Depuis longtemps, Kelly avait été intriguée par la superbe Francesca Harcourt. Ce mariage avait fait la une des journaux, avec nombre de photos du top model italien.
— Vous étiez éperdu d’amour pour cette femme, n’est-ce pas ? continua Kelly sans savoir pourquoi.
— Ma femme est morte il y a quatre ans, Kelly, et tout cela ne vous regarde pas.
— C’est exact, Brant. Mais j’aimerais comprendre comment elle a pu faire pour vous séduire. Car vous semblez totalement indifférent, insensible même...
Elle divaguait ! Incapable de s’arrêter, elle devenait presque provocante. Un sourire amusé accueillit ses dernières paroles. Mais aussitôt, Brant reprit son sérieux.
— Voulez-vous que nous partions ? demanda-t-il.
— Oui.
Une fois dehors, l’air frais donna soudain le vertige à la jeune femme. Pour la retenir, Brant lui entoura la taille de son bras. Pendant quelques secondes, Kelly se laissa aller contre lui.
— Je suis désolée, Brant, j’ai à peine mangé et je n’ai pas l’habitude de boire de vin !
— C’est ma faute. J’aurais dû vous en empêcher.
— Je ne suis pas encore votre femme, Brant ! Et même si je l’étais, vous n’auriez pas à me dire ce que je dois ou ne dois pas faire !
Sans commentaire, il resserra son étreinte et entraîna Kelly vers la voiture. Une fois devant la Rolls-Royce, Brant la libéra, mais seulement pour l’obliger à lui faire face.
— Ma chère Kelly, tout à l’heure, j’ai remarqué que vous avez ajouté un « pas encore ». J’en suis heureux, car cela me laisse un peu d’espoir, murmura-t-il.
Sur son visage ne se lisait aucune expression ironique. Il parlait sérieusement. Pour éviter l’intensité de son regard, Kelly détourna la tête, mais aussitôt il lui saisit le menton d’une main. Brant était si proche que Kelly percevait l’odeur troublante de son parfum. Sa présence l’envoûtait. Les yeux de la jeune femme furent attirés par le dessin parfait de sa bouche, à la fois volontaire et sensuelle. Elle était si près de la sienne ! Levant les yeux, Kelly croisa le regard mystérieux de Brant. Le cœur battant, elle sentit sa main effleurer sa belle chevelure blonde.
Brusquement, il brisa le charme et se retourna pour ouvrir la porte de la Rolls.
— Entrons dans la voiture avant qu’il se remette à pleuvoir.
— Oui, dit-elle d’une voix troublée.
Encore tremblante, elle s’installa dans le confortable siège de cuir. Dans un moment d’égarement, elle avait cru qu’il allait l’embrasser. Honteuse, Kelly n’osait s’avouer sa déception.
— Dites-moi, Kelly, habitez-vous toujours chez votre grand-père ou êtes-vous retournée dans votre appartement ?
— Lorsque mon grand-père est parti à l’hôpital, je suis revenue chez moi.
Le souvenir pénible des dernières semaines passées auprès de son grand-père lui revint. Kelly avait emménagé chez Jœ McConell afin de pouvoir mieux s’occuper de lui. Le vieux monsieur s’était souvent montré impatient et irritable, mettant la résistance de sa petite-fille à dure épreuve. De plus, l’angoisse et le choc provoqués par sa mort l’avaient profondément déprimée.




— Vous avez oublié de tourner à droite pour aller au bureau, fit-elle remarquer d’une voix absente.
— Non, parce que nous n’allons pas au bureau. Je vous ramène chez vous.
— De quel droit ? J’ai du travail qui m’attend !
Brant ne daigna pas répondre. Il avait raison. Pour être honnête, Kelly ne se sentait pas de taille à affronter la pile de dossiers en retard qui s’entassait sur son bureau.
Ils n’échangèrent plus un mot, jusqu’à ce que Brant gare sa Rolls devant un bel immeuble. Dans une résidence de luxe, au milieu d’un parc situé en dehors de la ville, se trouvait l’appartement de Kelly. Brant avait déjà eu l’occasion d’y passer avec Jœ McConell.
— Je ne veux pas que vous retourniez au bureau avant la semaine prochaine ! ordonna-t-il d’une voix impérieuse.
Irritée au plus haut point par son attitude, Kelly réussit néanmoins à garder son calme.
— Par contre, pensez-vous pouvoir venir au cocktail offert par Georges pour son départ à la retraite ?
— Brant, je ne suis pas invalide ! Je peux très bien me rendre à une soirée !
Avait-il l’intention de lui demander d’être sa cavalière ? Le rythme de son cœur s’accéléra.
— Parfait ! Alors nous nous verrons là-bas. Entre temps, réfléchirez-vous à ma proposition ?
Devant ce comportement aussi désinvolte, Kelly devint furieuse. Ses yeux brillaient de colère.
— Quelle proposition ? Vous parlez de ce sinistre marché ?
— Vous savez très bien de quoi je parle.
— Navrée, Brant, je préfère réfléchir aux moyens d’annuler le testament de mon grand-père. Je pourrais le porter devant un tribunal et gagner ma cause.
Une telle éventualité n’eut pas l’air de le troubler.
— Oui, c’est vrai. Cela dit, vous prenez un risque. Une telle affaire provoquerait un scandale et le nom de votre grand-père serait sali. Et puis, vous ne seriez pas certaine de gagner.
— Rappelez-vous l’affaire Hadock contre Rollins. Le jury a donné raison au plaignant et le testament a été annulé.
— Et qu’allez-vous plaider ? Prétendrez-vous que votre grand-père était sénile ?
— Non ! En fait, je... je ne sais pas encore. Le problème demande réflexion. Je n’aurai sûrement pas le temps de m’occuper de votre proposition.
— Je sais déjà que vous ne vous lancerez pas dans un procès, Kelly. La meilleure solution est de respecter les dernières volontés de Jœ.
— Non, pas question ! s’écria-t-elle.
Elle sortit de la voiture et claqua violemment la porte. En deux secondes, elle ouvrait la porte de l’immeuble et entrait dans le hall dallé de marbre sans même regarder en arrière. La superbe voiture blanche démarra et s’éloigna à toute vitesse.
Une fois chez elle, toute son audace et sa confiance s’évanouirent. Kelly avait voulu défier Brant Harcourt ; à présent, cela lui semblait au-delà de ses forces. En théorie, il était très possible de faire annuler le testament ; hélas, Brant avait deviné juste : jamais elle ne pourrait salir la mémoire de son grand-père.
Oublier toute cette affaire, voilà la seule solution qui lui restait. Renoncer à la société familiale, ne plus penser à cet arrangement humiliant imaginé par Jœ : épouser Brant Harcourt pour conclure une bonne affaire ! Aux yeux de Kelly, de telles motivations étaient odieuses. Comment accepter un mariage sans amour ? La situation était cruelle. Car, malheureusement, Brant n’éprouvait pour elle qu’une froide condescendance. Cela était d’autant plus difficile à supporter que Kelly, depuis bien longtemps, s’était éprise de l’arrogant avocat.

 
 

 

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Chapitre 3



— Kelly, tu nous as manqué cette semaine.
— Tu es gentil, Daniel. Le travail a dû être épuisant ces derniers jours, non ?
— Pas plus que d’habitude ! Je t’appelais pour prendre de tes nouvelles. Comment vas-tu ?
Confortablement assise dans un fauteuil de cuir, Kelly écoutait avec plaisir la voix chaleureuse de son ami.
— Je vais bien, merci. J’avais besoin d’un peu de repos supplémentaire...
— Oui, je comprends. Après la disparition de ton grand-père... Au fait, le notaire a lu le testament mardi dernier ?
— Oui.
Evidemment, Daniel n’avait pas oublié ce détail. Parmi ses collègues, les hypothèses les plus fantaisistes devaient circuler. Kelly s’attendait à des questions qui, à sa grande surprise, ne vinrent pas.
— Tiens, je voulais te demander une faveur. M’accepterais-tu comme cavalier pour la soirée de Georges ?
— Tu sais, Daniel, je ne suis pas vraiment d’humeur à me rendre à une soirée. Mais enfin, c’est en l’honneur de Georges. Il était le plus vieil ami de Jœ et je lui dois de venir.
— Il serait déçu si tu n’étais pas là. Moi aussi, d’ailleurs ! Et puis, à cette heure de la journée, je ne pourrai plus trouver d’autre cavalière.
Kelly éclata de rire.
— Quel menteur ! Ton carnet d’adresses est rempli de numéros de téléphone. Il te suffit d’en choisir un au hasard pour me trouver une remplaçante au pied levé. Puisque tu insistes, j’accepte ton invitation.
— Parfait, je passe te prendre à 8 heures.
En reposant le combiné, Kelly se dit qu’elle avait pris la bonne décision. Ce soir, elle n’avait pas envie de rester seule. Sortir, retrouver ses amis, se changer les idées... Au fait, Brant serait là ! Agacée, Kelly se demanda quelle pourrait être la beauté qui l’accompagnerait. La dernière fois, il avait à son bras une superbe rousse qui avait fait sensation. Oui, c’était bien le genre de Brant Harcourt de lui proposer le mariage et, quelques jours plus tard, de sortir avec sa nouvelle conquête ! Il n’abandonnerait pas ses habitudes de séducteur pour elle. Sans doute le mariage qu’il lui offrait n’était à ses yeux qu’un contrat signé entre deux associés. Alors pourquoi se gênerait-il ?
Le cœur serré, Kelly laissa vagabonder son regard dans la grande pièce du salon. Au-dessus de la cheminée se tenait le portrait de son grand-père.
« Comment as-tu osé me faire cela ? » murmura-t-elle.
Kelly fixa le sourire énigmatique de Jœ McConell. Depuis longtemps déjà, il ne lui avait pas dissimulé son vif désir de la voir épouser son associé. La jeune femme se rappelait la lueur de joie qui avait brillé dans ses yeux bleus le jour où il les avait présentés l’un à l’autre. Le lendemain, un samedi, Jœ avait envoyé Kelly chez Brant Harcourt, sous pré****e de lui apporter des ********s importants.
Kelly n’était pas dupe : ces papiers ne contenaient rien d’essentiel, Jœ aurait pu les lui transmettre le lundi suivant. Mais son grand-père avait été inflexible et Kelly avait dû se rendre chez le séduisant Brant Harcourt.
Ce jour-là, l’Aston Martin bleue de Brant était garée en bas de chez lui. Pourtant, quand Kelly sonna chez lui, il n’y eut aucune réponse. Dans l’espoir d’apercevoir le propriétaire ou bien un employé, elle passa par le jardin et découvrit une terrasse sur laquelle donnait une baie vitrée. Toujours personne ! Alors Kelly fit quelque chose qu’en temps normal elle n’aurait jamais fait : elle regarda par la fenêtre. Oh ! Elle ne voulait pas être indiscrète, seulement accomplir la mission confiée par son grand-père puis s’en aller. Mal lui en prit.
La scène resta gravée dans sa mémoire. Brant tenait enlacée une très jolie brune, vêtue d’une petite robe pailletée d’argent. Apparemment ils avaient passé la soirée précédente ensemble. Une main posée sur la taille fine, l’autre caressant les longs cheveux noirs, Brant la couvait d’un regard ardent. Soudain, attiré par la silhouette à la fenêtre, il détourna la tête et aperçut Kelly.
Mortifiée par son indiscrétion, Kelly n’avait eu qu’une envie : s’enfuir au plus vite. Mais Brant ne l’entendait pas ainsi. Rapidement il la rattrapa dans l’allée.
— Bonjour, mademoiselle McConell. Que puis-je faire pour vous ? demanda-t-il, narquois.
— Rien, répliqua-t-elle sèchement. Je suis venue vous apporter ces dossiers, sur l’ordre de mon grand-père.
D’un geste brusque, elle lui mit les ********s dans les bras.
Il se rendrait compte que ces papiers n’avaient rien d’urgent, que tout cela n’était qu’un stratagème imaginé par son grand-père. A moins qu’il pense qu’elle l’avait elle-même inventé ? Extrêmement gênée, elle bredouilla des excuses.
— Je suis désolée de vous avoir dérangé...
— Ce n’est pas grave. Je ne vous retiens pas. A bientôt, mademoiselle !
Inutile de dire que sa voiture avait battu des records de vitesse. Kelly était rentrée chez elle, en rage de s’être fait humilier par cet arrogant personnage. Sa colère se tournait aussi contre elle-même. Elle s’en voulait de ne pas rester insensible au charme de Brant. Car elle était assez lucide pour s’apercevoir que la jalousie se mêlait à sa fureur. Ce jour-là, Kelly comprit que depuis l’entrée de Brant dans la société, elle s’était méprise sur ses sentiments pour le nouvel associé de son grand-père ; ce n’était pas de la rancœur qu’elle éprouvait à son égard, mais de l’amour.
Le lundi matin, Jœ McConell, impatient de connaître le fin mot de l’histoire, fit demander à sa petite-fille de monter le voir.



— Alors, comment t’a-t-il reçue, samedi, quand tu lui as apporté les ********s ?
— Tu veux vraiment le savoir ? Eh bien, je lui ai remis les dossiers, et il n’y a rien à raconter de plus.
— Il ne t’a pas invitée chez lui ?
— Non, il était occupé avec sa petite amie.
Kelly, à l’évidence, souhaitait mettre fin à l’interrogatoire. Mais il y avait trop d’émotion dans sa voix pour que la curiosité de son grand-père ne soit pas éveillée.
— Avec Brant, cela ne signifie pas grand-chose. Cela n’aurait pas dû t’impressionner, Kelly. Je te croyais plus tenace.
Jœ McConell avait raison : Kelly était tenace... seulement sur le plan professionnel. Dans le domaine affectif, elle manquait d’expérience et d’assurance pour oser poursuivre un homme de ses assiduités.
— Je ne tiens pas à me ridiculiser, grand-père. Il a déjà quelqu’un.
— Je suis sûr que ce n’est pas sérieux ! s’exclama-t-il.
La conviction avec laquelle il s’exprima surprit la jeune femme.
— Comment peux-tu le savoir ?
— Parce que je connais bien Brant Harcourt. L’autre jour, j’ai rencontré le père de sa femme défunte. C’est un vieil ami. Il est juge à Toronto. Nous avons discuté un peu et il m’a dit que son beau-fils ne s’est jamais remis de la mort de Francesca. Cela remonte à trois ans maintenant. Il l’adorait et depuis, il souffre beaucoup.
— Grand-père, je ne vois pas en quoi la vie privée de Brant nous concerne !
— Mais si, cela nous concerne. Brant vit seul dans sa grande propriété. J’ai l’intention d’organiser une soirée ce week-end et de l’inviter. Qu’en penses-tu ?

C’est ainsi que Kelly se retrouva dans le bureau de Brant Harcourt, chargée d’une invitation à dîner. Son grand-père avait repoussé ses protestations véhémentes et l’avait forcée à aller frapper à la porte voisine cinq minutes plus tard.
— Bonjour, mademoiselle McConell. Que désirez-vous ? demanda Brant d’une voix glaciale.
Il n’avait pas levé la tête. Visiblement concentré sur un ****e de loi difficile, il tenait un stylo à la main et notait un passage sur son bloc-notes.
Pendant un instant, Kelly ne sut que dire. Que faisait-elle ici ? Son grand-père se trompait complètement sur le compte de son associé. Lui, un homme solitaire un homme malheureux ?
— Kelly, je suis extrêmement occupé...
Enfin, il regardait la mince jeune femme, élégamment vêtue d’un tailleur de couturier. Rougissant sous son regard, Kelly fut touchée de l’entendre l’appeler par son prénom. Hélas, sa joie ne dura pas.
— Si vous venez à propos de votre candidature, je dois vous annoncer qu’elle a été refusée, enchaîna-t-il. Nous avons choisi Daniel Marsden, un nouveau venu dans l’entreprise.
Quel manque d’égards ! La déception et la colère lui firent serrer les poings.
— Je le sais déjà. Mon grand-père m’en a déjà informée.
C’était un mensonge délibéré. Mais il fallait sauver la face.
— Je suis venue pour vous inviter à dîner vendredi soir...
— Désolé, j’ai trop de travail, coupa-t-il en plongeant dans ses dossiers. Et puis, il est inutile de vous attendre à un traitement de faveur par ces délicates intentions. Comme je vous l’ai dit, le poste a déjà été attribué. Ce n’est pas parce que vous êtes la petite-fille de Jœ McConell que vous aurez la préférence. Tenez-vous-le pour dit ! C’était peut-être le cas par le passé mais, maintenant que je suis l’associé de votre grand-père, c’est terminé !
Kelly n’en croyait pas ses oreilles. Jamais elle n’avait entendu des paroles si humiliantes !
— Que croyez-vous donc ? Je n’ai jamais bénéficié de tels privilèges et je n’en attends pas de votre part !
— Ah ! Vraiment ? Très bien, dit-il avec un regard incrédule. Alors, je vous remercie pour votre invitation désintéressée et je regrette de ne pouvoir accepter.
*
* *
En songeant à cette lointaine conversation, Kelly sentait l’indignation resurgir en elle. Avec quelle facilité Brant Harcourt pouvait être insultant ! A plusieurs reprises, il l’avait fait sortir de ses gonds. Et pourtant, il lui suffisait de sourire, de parler avec douceur, pour que toute la rancune de Kelly disparaisse aussitôt.
Dans un soupir, Kelly se leva de son fauteuil et fixa le majestueux portrait.
« Grand-père, cette fois-ci, tu es quand même allé trop loin ! Brant ne veut pas de moi. Il ne m’aime pas ! »
Afin de chasser ses idées noires, elle décida d’aller s’apprêter pour la fête de ce soir. L’air soucieux, Kelly monta l’escalier et gagna sa chambre.
Cette pièce était décorée avec goût. C’est elle qui avait choisi la couleur bleutée du papier, les confortables fauteuils beiges, les lourds rideaux de velours. Son grand lit était recouvert d’un immense édredon confortable et de coussins assortis aux motifs cachemire des draps. Sur sa coiffeuse, Kelly avait déposé quelques flacons des parfums français qu’elle aimait ainsi que son précieux coffret à bijoux. Chaque jour, elle avait soin de garnir sa chambre d’un bouquet de roses blanches ou d’orchidées, ses fleurs préférées. Kelly était fière de posséder à vingt-sept ans un vaste appartement qui lui plaisait. Grâce à son travail, et à un petit coup de pouce de son grand-père, elle avait pu l’acheter et l’aménager à son aise. Il représentait à ses yeux une indépendance chèrement acquise et une certaine réussite personnelle.
Jetant un œil à sa montre, Kelly vit qu’il ne fallait plus tarder à se préparer. Une bonne douche lui remettrait les idées en place !
Enveloppée dans un peignoir de velours, assise à sa coiffeuse, Kelly avait remonté en chignon ses cheveux blonds qui bouclaient légèrement sur sa nuque. Etendant le bras vers sa chaîne laser, elle mit un disque de Chopin. La musique romantique était sa passion. Brant Harcourt se moquerait d’elle s’il savait qu’à ses moments perdus, Kelly s’enfermait dans sa chambre et écoutait des mélodies mélancoliques de Liszt, de Schubert. Oui, il serait incapable de comprendre. Et puis, qu’il aille au diable !
Comme pour le défier, elle monta le son.





Vêtue de sa combinaison de soie, Kelly passa en revue les robes qui emplissaient sa penderie. Son choix s’arrêta sur une somptueuse robe émeraude que jamais elle n’avait osé porter. Le décolleté très avantageux lui avait jusqu’à présent semblé trop audacieux. Ce soir, porter cette tenue ne lui ferait pas peur, elle se sentait toutes les audaces.

Dans la voiture de Daniel pourtant, Kelly eut quelques scrupules tardifs. Sa robe, très près du corps, soulignait sa mince silhouette de façon presque impudique. Si seulement elle avait pensé à mettre un collier pour détourner les regards de ce décolleté plongeant ! En tout cas, Daniel l’avait accueillie par un sourire d’admiration. A présent, il l’entretenait à propos des récentes victoires du cabinet Harcourt et McConell et faisait les louanges de Brant : son dernier procès avait été un coup de maître.
— Tu vois, à mon avis, il n’aura aucun mal à gagner ce procès. L’accusation a été prise de court. Apparemment, ils étaient persuadés que l’affaire était dans la poche. Au dernier moment, Brant a présenté une pièce qui a renversé la situation. Franchement, Kelly, c’était brillant ! Il vaut mieux avoir Brant de son côté, je t’assure. Cet homme est redoutable !
— Oui, je veux bien te croire.
— Après cela, je ne m’étonne plus que Jœ McConell ait tenu absolument à l’avoir comme associé, continua-t-il sans remarquer la nervosité de sa passagère.
— J’ai toujours pensé que Georges Wright aurait été meilleur à ce poste.
— Tu plaisantes ! Georges était trop âgé pour occuper un tel poste ! Dis donc, tu te souviens que nous allons fêter sa retraite ?
— En tout cas, si Jœ lui avait proposé de travailler avec lui, il ne serait peut-être pas parti.
— J’en doute. Et puis, jamais Georges n’aurait eu les capitaux nécessaires pour devenir l’associé de Jœ. C’est un excellent avocat, mais il n’a pas l’envergure de Brant.
Les réponses de Kelly avaient intrigué Daniel qui lui jeta un regard étonné.
— Essayes-tu de me dire que tu trouves Brant Harcourt incompétent ?
— Non, il est assez bon dans son domaine.
— Quoi ? Tu dois être la seule femme de Toronto qui ne soit pas folle de lui ! C’est le meilleur parti de toute la ville... à part moi, évidemment !
— Oh ! Toi, tu es hors concours, Daniel !
— J’espère que c’est un compliment, mademoiselle McConell !
Devant le prestigieux Majestic Hotel où la société McConell organisait ses festivités, Daniel gara sa voiture de sport.
— Mais bien sûr !
— Tu es adorable, répondit Daniel en déposant un baiser sur ses lèvres.
Kelly le savait : les baisers de Daniel ne prêtaient pas à conséquence. Entre eux, c’était une manifestation de tendresse et d’amitié plus que d’amour. Daniel Marsden était réputé pour être un don Juan et Kelly ne s’en formalisait pas. Il restait pour elle un excellent ami et rien de plus.
— Tiens, voilà Brant ! s’exclama-t-il en se redressant.
En effet, la Rolls blanche venait de se garer en face de leur voiture et Brant, d’une grande élégance dans son smoking noir, en sortait avec sa prestance habituelle. Pendant quelques secondes, Kelly resta fascinée par la séduction extraordinaire qui émanait de cet homme. Elle ne remarqua pas immédiatement qu’il était accompagné.
— Eh bien ! C’est Susanna Winters ! s’écria Daniel.
Aussitôt Kelly aperçut la pulpeuse femme blonde vêtue d’un fourreau blanc qui s’accrochait au bras de Brant Harcourt. Déçue, elle fit une grimace involontaire. Daniel, les yeux rivés sur Susanna, ne la vit pas.
— Première nouvelle ! s’exclama Daniel. J’ignorais que Brant avait une liaison avec Susanna.
— Moi aussi. En tout cas, elle aura deux raisons de se réjouir ce soir.
— Ah bon ? Pourquoi ?
— Elle a obtenu le divorce hier et elle tient dans ses bras l’homme de ses rêves. Que peut-elle demander de plus ?
— C’est vrai, elle est rayonnante.
Kelly n’avait jamais aimé Susanna Winters. Celle-ci travaillait également chez Harcourt et McConell. Toutes les deux avaient à peu près le même âge, mais elles n’avaient jamais sympathisé. Kelly lui reprochait son ambition froide et calculatrice. Susanna et Brant formaient bien le couple idéal, se dit Kelly tristement.
— Tu crois qu’ils nous ont vus ? demanda-t-elle en les regardant disparaître dans le hall illuminé.
— Sûrement ! Rien n’échappe à Brant.
Tant mieux ! Kelly ne se faisait malgré tout pas d’illusions : Brant ne lui ferait pas une scène de jalousie. Elle avait cependant très envie de lui faire regretter d’avoir invité Susanna Winters à sa place. En voyant en Daniel un rival, peut-être craindrait-il pour ses chères actions ?
— Allons retrouver les autres, Kelly.
Après avoir confié sa voiture au chasseur de l’hôtel, Daniel tendit le bras à Kelly. Ensemble, ils gravirent les marches du Majestic. Dans le hall, décoré avec faste, des visages familiers saluèrent le couple qui entrait. Les lustres de cristal, les tapis rouges, les miroirs encadrés de dorures, tout créait une atmosphère de fête et de luxe. Dans de grandes vasques, on avait mis des orangers et d’immenses guirlandes fleuries serpentaient sur les colonnes de marbre. Comme d’habitude, la société avait organisé la soirée sans compter : les salons du Majestic étaient les plus prisés de la ville. Dans le plus grand, un orchestre accueillait les invités.
A travers la foule, Kelly aperçut immédiatement Brant. Sûr de lui, plus séduisant que jamais, il tenait Susanna par la taille et riait avec sa compagne. Brant Harcourt était bien loin de se faire du souci à propos du testament de Jœ comme Kelly l’avait escompté ! Comment pouvait-il être aussi certain qu’elle lui donnerait son accord, alors qu’il s’affichait avec une autre, alors que Kelly elle-même avait un prétendant ? Apparemment, il ne doutait de rien ! Cette évidence agaça Kelly au plus haut point. Et à son irritation se mêlait du dépit : voir Brant enlacer la belle Susanna Winters était presque une torture. Si seulement elle avait le pouvoir de lui rendre tout le mal qu’il lui causait en ce moment ! Impossible... Cet homme était sans cœur, et Kelly le regardait, impuissante.


— Kelly, comme c’est gentil à toi d’être venue ! s’exclama Georges Wright en l’embrassant affectueusement. Tu es magnifique ! Si j’avais trente ans de moins, je tenterais de rivaliser avec Brant...
Coupant court, Kelly se hâta de l’interrompre.
— Bonsoir, Georges. Merci du compliment. En fait, je suis accompagnée par Daniel.
— Ah ! Très bien, dit-il, gêné.
Les paroles de Georges avaient embarrassé Kelly. Connaissait-il le contenu du testament ? S’il devenait public, Kelly en mourrait de honte. Pendant un instant, elle garda le silence, l’air contrarié. Par bonheur, Georges détruisit ses soupçons.
— Désolé d’avoir fait cette gaffe, Kelly. Jœ m’a tellement répété qu’il souhaitait un jour vous voir vous marier que j’ai tendance à croire que vous êtes ensemble. Que veux-tu, c’est l’âge !... Au fait, on a lu le testament il y a quelques jours, non ? Que penses-tu faire de tes actions ? Vas-tu diriger la société avec Brant ?
— J’hésite encore..., répondit-elle.
Il valait mieux rester dans le vague. Et puis, elle ne mentait pas en disant qu’elle n’avait pris aucune décision pour le moment. Georges ignorait tout du piège que lui avait tendu son grand-père. Et Kelly n’avait pas l’intention de le mettre au courant.
— Si tu as besoin de conseils sur ce sujet, tu peux me passer un coup de fil. Je suis à ta disposition. Mais si tu veux mon avis, tu devrais vendre. Tu es trop jeune pour être à la tête d’un tel empire. Brant te rachèterait tes actions au prix fort et la société serait admirablement gérée.
— Je n’en doute pas !
Kelly ne pouvait ajouter que le testament ne lui laissait pas le droit de revendre les actions de Jœ McConell. Une faible partie, tout au plus, lui reviendrait tandis que le reste serait partagé entre une multitude d’acheteurs. A moins que... Non, elle ne voulait pas penser à la dernière opportunité ! Au nom d’un marché sordide, s’offrir à un homme pour lequel on n’est que l’instrument de son ambition. Jamais de la vie !
Instinctivement, ses yeux cherchèrent Brant. Au milieu d’un groupe de jeunes femmes admiratives — de nouvelles secrétaires — il discutait avec une de ses collaboratrices. Comme on pouvait s’y attendre, toutes buvaient ses paroles. Kelly méprisait leur attitude qu’elle trouvait peu digne. En réalité, sans qu’elle s’en aperçoive, c’était la jalousie qui, de nouveau, pointait ses flèches vers elle.
— Pardonne-moi de t’avoir laissée aussi longtemps, lui dit Daniel qui rapportait des coupes de champagne. Alors, Georges, que penses-tu de la retraite ? As-tu des projets ? reprit-il à l’adresse de l’avocat.
— Oh ! oui. Je compte bien aller pêcher et puis, j’ai une dizaine de petits-enfants dont je vais m’occuper avec plaisir. J’aurai une retraite très active !
— J’espère que tout cela te laissera le temps de nous rendre visite.
La belle voix grave de Brant fit frémir Kelly. Délibérément, elle garda les yeux fixés sur Georges et ne se retourna pas pour saluer le cavalier de Susanna Winters.
— Non, Brant, je t’assure que je n’y manquerai pas. Vous allez tous me manquer, répondit le vieil homme avec nostalgie.
— Tu nous manqueras aussi, murmura Kelly.
— Lorsque vous aurez pris la tête de la société, Kelly, vous n’accorderez plus beaucoup de place aux sentiments, interrompit Susanna Winters, perfide.
— Qu’est-ce qui vous fait croire que je vais m’occuper de la société ? répliqua Kelly en tournant la tête.
La belle blonde était toujours au bras de Brant. Moulée dans un fourreau blanc terriblement sexy, elle s’appuyait contre lui avec abandon. Et n’en continua pas moins son attaque avec un sourire hypocrite.
— C’est évident ! Tout le monde sait que vous allez hériter des actions McConell. Ce doit être merveilleux de tout obtenir sur un plateau d’argent !
Par envie, par méchanceté, Susanna voulait à tout prix humilier Kelly devant ses amis et devant Brant. La jeune femme, consciente du piège, ne mordit pas à l’hameçon.
— Oui, en effet, ce doit être merveilleux. Malheureusement, je n’ai jamais eu l’occasion d’en bénéficier.
— Je n’en crois pas un mot ! s’exclama Susanna. Jœ n’a pas dû lésiner sur les moyens pour vous faire inscrire à Harvard et j’imagine que, pour vos vingt ans, il vous a offert une place dans la société !
— Ma pauvre Susanna, vous vous trompez complètement ! Pour entrer à Harvard, j’ai passé un concours et obtenu une bourse, voilà tout ! Et Jœ, puisque vous vous permettez de l’appeler par son prénom depuis quelques jours, ne souhaitait pas que je travaille avec lui. En réalité, il désirait que je m’en tienne à l’éducation d’une future mère de famille.
Brant semblait prendre plaisir à cet échange empoisonné. Furieuse, Kelly lui jeta un regard glacial. Bizarrement Brant l’affronta en souriant. Avec désinvolture, il promena ses yeux sur le décolleté avantageux de Kelly et sur les courbes à peine voilées de son corps.
— Voulez-vous danser, Kelly ?
Interdite, elle crut avoir mal entendu et le fixa sans mot dire. Brant prit son silence pour un acquiescement et l’entraîna vers la piste de danse. Comment refuser cette invitation ? Oui, comment refuser alors qu’au fond d’elle-même, elle mourait d’envie que Brant la prenne dans ses bras ? Avec joie, Kelly aperçut la mine déconfite de Susanna avant de prendre place parmi les danseurs. Un frisson délicieux la parcourut lorsque Brant lui enlaça la taille. Sur sa peau, Kelly sentait la pression de la main de Brant. A peine osait-elle lever les yeux vers lui. Non, Brant y lirait aisément tout son trouble. Alors, le visage abandonné contre la large poitrine, Kelly se laissait conduire au rythme d’une musique romantique. L’eau de toilette de Brant lui faisait tourner la tête et, sous le charme, elle se taisait.
Ah ! Si cet instant magique pouvait durer toujours !


— Vous avez très bien remis en place Susanna, fit-il remarquer.
— Brant, savez-vous que c’est la première fois que vous m’invitez à danser ? murmura-t-elle.
— C’est vrai ? J’ignorais que vous gardiez le souvenir de tels détails !
Cette remarque innocente la blessa. Kelly était ce soir d’une sensibilité à fleur de peau.
— Avez-vous réfléchi à ma proposition, Kelly ?
Elle secoua la tête, trop émue pour pouvoir parler.
— Alors, je vous demande d’y penser maintenant... Vous ai-je dit que je vous trouvais très désirable dans cette robe ?
Sa voix grave envoûtait Kelly pendant que, de la main, il lui caressait les hanches. Ce compliment inattendu déclencha en elle un flot d’émotions violentes et contradictoires. Il aurait été facile de se prêter à ce jeu de séduction. Mais, refusant de céder à l’attraction que Brant exerçait sur elle, Kelly se raidit. Elle se dégagea de son étreinte et fixa Brant avec colère. Ses beaux yeux verts lançaient des éclairs.
— Comment osez-vous me parler encore de ce mariage alors que votre petite amie se trouve à deux pas ? lança-t-elle d’une voix indignée. Etes-vous à ce point insensible ?
Sa véhémence n’avait pas chassé le sourire charmeur de Brant qui la regardait intensément.
— Susanna sait exactement à quoi s’en tenir avec moi. Je n’ai pas l’habitude de simuler des sentiments que je n’éprouve pas, ni de promettre ce que je ne compte pas tenir. Ça vous surprend peut-être, mais je joue toujours franc-jeu avec les femmes, et si cela leur donne l’impression que je suis froid ou insensible, comme vous dites, c’est leur problème.
— Très bien ! En ce qui me concerne, je préfère garder mes distances.
La gorge serrée, Kelly fit mine de détourner la tête. Brant l’en empêcha d’une main. Ses yeux ne purent échapper au regard captivant de Brant.
— Alors, c’est plutôt le genre de Daniel Marsden qui vous attire, reprit-il par provocation. Vous vous attendiez à ce que je vous fasse des serments, des déclarations d’amour passionné ? Vous rendez-vous compte qu’en ce qui concerne les femmes, Daniel manque totalement de sincérité ? Est-ce vraiment ce que vous désirez ? Est-ce ainsi que je devrais m’y prendre ?
— Je ne vous demande rien !
— Vous mentez ! dit-il dans un souffle en approchant les lèvres.
La surprise pétrifia Kelly : Brant allait l’embrasser devant tout le monde ! Sans s’occuper des spectateurs, il resserra son étreinte et s’empara avec fougue des lèvres de Kelly. Inutile de résister ! Elle n’en avait aucune envie d’ailleurs. Quelles sensations délicieuses l’envahirent alors... Sa colère contre lui s’était évanouie, elle avait oublié la présence de ses collègues. Plus rien ne comptait. Dans les bras puissants de Brant, elle s’abandonnait langoureusement. Brusquement Brant rompit le charme.
— Je ne m’étais pas trompé, Kelly, n’est-ce pas ? murmura-t-il. Dès le premier jour, j’ai su que je vous plaisais.
Kelly aurait tant voulu avoir la force de le contredire ! Hélas, les mots ne venaient pas. Kelly aurait voulu mentir, lui affirmer qu’il se trompait. Impossible ! Bouleversée, humiliée, elle préféra la fuite. Fendant la foule, elle quitta la salle de danse sans prêter attention aux regards étonnés de certains convives. Brant la suivit dans le grand couloir qui menait vers les ascenseurs.
— Kelly ! cria-t-il.
— Allez-vous-en, Brant ! Vous m’avez ridiculisée devant tout le monde. Etes-vous satisfait ?
— Depuis quand est-il ridicule d’être attiré par quelqu’un ?
— Depuis notre rencontre ! Je vous l’ai dit, je préfère garder mes distances. Je ne ferai pas partie de vos victimes, Brant !
— Non, certainement pas ma victime, Kelly, dit-il d’une voix caressante. Kelly, faisons une trêve...
— Oui, évidemment, vous avez tout à y gagner !
— Tous les deux, nous avons beaucoup à y gagner.
— Non, je n’ai pas l’intention de m’aliéner à un homme pour lequel l’argent compte plus que les sentiments. L’amour a pour moi une grande importance, Brant. Bien sûr, je ne m’attends pas à ce que vous le compreniez. Vous avez d’autres priorités !
— Bravo, quelle fougue ! Pardonnez-moi si j’ai du mal à vous croire. Jusqu’à présent, vous faisiez passer votre carrière avant les sentiments.
— C’est faux !
— Alors donnez-moi une chance de me rattraper. Que pensez-vous d’un dîner, demain soir ?
— Non, Brant ! Je vous ai dit que cela ne m’intéressait pas !
Avant qu’elle s’engouffre dans l’ascenseur, il la retint par le poignet.
— Pour l’amour du ciel, cessez vos simagrées, Kelly ! Je sais exactement ce que vous ressentez pour moi.
L’attirant brutalement à lui, Brant la fixa un instant de ses yeux sombres.
— Je vois clair dans votre jeu, Kelly : vous voulez faire la difficile ou jouer l’effarouchée. D’accord, si ça vous amuse. Mais mettez-vous bien en tête qu’à la fin, c’est moi qui gagnerai !
Cela dit, Brant la relâcha et tourna les talons. D’un pas déterminé, il retourna se joindre aux autres.
Le cœur battant, encore sous le choc de ses paroles, Kelly se sentit au bord du vertige. Qu’avait-il osé prétendre ? Quelle arrogance détestable ! Ah ! Oui, elle allait lui montrer combien elle se préoccupait de lui.
La tête haute, Kelly pénétra dans le salon noir de monde, prête à affronter Brant et ses incroyables prétentions. Pourtant, dès que ses yeux rencontrèrent ceux de Brant, la lueur de triomphe qu’elle y vit détruisit instantanément son courage. Kelly comprit à ce moment-là qu’elle avait réagi comme il l’avait prévu. Il l’avait provoquée à dessein pour qu’elle revienne à la réception. Avec consternation, Kelly dut reconnaître que Brant l’avait manipulée. Et elle eut le sombre pressentiment que cela ne faisait que commencer.



à suivre

 
 

 

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chapitre 4


— Voici encore des fleurs pour vous, Kelly !
Maggie entra dans le bureau, les bras chargés d’un gigantesque bouquet de roses blanches. Où allait-elle donc les mettre ? La pièce en était déjà remplie. Elle avisa un fauteuil encore vide et déposa délicatement le bouquet.
— On se croirait dans une roseraie ! dit-elle en riant.
Kelly ne riait pas du tout. Lorsque les premières fleurs étaient arrivées, ce matin à 9 heures la surprise avait été agréable. Mais ensuite, quand toutes les heures un nouveau bouquet avait été envoyé, la surprise avait laissé place à l’agacement. Dans tout l’immeuble, on chuchotait à propos des roses reçues par Kelly. Maggie n’avait pas dû se priver de dire qu’elles venaient de Brant ! Les bavardages iraient bon train. Et Daniel ? Qu’allait-il en penser ? Par chance, il n’avait pas vu le baiser de la veille. Dans le cas présent, il faudrait qu’il soit aveugle pour ignorer ces roses. Même s’il n’était pas question de jalousie entre eux, Daniel ne pourrait s’empêcher d’être étonné, très étonné...
Pendant que Kelly réfléchissait, Maggie cherchait un vase.
— Nous n’avons plus rien où les mettre. Voulez-vous que je demande à une des employées d’aller acheter...
— Non, non. Laissez-les où elles sont, ça ira très bien, coupa Kelly, l’air renfrogné.
— Bon. De toute façon, comme vous n’avez plus aucun rendez-vous aujourd’hui, il n’est pas gênant qu’elles restent sur ce fauteuil.
— Brant est-il de retour du tribunal ?
— Non, mais il ne devrait pas tarder. Dès qu’il arrive, je vous préviens, ajouta-t-elle en se dirigeant vers la porte. Ah ! J’aimerais bien que quelqu’un m’envoie des fleurs comme celles-là, c’est tellement romantique ! Surtout de la part de Brant Harcourt !
Kelly jeta un regard noir à sa secrétaire qui s’esquiva. Brant lui avait fait porter ces roses par calcul, tout simplement ! Kelly ne s’y méprenait pas. Il n’y avait là rien de romantique. A la pensée que tout le monde croirait que Brant et elle filaient le parfait amour, Kelly fut prise d’une colère froide. Elle eut toutes les peines du monde à se replonger dans le ******** qu’elle étudiait.
A peine cinq minutes plus tard, la sonnerie de l’Interphone retentit. En levant la tête, Kelly reconnut Susanna Winters dans le bureau de sa secrétaire.
— Kelly, Susanna Winters aimerait avoir un entretien. Peut-elle venir ?
En cet instant, Susanna était bien la dernière personne que Kelly désirait voir. Mais que pouvait-elle faire ?
— Oui, qu’elle entre.
Comme d’habitude Susanna était superbe. Ses cheveux blonds auréolaient son beau visage, maquillé avec art, une robe de soie soulignait sa mince silhouette : pour bien des hommes, elle devait incarner la beauté idéale.
— Que puis-je pour vous, Susanna ? demanda Kelly avec un sourire forcé.
D’un geste de la main, elle lui indiqua le fauteuil situé devant son bureau qu’encombrait le dernier bouquet. Avec un certain plaisir, Kelly regarda la jeune femme poser les roses par terre d’un air pincé. Mais son sourire disparut quand elle vit Susanna extraire une carte et la lire sans gêne aucune. Que contenait-elle ?
— Allez-vous accepter ? demanda Susanna.
— Accepter quoi ?
— L’invitation de Brant à dîner, répondit-elle avec impatience.
Ouf ! Brant n’avait pas parlé de mariage dans son message.
— Je ne sais pas encore, répliqua Kelly, désinvolte.
Evidemment, Brant n’avait rien écrit de personnel ! pensa-t-elle. Sa frayeur avait été stupide. Sa secrétaire avait dû tout organiser. Kelly se représentait la scène : Brant, assis à son bureau, écoutant sa secrétaire lui lire la correspondance du jour. Une fois ce travail achevé, au détour de la conversation, il lui disait : « Oh, faites donc envoyer un bouquet de roses blanches à Mlle McConell, disons... toutes les heures. Vous mettrez une invitation à dîner dans le dernier. »
Susanna, qui s’impatientait sur son siège, fit revenir Kelly à la réalité.
— Vous vouliez me voir pour une chose en particulier, Susanna ?
— Oui. Je veux savoir ce qui se passe exactement entre vous et Brant.
L’attaque directe mit Kelly mal à l’aise. Elle n’en laissa rien voir cependant.
— Cela ne vous regarde pas, Susanna.
— Eh bien, si, figurez-vous. Depuis deux mois, Brant et moi nous voyons assez régulièrement et j’estime avoir le droit de vous demander quelles sont vos intentions à son égard.
La voix suave de Susanna était calme. Seuls ses yeux bleus, parfois animés de sombres lueurs, trahissaient sa fureur.
— C’est plutôt à Brant que vous devriez poser la question, vous ne pensez pas ?
Malgré son ressentiment pour Susanna, Kelly ne pouvait s’empêcher d’éprouver de la pitié pour cette femme délaissée. Cela ne fit qu’accroître sa colère contre Brant. Il avait vraiment un cœur de pierre ! Il se comportait comme un mufle vis-à-vis de cette jeune femme. S’il prétendait réellement faire la cour à Kelly, la moindre des choses était de quitter Susanna Winters avec tact.
— C’est tout à fait inutile, reprit Susanna sur un ton méprisant. Je connais ses intentions : il veut les actions McConell, et, pour une raison que j’ignore, vous refusez de les lui vendre.
— Ah oui ? Merci de me l’apprendre, jeta Kelly.
Tout à coup, elle n’éprouvait plus aucune compassion pour sa rivale.
— Ne me prenez pas pour une idiote ! Il est évident que la seule chose qui attire Brant, ce sont vos actions ! Je comprends que vous essayiez de retenir son attention en lui refusant ce qu’il désire. Je trouve même cela pathétique. Enfin, Kelly, vous vous ridiculisez !

— Susanna, répondit Kelly, exaspérée. Auriez-vous l’amabilité de refermer la porte derrière vous en partant ?
Nonchalamment la jolie femme blonde se leva. Le parfum capiteux qu’elle portait dominait celui des roses et donnait mal à la tête. Au moment de sortir, Susanna se retourna pour donner le coup de grâce à Kelly.
— Rappelez-vous, Kelly : samedi soir, c’était moi la cavalière de Brant. Et surtout, c’est moi qu’il a choisie de ramener chez lui ensuite !
Et Susanna Winters disparut en claquant la porte, laissant Kelly en proie à la jalousie. Quelle vengeance ! Susanna devait en avoir gros sur le cœur mais pas question de lui pardonner cette scène ! Soudain l’Interphone sonna.
— Brant est rentré, Kelly, avertit Maggie.
Le moment des explications était venu. Prenant le bouquet que Susanna avait laissé par terre, Kelly se dirigea vers l’ascenseur, prête à dire à Brant Harcourt ce qu’elle pensait de lui.
— Kelly, quelle bonne surprise ! s’exclama Brant en la voyant entrer. Voulez-vous que nous allions ce soir chez Jack Daniels à moins que vous préfériez un autre restaurant ?
— Je n’ai pas l’intention de dîner avec vous ce soir ! Et excusez-moi si je ne vous remercie pas pour vos fleurs.
D’un geste théâtral, elle jeta le bouquet de roses sur son bureau, faisant voler quelques papiers. Un vague sourire sur les lèvres, Brant s’arrêta un instant à la contempler. Son tailleur crème lui allait à ravir et le rose à ses joues rehaussait l’éclat de son teint.
— Vous êtes encore plus belle quand vous êtes en colère, Kelly !
— Plus belle que qui ? Que Susanna Winters ?
— Ah ! Je vois.
— Non, vous ne voyez rien ! Je pensais avoir été claire samedi : ni vous ni le mariage ne m’intéressent. En m’envoyant ces fleurs, vous m’avez mise dans une situation très embarrassante.
— J’ignorais que faire porter des roses à une femme pouvait la mettre dans l’embarras. Dans mon esprit, c’était plutôt romantique.
De la fenêtre, où il se tenait debout, un verre de whisky à la main, Brant s’approcha de son bureau. La scène l’amusait beaucoup, cela se lisait dans son regard.
— J’avais cru deviner qu’une histoire d’amour ne vous déplairait pas et que vous aimeriez que je vous fasse la cour.
— Vous avez mal compris !
— Dommage, je m’étais fait à cette idée. Voilà longtemps que je n’avais pas eu à courtiser une femme pour la séduire et cela m’amusait. Et puis, j’étais prêt à réviser mon opinion sur vous, Kelly. J’avais cessé de ne voir en vous qu’une jeune femme d’affaires ambitieuse.
Comme l’autre jour, Brant essayait de la provoquer mais cette fois, sa tactique ne marcherait pas !
— Vous trouvez romantique d’envoyer des fleurs à une femme alors que votre petite amie travaille dans le même immeuble ?
— Et nous voilà revenus à Susanna Winters !
Levant son verre de cristal, il fit tourner le liquide ambré avant d’en boire une gorgée. Sa désinvolture irritait Kelly tout autant qu’elle la séduisait. L’élégance de ses gestes, le bon goût de ses vêtements, la beauté sculpturale de son visage hâlé, tout en lui charmait les femmes. Et Kelly ne faisait pas exception. Elle aurait voulu posséder la force de caractère suffisante pour y rester insensible. Mais à peine rencontrait-elle son regard qu’elle sentait sa détermination s’évanouir.
— Oui, je parle de Susanna Winters. A moins qu’il y en ait d’autres ?
— Non, non, répondit-il sans relever l’insolence. Kelly, ne vous tracassez pas à propos de Susanna. C’est vrai, il nous est arrivé de sortir quelquefois ensemble, mais nous en sommes restés là. Il n’y a rien de sérieux entre Susanna et moi. Elle le sait très bien, d’ailleurs !
— Et cela justifie tout ? Parce que vous jouez franc-jeu avec elle, cela vous autorise à vous conduire comme le dernier des mufles ? s’exclama-t-elle, furieuse. Vous avez prévenu Susanna que votre liaison n’irait pas bien loin, donc vous vous permettez de m’envoyer des roses après avoir passé la nuit avec elle ! Je prévois déjà ce que vous allez me répondre : que je suis bien naïve de me choquer pour si peu. Mais ça ne m’empêchera pas de vous dire que je trouve votre attitude scandaleuse ! Vous avertissez une femme que vous ne l’aimez pas et, dès lors, une fois que vous l’avez mise dans votre lit, cela vous laisse toute votre liberté !
Etonné par sa véhémence, Brant gardait tout son calme. Tranquillement, il but une dernière gorgée de whisky et reposa son verre.
— Selon vous, ma conduite serait plus acceptable si je mentais sur la nature de mes sentiments ? Bon, écoutez, oubliez Susanna Winters. Elle n’a rien à voir avec nous et vous n’avez aucune raison d’être jalouse.
— Je ne suis pas jalouse, s’écria Kelly, et il n’y a pas de « nous » ! Je vous l’ai déjà dit !
— Oui, oui, je sais... Venez, Kelly, approchez-vous ! Brant lui tendait la main et la couvait d’un regard indéfinissable. Médusée, Kelly resta immobile.
— Pourquoi ? demanda-t-elle d’une voix hésitante.
— Venez plus près, je vous le dirai. Que se passe-t-il, vous avez peur ?
Peur, non. Mais un étrange pressentiment l’avait envahie. La fascination que Brant exerçait sur elle en ce moment l’inquiétait. Kelly, d’un autre côté, ne voulait pas passer pour lâche. Elle fit un pas dans sa direction.
Aussitôt Brant lui saisit le poignet, sans essayer de la forcer à venir plus près. Dans un geste d’une infinie douceur, il effleura la peau satinée de sa main. Cette caresse inattendue mit Kelly au supplice
— Depuis notre première rencontre, j’ai su qu’il y avait entre nous une force inexplicable qui nous attirait l’un vers l’autre. Chaque fois que j’entends votre nom, chaque fois que je vous vois, cette force me rapproche de vous.
Délicatement, il porta la main de Kelly à ses lèvres.
— Je ne suis pas l’homme insensible que vous imaginez, Kelly. Vos reproches sur ma conduite envers les femmes étaient en partie fondés, je le reconnais. Quand je quitte une femme prévenue que notre liaison ne durera pas, je n’éprouve aucun remords. Mais, entre vous et moi, ce genre de choses ne se produira pas, je vous l’assure.
Un baiser furtif sur le poignet de Kelly mit le comble à l’émoi de la jeune femme. Enfin, Brant relâcha sa main. Silencieuse, Kelly tentait de recouvrer ses esprits. Les explications de Brant n’avaient pas calmé sa colère et ses manifestations de tendresse ne faisaient qu’ajouter à sa confusion. C’est seulement après quelques secondes qu’elle eut la force de parler.
— Vous me faites la cour uniquement pour obtenir vos précieuses actions ! Et dans ce but, vous accepteriez d’épouser une femme qui ne vous plaît même pas.
— Qui vous dit que vous ne me plaisez pas ?
Brant accompagna ses paroles d’un regard explicite qui s’attarda sur la jolie silhouette de Kelly. Un sentiment ambigu s’empara de la jeune femme : colère et joie se mêlaient. Si elle lui plaisait, pourquoi donc l’avait-il toujours traitée avec dédain ? Ah, que de malentendus auraient été évités ! Aussitôt des doutes l’assaillirent. Et si tout cela n’était qu’une ruse ? Oui, ce n’était rien d’autre qu’une ruse !
— Je ne vous comprends pas, murmura-t-elle. La compagnie McConell est une grosse affaire mais vous n’en avez pas vraiment besoin avec tout ce que vous possédez dans la ville. Pourquoi utiliser des moyens aussi retors pour récupérer la compagnie de mon grand-père ?
— Des moyens retors ? Non. Je veux cette société, Kelly. Et quand je désire quelque chose, je l’obtiens toujours. Je veux la compagnie McConell et je vous veux avec !
— Parce que je fais partie du marché ?
— D’une certaine façon, oui, répondit-il d’une voix amusée. Mais surtout parce que, comme je vous l’ai dit, vous me plaisez et...
— C’est incroyable ! Vous savez que nous ne sommes pas faits pour nous entendre. Et le peu que je connais de vous...
— Justement, afin de faire plus ample connaissance, que diriez-vous de venir dîner chez moi ce soir ?
— Non, pas question !
— Pourquoi ? Vous avez rendez-vous avec Daniel ?
— Non, je...
— Parfait, dit-il d’un ton sans réplique.
Sur son bureau, il prit l’Interphone et appela sa secrétaire.
— Betty, pouvez-vous passer prendre le manteau et le sac de Mlle McConell et les monter à mon bureau ?
— Brant, je vous ai dit que je ne voulais pas !
— S’il vous plaît, Kelly.
Ces mots, inespérés dans la bouche de Brant Harcourt, la réduisirent au silence. Un sourire charmeur la fit capituler.
— J’aimerais réellement passer la soirée avec vous. Je vous promets de me comporter comme un vrai gentleman.
Il suffisait à Brant de quelques mots bien choisis et d’un sourire pour vaincre sa résistance. Epouvantée par sa faiblesse, Kelly se demanda ce que l’avenir lui réservait. Il lui semblait que Brant serait toujours le maître du jeu.
*
* *
Alors que la Rolls blanche se garait devant la villa de Brant, Kelly s’étonnait encore de la facilité avec laquelle il avait su la persuader de passer la soirée chez lui. Il était trop tard pour reculer. En quittant les bureaux, le couple avait attiré bien des regards curieux ou jaloux. Evidemment, une soirée avec Brant Harcourt représentait le rêve de toutes les femmes de la compagnie ! Cependant, Kelly n’était pas très rassurée : elle devrait rester sur ses gardes.
— Je suppose que tout le monde au bureau est en train de jaser sur notre compte, fit-elle remarquer en descendant de la voiture. Ils vont s’imaginer que nous avons une liaison !
— Par ce « ils », vous entendez Daniel Marsden ? demanda-t-il froidement. Je ne crois pas que le sujet le préoccupera beaucoup. Il a lui-même de trop nombreuses liaisons pour se soucier de celles des autres.
Décidément Brant ne portait pas Daniel dans son cœur ! Cette remarque acerbe déplut à Kelly. Non pas que cela fût inexact — Brant avait parfaitement raison — mais parce qu’il lui semblait qu’au travers de Daniel, c’était elle que Brant visait. Voulait-il la désespérer pour qu’elle se jette dans ses bras consolateurs ?
— Brant, pour citer une expression que vous aimez, je sais exactement à quoi m’en tenir avec Daniel.
— Je l’espère pour vous.
— Pourquoi ? Vous êtes inquiet de voir un éventuel obstacle entre vous et les actions McConell ?
— Ce n’est tout à fait cela. Mais disons que si vous refusiez ma proposition à cause de Daniel, vous feriez une grave erreur. C’est le genre d’hommes à fuir les engagements, les responsabilités.
— Oui, vous en savez quelque chose ! Sur ce point vous vous ressemblez.
— Non, absolument pas. Les raisons pour lesquelles j’ai évité les liaisons sérieuses depuis la mort de ma femme n’ont rien à voir avec celles de Marsden.
Avant même que Kelly ait pu en savoir davantage, Brant s’était avancé pour lui montrer le chemin.
Quelle maison somptueuse ! A quelques occasions, Kelly était venue chez Brant, et chaque fois, elle avait admiré le goût avec lequel elle était décorée. Chaque pièce semblait avoir sa personnalité. Dans le salon, des tableaux de maître sur des murs tendus de soie, des meubles précieux achetés chez des antiquaires français, une vaste cheminée où brûlait un feu ardent, donnaient à cet endroit un caractère d’un autre temps. Kelly ne put s’y attarder : déjà Brant l’entraînait ailleurs. Ils entrèrent dans la cuisine. Une cuisine de rêve, grande et parfaitement équipée, où là encore un décorateur avait laissé sa griffe.

— Mme Wright est-elle là aujourd’hui ? demanda Kelly.
— Non, je lui laisse ses soirées de libre, sauf quand j’organise un dîner. Et puis je me passe très bien d’une cuisinière, vous savez ! J’aime beaucoup cuisiner moi-même, c’est très relaxant.
Ils étaient seuls, pensa Kelly avec appréhension. Elle rougit et son malaise n’échappa pas à Brant.
— Comme il est facile de vous faire rougir, Kelly ! J’adore voir votre teint prendre quelques couleurs... Quoi qu’il en soit, vous n’avez pas à vous inquiéter pour ce soir. Je n’ai pas l’intention de profiter de notre solitude.
Cela dit, il retira sa veste et tendit un tablier à Kelly.
— Vous voulez me tester, peut-être ? questionna-t-elle. Sur ce plan-là, vous ne me prendrez pas en défaut, Brant. La cuisine fait partie des choses que mon grand-père a exigé que j’apprenne très jeune. A ses yeux, les talents culinaires étaient la première qualité d’une femme accomplie. Vous savez, ses préjugés en matière d’éducation ne m’ont pas facilité l’existence !
— Je croyais que vous aviez été élevée dans du coton ?
— C’est ce que tout le monde s’imagine. Au contraire, mon grand-père a toujours été très dur... Dites-moi, Brant, vous ne semblez pas avoir très haute opinion de moi.
— Ne vous attendez pas à des compliments de ma part, mademoiselle McConell ! J’en suis très avare.
— Rassurez-vous, je ne recherche pas les compliments.
En nouant le tablier autour de sa taille, Kelly dissimula tant bien que mal sa déception. Pourquoi n’avait-il pas répondu franchement ? Kelly désirait tant savoir ce qu’il pensait d’elle !
— Que puis-je faire pour vous aider ? reprit-elle avec une bonne humeur feinte.
— Rien ! J’avais l’intention de vous impressionner en vous montrant que je suis capable de cuisiner sans aide. Mais si vous voulez participer, je vous propose de déboucher le vin.
A la grande surprise de Kelly, Brant se révéla un excellent cuisinier. Avec un art consommé, il prépara un délicieux dîner qu’il accompagna d’un bordeaux et de champagne. La soirée se passa comme dans un rêve. Détendu, Brant était un hôte charmant. La conversation roula sur des sujets divers, sans jamais aborder les problèmes qui les séparaient. Kelly ne sut dire si c’était Brant qui l’avait orientée ainsi. En tout cas, à la fin du dîner, elle commença à oublier qu’elle s’était juré de rester sur le qui-vive.
Un peu plus tard, dans le salon, savourant un cognac près de la cheminée, Kelly se mit à étudier Brant d’un autre œil. La lueur vacillante des flammes jouait sur son visage et soulignait sa beauté sculpturale. Ses cheveux prenaient des tons foncés. Une mèche rebelle descendait sur son front volontaire et lui donnait un air d’adolescent. Plus rien de l’homme insensible et glacial que Kelly croyait connaître ! Et ce soir, Brant lui plaisait infiniment.
— Alors, Kelly ? A quoi pensez-vous ?
Il avait surpris son regard. Kelly baissa les yeux et prit son verre de cognac qu’elle réchauffa dans sa main.
— Eh bien... je vous trouve très différent ce soir, avoua-t-elle.
— Différent ?
— D’habitude, vous êtes plus distant.
Ces mots le firent éclater de rire, d’un rire bon enfant. Jamais il ne lui avait paru aussi détendu en sa présence, et Kelly goûtait le bonheur de cet instant.
— Je suis distant, moi ? Je l’ignorais ! Avec votre aide, je vais pouvoir faire quelques progrès.
Ses yeux noirs s’attardèrent sur les siens. Ils semblaient briller d’un éclat singulier qui disparut bientôt.. Brant promena son regard sur le visage de Kelly, sur ses lèvres, puis il tourna la tête. Mal à l’aise, Kelly cherchait désespérément de quoi relancer la conversation.
— Je vous ai déjà dit que votre villa est admirablement décorée ?
— Oui, vous me l’avez déjà dit.
En regardant les bûches flamber dans la cheminée, Kelly recouvra son calme. Le silence était empli par les craquements et les sifflements du bois.
— Vous avez vraiment beaucoup de goût, Brant.
— En réalité, c’est Francesca qui a choisi la décoration.
A ces mots, sa voix s’était faite plus grave. Sans savoir pourquoi, Kelly sentit son cœur se serrer.
— Vous avez vécu ici avec votre femme ? Il me semblait que vous aviez acheté cette propriété après sa disparition.
— Non. Nous avons vécu trois ans ensemble et nous en avons passé deux ici. Francesca est morte peu de temps après notre troisième anniversaire de mariage, dans un accident de voiture.
A l’époque, tous les journaux en avaient parlé. Francesca Harcourt était célèbre, à Toronto. Non seulement parce qu’elle était un manequin international, mais aussi parce qu’elle venait d’une famille très connue au Canada.
— Je sais tout cela, Brant. Ce fut une terrible tragédie. Vous avez beaucoup souffert ?
La réponse ne vint pas immédiatement. La lumière intermittente des flammes révéla une expression de tristesse sur le visage de Brant. Emue, Kelly pensa à la douleur qu’il avait ressentie en perdant une femme si belle et si jeune. Elle aussi avait connu le drame de la mort d’êtres proches.
— Vous n’avez pas encore oublié cette disparition ?
— Dans la vie, il y a certaines choses qu’on n’oublie pas, Kelly, on apprend seulement à vivre avec.
En tendant la main, il alluma une lampe située à côté de lui. Aussitôt, la pièce inondée de lumière perdit son caractère intime. Le temps des confidences était terminé. Brant jeta un coup d’œil sur sa montre.
— Il est presque minuit. Il est temps que je vous ramène.


Dans la Rolls blanche, ils traversèrent la ville endormie. Chacun réfléchissait en silence. En regardant Brant, Kelly se dit que ses pensées étaient dirigées vers le passé, qu’il songeait encore à Francesca.
Enfin la voiture s’arrêta devant l’appartement de Kelly. Le moteur marchait encore quand Brant se tourna vers elle.
— Merci pour cette excellente soirée, lança-t-elle.
— Je suis heureux que cela vous ait fait plaisir. Peut-être accepterez-vous une autre invitation ?
Kelly fit semblant d’hésiter. Une autre soirée avec lui, oui, bien sûr !
— Il y a une bonne pièce de théâtre en ce moment au Centre O’Keefe. Mercredi, cela vous irait ?
— Oui, très bien.
Il sourit. Kelly essaya de se persuader qu’il était heureux de la revoir, qu’il appréciait sa compagnie, qu’il... Enfin que les actions McConell l’intéressaient bien moins que sa personne. Lorsqu’il se pencha vers elle, Kelly s’imagina qu’il allait l’embrasser. Non, il lui ouvrait simplement la portière.
— Bonsoir, dit-elle en lui renvoyant son sourire.
— Bonsoir, Kelly.
Un instant, leurs regards se croisèrent puis Kelly pivota sur son siège et sortit de la voiture. C’est seulement quand Kelly eut ouvert la porte de l’immeuble que la Rolls blanche s’éloigna dans la nuit. Derrière la porte vitrée, Kelly resta à la regarder disparaître. Et, pour la première fois, elle envisagea sérieusement la possibilité d’épouser Brant Harcourt.

 
 

 

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Chapitre5

Incapable de se concentrer sur ses dossiers, le regard perdu dans le vague, Kelly pensait à ces dernières semaines. Depuis quinze jours, les invitations de Brant s’étaient succédé à un rythme effréné. Déjeuners, dîners, sorties au théâtre, réceptions... Kelly s’était laissé emporter dans cette valse enivrante avec un plaisir infini.
Hier soir encore... Ce souvenir hantait sa mémoire. Ils s’étaient retrouvés dans le restaurant où Brant lui avait pour la première fois proposé le mariage. L’idée venait lui. Kelly en avait conclu que, dans ce même cadre, il désirait renouveler sa demande. Cette fois, elle savait ce qu’elle répondrait. Cette fois, ce serait oui. Sans illusion pourtant ! Kelly n’était pas naïve au point de croire Brant changé en quelques jours. Non, il n’était pas subitement tombé amoureux d’elle. Par contre, de son côté, Kelly avait découvert en lui un autre homme, beaucoup plus attachant que l’homme public qu’elle côtoyait au bureau. Brant s’était révélé un compagnon idéal : drôle, prévenant, charmeur. En outre, le plaisir visible qu’il prenait à passer ses moments libres avec elle lui semblait de très bon augure. Dans ces conditions, que demander de plus ?
Peu à peu, le passé de Brant perdait de son secret pour elle. Il parlait peu de Francesca mais Kelly avait compris que sa mort l’avait profondément bouleversé. Ses réactions cyniques à l’égard des femmes s’expliquaient beaucoup par les sequelles laissées par ce drame. Malgré elle, Kelly ne pouvait s’empêcher d’espérer qu’un jour, elle réussirait à chasser ce tragique souvenir et ferait oublier à Brant la belle Francesca Harcourt. Jusqu’à ce moment, Kelly était persuadée d’avoir assez d’amour pour deux. Dans cet état d’esprit, elle s’était rendue au luxueux restaurant et avait trouvé son compagnon qui l’attendait.
Le dîner avait été enchanteur. Après un exquis repas, la soirée s’était prolongée à la lueur des bougies, autour de quelques liqueurs. A voix basse, détendu et enjoué, Brant l’avait amusée avec des anecdotes glanées au cours de sa carrière d’avocat. Plus la soirée avançait, plus leur conversation prenait un tour personnel quand soudain Brant lui annonça qu’il avait un cadeau pour elle.
De sa veste noire, Brant sortit une longue boîte de velours violet sur laquelle s’inscrivait le nom d’un bijoutier illustre. Compte tenu de la taille de la boîte, ce ne pouvait être une bague de fiançailles. Mais l’émotion et la joie étaient plus fortes que la déception et Kelly prit le présent en tremblant. Même si la lumière du restaurant était tamisée, le collier d’émeraudes et de diamants brillait de tous ses feux. Le souffle coupé, Kelly né put murmurer que quelques mots :
— Oh ! Brant ! C’est magnifique ! Je ne sais que dire...
Levant la tête vers lui, elle rencontra ses yeux noirs. Brant la couvait d’un regard ardent.
— Eh bien, ne dites rien. L’expression de vos yeux parle pour vous.
Comme il lisait clairement en elle ! Kelly rougit de se savoir si transparente. Devant la perspicacité de Brant, elle était incapable de dissimulation, en ce moment moins que jamais. D’ailleurs, pourquoi masquer sa joie ? Son amour pour Brant, son désir de l’épouser étaient désormais une certitude pour elle : il n’était plus temps de tricher avec ses sentiments. Et puis peut-être que, grâce à cet aveu, Brant lui-même en viendrait à l’aimer ? Kelly allait ôter le collier de son coffret quand Brant l’arrêta.
— Je préfère vous le mettre moi-même, plus tard.
Qu’entendait-il par là ? L’expression de son visage garda tout son secret. Seul l’éclat de ses yeux en disait plus long que ses paroles. « Plus tard »... Comme pour cacher son trouble, Kelly referma la boîte de velours d’un coup sec.
Lorsque la voiture se gara sous son appartement, Kelly voulut inviter Brant à boire un dernier verre chez elle.
— Non, Kelly. Je regrette. Demain, j’ai une audience que je dois encore préparer ce soir.
Ce refus la surprit désagréablement. Avait-elle mal interprété ses paroles ? Déjà elle s’imaginait entre ses bras, déjà elle sentait son baiser brûlant sur ses lèvres... Et voilà qu’il voulait partir aussi vite qu’il était venu.
— Avant de vous quitter, je veux vous voir avec ce collier.
Les doigts de Brant lui frôlèrent la nuque. Délicatement il souleva quelques boucles blondes. La jeune femme, troublée par ces furtives caresses, se laissait faire. Brant ajusta le collier puis se recula pour contempler le bijou. Sous la faible lumière du clair de lune, les pierres précieuses jetaient des éclats diffus et s’accordaient à merveille avec les yeux verts de Kelly, brillants d’émotion.
Pendant quelques instants, Brant fixa Kelly d’un regard insondable. Son visage était dans l’ombre, et la jeune femme percevait mal l’expression de ses traits. Il semblait fasciné par ce qu’il voyait. Puis soudain, il murmura des paroles à voix très basse, et se rapprocha d’elle. Le sentant tout proche, Kelly ferma les yeux, dans l’attente enivrante d’un baiser. Enfin, les lèvres brûlantes de Brant vinrent se poser sur son cou. Un frisson délicieux la parcourut et elle plongea la main dans la chevelure brune, comme pour s’accrocher à lui et le retenir près d’elle.
Brant l’enlaçait par la taille, lui couvrait le cou de baisers. Sa main remonta jusqu’à la poitrine de Kelly. Un soupir de plaisir échappa des lèvres de la jeune femme. Enfin, la bouche de Brant vint s’emparer de ces lèvres offertes. Alanguie dans ses bras, Kelly fut emportée par un langoureux vertige. Brant avait éveillé en elle des sensations inconnues qu’elle découvrait avec ivresse. Emerveillée, elle était prête à aller avec lui jusqu’au bout du plaisir.
Lorsque Brant quitta ses lèvres, elle lui dit d’une voix qu’elle ne reconnut pas :
— Non, ne t’arrête pas !
Les yeux enflammés de désir, Brant la fixa un instant, puis déposa un baiser léger sur ses paupières et sur ses lèvres.
— Brant, je t’en prie !
Ce soir, Kelly était prête à tout et, à son regard, Brant comprit son invitation.
— Kelly, j’aimerais moi aussi que... Mais c’est encore trop tôt, ma chérie.
Kelly vacilla. Elle s’offrait à lui, encore frémissante de son étreinte et lui la repoussait avec indifférence. Etait-il blasé à ce point ? Des larmes d’humiliation emplirent ses yeux.
— Kelly ! Ne me regarde pas de cette façon. Allez, ma chérie, il est tard. Rentre chez toi, nous discuterons de tout cela demain.
Sans répondre, Kelly s’apprêtait à lui obéir quand il la retint par le bras et la serra contre lui.
— Kelly, bientôt, très bientôt, nous passerons une vraie nuit ensemble. Je te demande juste un peu de patience...
*
* *
Le lendemain, au bureau, elle ressassait toujours ces paroles. Kelly était partagée entre la colère et la honte de s’être ainsi offerte à un homme qui n’avait pas voulu d’elle. Mais bien d’autres émotions se mêlaient dans son cœur, et, malgré son ressentiment, son amour pour Brant restait le plus fort.
Soudain quelques coups sur la porte de son bureau interrompirent ses réflexions. Daniel Marsden entra, fringant et de bonne humeur.
— Bonjour, Kelly ! s’exclama-t-il, le sourire aux lèvres. Alors, on ne te voit plus ? Tout va bien ?
— Oui, ça va, merci.
— Allez, Kelly, je sais tout ! Toi et Brant, vous filez le parfait amour... Ne fais pas cette tête ! dit-il en riant.
Tant mieux, se dit Kelly. Daniel ne semblait pas ennuyé outre mesure par cette nouvelle. Quel soulagement !
— Disons que Brant et moi, nous nous voyons régulièrement ces derniers temps, confia-t-elle en rougissant.
— A vrai dire, je l’ai su dès la fameuse soirée de Georges. Quand je vous ai vus danser tous les deux, j’ai compris que je devais renoncer à ma cavalière, au moins pour un certain temps...
Que voulait-il insinuer par là ? Etait-ce une plaisanterie gratuite ou bien un avertissement que sa liaison avec Brant serait de courte durée ?
— Enfin je suis venu te voir car je voudrais discuter avec toi de choses et d’autres, reprit-il en devenant plus sérieux. Es-tu libre ce midi ?
— Oh, oh ! De quoi s’agit-il ?
— Si tu veux le savoir, tu devras déjeuner avec moi.
— Oui, mais...
Ces temps-ci, Kelly prenait tous ses déjeuners avec Brant. Impossible de se décommander !
— Kelly, je te rappelle que Brant est au tribunal aujourd’hui. C’est le procès Daubaussey...
— Dans ce cas, d’accord, j’accepte.
— 1 heure, ça te va ?
— Oui, je suis libre à 1 heure, mais vérifie quand même auprès de Maggie, tu veux bien ?
— Oui, à tout à l’heure !

Quelle bonne idée de sortir avec Daniel ! Le cœur léger, Kelly quitta le bureau en sa compagnie. Depuis plusieurs jours, la tension était trop forte. Sa vie privée influait de façon négative sur son travail et Kelly ne pouvait s’empêcher d’avoir des cas de conscience.
— Nous serons au coin de la rue, au Mint, expliqua Kelly à sa secrétaire.
Maggie répondit d’un regard désapprobateur.
— Qu’a donc Maggie aujourd’hui ? demanda Kelly devant l’ascenseur. Tu as vu le regard qu’elle m’a lancé ?
— Elle s’imagine peut-être que je suis le rival de notre beau patron. Nous aurions dû sortir séparément. Je n’aimerais pas provoquer la jalousie de Brant.
Brant, jaloux ? Non, jamais. « Surtout pas à cause de moi ! » pensa douloureusement Kelly.
Le Mint, café à la mode dans le quartier des affaires, était bondé, comme toujours pour le déjeuner. Il leur fallut attendre pour obtenir une table. Celle qu’on leur proposa enfin se trouvait en plein milieu de la salle, et ne permettait pas les discussions privées.
— Nous aurions dû aller ailleurs, fit remarquer Daniel en faisant la grimace.
— Non, ça ira. Et puis, nous n’avons pas le temps de changer d’endroit.
Prenant place, ils commandèrent un repas léger et commencèrent à discuter. Une fois les plats servis et le garçon parti, Daniel regarda attentivement son amie.
— L’amour te réussit, Kelly, tu es radieuse.
— Qui a parlé d’amour ?
— Inutile d’en parler ! Cela saute aux yeux. J’espère seulement que Brant se rend compte de la chance qu’il a ! Tu sais, Kelly, je regrette nos tête-à-tête ; je me suis toujours senti bien avec toi, dit-il en posant la main sur celle de Kelly. J’espère que nous resterons bons amis. Tu tiens beaucoup à Brant, je le vois, et j’en conclus que nous nous verrons plus rarement. Mais je veux que tu saches qu’en cas de problème, je serai toujours là pour t’aider.
Ce témoignage d’amitié toucha Kelly.
— Merci, Daniel, je sais que je peux compter sur toi en toutes circonstances.
Elle retira la main de celle de son ami, et eut la subite sensation d’être observée. En effet, Susanna Winters, assise un peu plus loin, ne la quittait pas du regard. La haine déformait son beau visage. D’un air méprisant, elle détourna les yeux vers l’homme avec lequel elle déjeunait.
— Bien, assez parlé sentiments ! s’exclama Daniel. En fait, je voulais te voir à propos d’un autre sujet. Voilà, j’ai entendu dire que tu vendais la maison de ton grand-père.
— Oui, c’est exact, répondit Kelly.
— Bien. Je suis très intéressé.
— Par cette grande et vieille demeure ? Tu m’étonnes ! Et ta garçonnière en ville ? Je te vois mal habiter cette grande maison. En plus, elle est assez loin du centre.
— Oui, je sais. Mais, tu comprends, à mon âge, il est temps que je m’installe vraiment... Et puis, j’ai l’intention de garder mon pied-à-terre près du bureau..
Bien sûr ! pensa Kelly tout bas. Il lui avait semblé étrange que Daniel envisage d’abandonner ses habitudes de célibataire noceur. En fouillant dans ses souvenirs, Kelly se rappela avoir une fois visité sa garçonnière. Quelle surprise ! Cet endroit était aménagé, meublé, décoré pour recevoir des femmes. A vrai dire, Kelly ne s’y était pas sentie très à l’aise. Elle n’y était restée qu’un instant, mais avait eu le temps d’apercevoir l’immense lit circulaire aux draps de satin qui occupait le milieu de la chambre. Pourquoi donc voulait-il acheter la villa de son grand-père, qui ne correspondait pas du tout à son genre de vie ? La maison était belle, spacieuse, avec une piscine et un immense jardin, mais Daniel, habitué à la vie citadine, y serait perdu, éloigné de ses amis.
— Je suis prêt à te faire dès maintenant une proposition pour cette propriété, Kelly.
— Ecoute, Daniel, le mieux serait que tu la visites encore une fois, et que tu prennes ta décision après avoir bien réfléchi.
— Oui, tu as raison. Quand es-tu disponible ? Ce soir ?
— Eh bien, je ne sais pas...
Brant avait probablement déjà prévu leur soirée. Embarrassée, Kelly ne savait que dire. Daniel avait bien compris la situation.
— Attends de voir Brant et tu me diras quand tu peux te libérer. D’accord ?
— Oui, très bien... Comment as-tu deviné pour ce soir ?
— Ce n’est pas très difficile. Tes émotions te trahissent, Kelly. Tu as l’air très amoureuse. Tout ce que je te souhaite, c’est d’être heureuse avec lui.
Le ton de sa voix n’était pas aussi rassurant que Kelly l’aurait espéré. Involontairement, Daniel avait ravivé les doutes et les angoisses de la jeune femme.

C’est avec un peu de retard que les deux amis regagnèrent le bureau. A son arrivée, Kelly aperçut Maggie qui levait la tête de son ordinateur. Son air contrarié inquiéta la jeune femme.
— M. Harcourt vous a demandée. Il désire que vous passiez le voir tout de suite.
— Très bien, murmura Kelly en reprenant la direction des ascenseurs.
Depuis quelque temps, elle avait pris l’habitude de monter retrouver Brant dans son somptueux bureau, à la fin de la journée. Ils discutaient ensemble des différentes affaires du jour autour d’un whisky. Kelly appréciait ces moments. Aujourd’hui, curieusement, une certaine appréhension s’était emparée d’elle et lorsque l’ascenseur s’arrêta à l’étage supérieur, elle ne put calmer sa nervosité.
Dans le couloir, elle croisa Susanna Winters qui sortait du bureau de Brant. Celle-ci lui lança un regard froid et méprisant en la saluant d’un signe de tête. Kelly se *******a de la saluer et redressa la tête. Autant l’ignorer !
— Vous pouvez entrer, mademoiselle McConell, lui annonça la secrétaire de Brant.
— Merci.
Assis à son bureau, plongé dans l’étude de ********s volumineux, Brant était en plein travail. Les fois précédentes, dès que Kelly entrait, il quittait son occupation, se levait et venait l’embrasser. Aujourd’hui, c’est à peine s’il lui jeta un coup d’œil.
— Prenez place. Je suis à vous dans un instant, murmura-t-il d’une voix absente.
De son fauteuil, Kelly observa l’homme qui se trouvait en face d’elle. Etait-ce bien celui qui, hier soir encore, la prenait dans ses bras et lui donnait un baiser passionné ? Etait-ce celui à qui elle avait eu l’audace de proposer... ? Cette pensée accrut son malaise. Les joues en feu, elle baissa les yeux.
Soudain Brant leva la tête. L’air indifférent, il promena son regard sur la mince silhouette vêtue d’un élégant tailleur, puis sur le visage de Kelly. Ses yeux froids ne trahissaient aucune émotion. Kelly, au contraire, se sentait gagnée par la panique.
— Avez-vous remporté le procès Daubaussey ? questionna-t-elle pour dissimuler son embarras.
— Oui, je l’ai gagné. J’ai fait en sorte qu’il s’achève plus tôt que prévu pour que nous puissions déjeuner ensemble.
— Oh ! Je suis désolée. J’étais sortie avec Daniel...
— Je le sais, répliqua-t-il sèchement.
Brant était-il jaloux ? Le ton de sa voix lui donna cette impression. Aussi, malgré la colère de Brant, Kelly retrouva un peu d’espoir.
— Il voulait juste discuter de...
— Je ne veux pas connaître le sujet de vos discussions. Cela ne me regarde pas, Kelly. Par contre, ce qui me regarde, c’est que vous soyez en retard de... de trois quarts d’heures.
Kelly n’en croyait pas ses oreilles : il l’avait convoquée pour lui reprocher son retard ! Elle était prête à s’excuser quand il poursuivit :
— Ce n’est pas tout, Kelly. Vous n’avez pas beaucoup avancé dans l’étude du cas Fitzroy. Vous savez que ce dossier doit être bouclé pour la fin de la semaine. Alors, comment se fait-il que vous perdiez votre temps ? Que se passe-t-il ?
Un court instant, Kelly affronta son regard. Ce visage dur, aux traits volontaires, cette bouche hautaine et passionnée... « Tu occupes mon esprit sans cesse. Ton image me hante sans répit et tu bouleverses mon existence. C’est toi la cause de tout cela. » Ces mots lui brûlaient les lèvres mais elle préféra le silence. Seuls ses yeux verts brillaient d’un éclat éloquent.
— Je suis désolée, Brant, répondit-elle avec dignité. Ces derniers temps, vous n’étiez pas si strict sur les horaires. Quoi qu’il en soit, je peux vous assurer que cela ne se reproduira pas.
En faisant allusion aux quelques déjeuners pris avec lui et qui avaient duré un peu trop longtemps, Kelly espérait le faire réagir. En vain.
— En ce qui concerne le cas Fitzroy, il sera terminé à temps, ne vous inquiétez pas.
— Heureux de l’entendre. J’ai déjà eu l’occasion de vous dire que vous ne deviez pas attendre de moi des privilèges d’aucune sorte. Cela n’a pas changé. Et si votre travail cesse d’être efficace, vous aurez à en subir les conséquences.
— Je n’ai jamais demandé aucun privilège, ni par le passé ni aujourd’hui, répondit-elle avec dédain. Désiriez-vous me parler d’autre chose ?
Kelly allait partir, car son courage était sur le point de lui manquer.
— Oui.
Ouvrant un tiroir de son bureau, Brant sortit un écrin de velours gris.
— C’est pour vous, Kelly.
A la vue de cet écrin, Kelly sentit son cœur battre à se rompre. Brant souleva le couvercle et une bague magnifique étincela de tous ses feux. Diamants et émeraudes, comme pour le collier de la veille. Cette fois, c’était bien une bague de fiançailles.
— Elle est superbe, Brant ! s’exclama-t-elle d’une voix tremblante.
Imperturbable, Brant quitta sa chaise et s’approcha d’elle. Que cet homme était séduisant ! Son costume sombre tombait parfaitement et mettait en valeur sa carrure d’athlète. Sans douceur, il lui prit la main gauche et fit glisser la bague à son doigt. Elle allait parfaitement. C’était la plus impressionnante bague de fiançailles que Kelly ait jamais vue. Ses yeux s’embrumèrent à la pensée que Brant lui offrait ce présent à un moment où il semblait la haïr. Pourquoi maintenant, en pleine dispute ? Hier, tout allait si bien. Il aurait pu profiter de ces merveilleux instants pour la lui donner. Et ils auraient scellé leur promesse de mariage par de tendres baisers...
— Je veux votre réponse, Kelly. Je veux votre réponse maintenant !
Cet ultimatum la fit frémir. Elle hésitait. Une partie d’elle-même aurait voulu refuser avec éclat devant tant de mépris et tant de froideur. Mais elle aimait Brant et voulait être sa femme. Si elle refusait cette dernière proposition, il n’y aurait plus d’espoir. Brant Harcourt ne risquerait pas un troisième échec.
Fixant le visage impassible de Brant, Kelly s’entendit répondre quelque chose qui la surprit elle-même :
— Si vous faites de moi votre partenaire dans la société McConell, c’est oui.
Les yeux froids de Brant se troublèrent un court instant. Surprise ? Regret ? Impossible à dire.
— Derrière la femme sensible se cache une redoutable adversaire ! fit-il remarquer avec une certaine amertume.
Mieux valait ne pas répondre à cela. Oui, il était préférable que Brant ignore le pouvoir qu’il détenait sur elle. Qu’il voie en elle une ambitieuse, tant pis ! Du moment qu’il ne la prenait pas pour une midinette. A présent, Kelly avait appris à jouer à ce jeu de dissimulation, comme pour se protéger du charme dévastateur de Brant.
— Et puis, je voudrais intervenir dans des procès, aller plaider quelquefois, poursuivit-elle. J’en ai assez de constituer des dossiers. J’aimerais faire quelque chose de plus stimulant.
— Vous avez changé, Kelly ! Oui, vraiment... Quand je vous ai proposé le mariage, il y a quelques semaines, vous vous êtes scandalisée des termes du contrat. Et voilà qu’aujourd’hui, vous les dictez vous-même !
— Je ne fais que suivre, vos conseils ! Vous aviez dit qu’il ne fallait pas envisager le mariage avec sentimentalisme. Selon vous, j’étais une femme de tête qui devait avoir un regard réaliste sur le mariage.
— Vous ne cesserez jamais de me surprendre, Kelly...
— Tant mieux. Mais pour en revenir à mes demandes, il n’y a rien qui doive vous étonner. Il n’y a pas que les hommes qui sachent diriger les affaires d’une entreprise. En ce qui me concerne, ne croyez pas que, si je vous épouse, je renoncerai à ma carrière. Pour moi aussi le mariage doit représenter une bonne affaire.
Que venait-elle de dire ? Kelly n’en pensait pas un mot. Une bonne affaire ? Non, vraiment cela lui était égal ! Vivre avec Brant, voilà l’important. Emportée par son élan, elle avait été trop loin.
— Vous n’êtes pas encore prête pour plaider au tribunal, vous manquez d’expérience, Kelly. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous ne vous avons pas accordé l’emploi de Daniel Marsden. L’avis de Jœ était que...
— Je sais quel était l’avis de mon grand-père sur ma carrière ! D’après lui, je devais me marier, avoir des enfants, de préférence des garçons. Ma place se trouvait dans une maison et surtout pas dans un tribunal. Alors si vous avez l’intention de reprendre ce refrain...
— Non, je n’en ai absolument pas l’intention. Vous devez poursuivre votre carrière, là-dessus, nous sommes d’accord. D’ailleurs je ne crois pas que l’idéal domestique de Jœ conviendrait à notre mariage.
Qu’entendait-il par là ? Avec anxiété, Kelly se demanda si Brant essayait de lui dire à mots couverts qu’il ne voulait pas d’enfants.
— Quel type de mariage imaginez-vous pour nous ?
— Un mariage heureux, j’espère ! Ne vous inquiétez pas, Kelly, vos projets professionnels ne seront pas contrariés par un mari tyrannique. Notre mariage sera moderne. Chacun fera ce qu’il a envie de faire, en toute liberté. Cela vous convient ?
Non, cela ne lui convenait pas du tout ! Si Brant ne voulait pas d’enfants, elle pourrait à la limite le supporter. Mais accepter qu’il ait des liaisons avec d’autres femmes, jamais ! Cette seule pensée était douloureuse. Dans ce cas, Kelly préférait renoncer au mariage.
— Par mariage moderne, vous voulez dire le droit à l’infidélité ?
Le regard franc et direct de Brant vint chasser ses doutes.
— Non, pour autant que nous vivions comme mari et femme, je peux vous assurer qu’il n’y aura pas d’infidélités de ma part. Vous envisagez bien de faire chambre commune, n’est-ce pas ?
— Eh bien, je... oui.
— Bien.
Soulagée, Kelly en oublia presque la froideur de Brant. Le mariage avec lui était possible, c’était tout ce qui importait.
— Pour ce qui est de votre demande de participer à la direction du cabinet, je regrette, Kelly. Après tout, la raison pour laquelle je vous épouse est d’avoir le contrôle total de la société Harcourt et McConell !
Le répit avait été de courte durée. Comment pouvait-il manquer de sensibilité à ce point ? Oh ! Elle connaissait bien ses raisons pour vouloir ce mariage ! Il n’avait pas besoin de les lui rappeler. Au contraire, Kelly aurait voulu les oublier, imaginer un mariage d’amour. Et Brant détruisait tous ses espoirs. Comment croire désormais qu’un jour il l’aimerait, qu’un jour il oublierait la belle Francesca ?
— C’est moi qui m’occuperai de la direction du cabinet, Kelly. Ce sont les termes du contrat. De votre côté, vous obtiendrez de solides avantages financiers.
Kelly baissa les yeux. Il était trop difficile d’affronter l’insensibilité glacée de Brant. Surtout en ce moment où l’émotion la bouleversait. Pour Brant, la carrière professionnelle passait avant tout. Kelly n’avait pas encore de place dans sa vie. Peut-être plus tard apprendrait-il à l’apprécier et à l’aimer. Mais ce moment était loin !
— Très bien, mais je veux obtenir de nouvelles responsabilités. Admettez-moi au rang d’associée, reprit-elle avec détermination.
Un silence accueillit sa requête et, pendant un instant, la panique s’empara d’elle. Et si Brant refusait ?
— Brant, vous savez que j’aime mon travail et que je suis compétente. J’ai besoin qu’on me donne l’occasion de faire mes preuves à un autre niveau.
— D’accord.
— D’accord pour quoi ?
— Vous ferez partie des associés. C’est vrai que vous faites un bon travail et, d’ailleurs, il était question d’une promotion prochaine à votre sujet.
Un sourire radieux illumina le visage de Kelly. Cette victoire signifiait beaucoup pour elle. Et puis les compliments de Brant sur son efficacité étaient très précieux car jamais il ne les accordait à la légère.
— Est-ce que le vingt et un vous irait ? demanda-t-il.
— Pardon ?
— Pour notre mariage. Je pense que d’ici là, les formalités seront réglées et nous serons dans les temps, avant la date fixée par Jœ.
— Ah ! Le 21, oui, ça me convient. Mais il faut que je vérifie sur mon emploi du temps.
Comme ses paroles contrastaient avec son état d’esprit ! Brant avait raison : en quelques semaines elle avait bien changé.
— Parfait ! reprit-elle, feignant l’indifférence. A présent, si vous voulez bien m’excuser... je dois retourner à mon travail.
Brant se *******a d’acquiescer. Aucun baiser ne vint sceller leur promesse de mariage. Dissimulant sa tristesse, Kelly quitta le bureau sans se retourner. Après avoir fermé la porte, Kelly se mit à contempler son impressionnante bague de diamants et d’émeraudes. Quelle merveille ! Soudain il lui vint à l’esprit qu’elle n’avait même pas remercié Brant pour ce prodigieux cadeau. Trop tard ! Et puis, pour lui, cela faisait partie du contrat. A ses yeux, des remerciements auraient été superflus.
Tristement, Kelly s’engouffra dans l’ascenseur. Son espoir de conquérir un jour l’amour de Brant n’était malgré tout pas mort. Pour l’instant, elle devait gagner son respect et elle se trouvait sur la bonne voie.

 
 

 

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chapitre 6


Face à son miroir, Kelly se regardait d’un œil critique. Sa robe de taffetas couleur champagne touchait le sol. Un grand couturier l’avait conçue d’après ses propres indications. Lorsque, dans la boutique, Kelly l’avait essayée pour la première fois, elle avait été éblouie. A présent, ce qui la préoccupait, c’était l’avis de Brant. A coup sûr, la robe ne lui plairait pas. Taffetas et dentelles... Une robe romantique... Exactement ce que Brant détestait ! De toute façon, ces réflexions venaient trop tard. Dans un peu plus d’une demi-heure, elle serait Mme Brant Harcourt.
En s’approchant du miroir, Kelly vérifia son maquillage. Une maquilleuse professionnelle s’en était chargée, car, trop nerveuse, Kelly ne pouvait tenir un pinceau d’eyeliner sans trembler. Le résultat était superbe. Sans être trop insistant, le maquillage lui donnait une mine éclatante, soulignait son regard et surtout, dissimulait sa fatigue après une nuit blanche. Ses cheveux bouclés entouraient son visage d’une auréole de blondeur, lui donnant un air angélique.
Agacée, Kelly se détourna de son image dans la glace. Voilà ce qui n’allait pas ! Ce genre de beauté laissait Brant absolument insensible, lui qui aimait les femmes du genre de Susanna Winters. Kelly avait l’air trop innocente, trop romantique pour lui plaire. Dès qu’il la verrait, il la trouverait ridicule.
Au-dehors, le ciel était bleu. Pas un nuage pour cette belle journée d’automne. Les feuilles des arbres prenaient les teintes rousses et dorées qui précèdent leur chute. La beauté de cette scène ne parvint pas à chasser les angoisses de Kelly. Une chose surtout la tourmentait : qu’allait-il se passer, ce soir, quand Brant découvrirait qu’elle était aussi innocente qu’elle en avait l’air ? Kelly était incapable de calmer son appréhension. Peut-être parviendrait-elle à dissimuler son inexpérience ? Non, Brant ne tomberait pas dans le piège. Comment allait-il réagir ? Cette pensée lui donnait envie de pleurer.
La sonnerie de la porte brisa le silence de l’appartement. Sans doute s’agissait-il du chauffeur. Un coup d’œil à sa montre lui indiqua qu’il avait un quart d’heure d’avance. Elle n’était pas prête. Que faire ? Kelly descendit précipitamment l’escalier et alla ouvrir la porte.
Un chauffeur en uniforme gris se tenait sur le seuil. Derrière lui, on apercevait une luxueuse Rolls Royce de couleur crème.
— Je ne suis pas prête, déclara Kelly. J’ai encore besoin de dix minutes.
— Ne vous inquiétez pas, mademoiselle McConell, prenez votre temps. Je voulais simplement vous prévenir que j’étais là.
Sur ces mots, il retourna prendre place dans sa voiture.
En réalité, Kelly était prête depuis une heure. Mais son émotion était si forte qu’elle ne pouvait se résoudre à partir dès maintenant. Désœuvrée, elle erra dans les pièces vides. Comme il était logique, Kelly s’apprêtait à emménager chez Brant et l’appartement avait été entièrement vidé. « Vous pouvez mettre votre appartement en vente », lui avait suggéré son futur mari. Trop occupée, Kelly ne l’avait pas encore fait.
Montée dans son ancienne chambre, elle jeta un dernier coup d’œil par la fenêtre, sur le parc qu’elle aimait tant, puis s’assit sur son lit, le seul mobilier resté sur place. Son réveil indiquait 12 h 50. Dans une demi-heure, elle serait mariée.
Par terre traînait un magazine féminin, acheté une semaine auparavant. Un article avait été consacré au mariage de Brant Harcourt. Kelly le ramassa et il s’ouvrit immédiatement sur ces quelques pages, lues et relues.
A plusieurs reprises, un journaliste avait téléphoné pour l’interviewer. Elle avait refusé. Les journalistes racontaient toujours les mêmes histoires et cela ne l’intéressait pas. Remplir des lignes pour raconter comment l’avocat le plus brillant de la ville était tombé amoureux de Kelly McConell, petite-fille du célèbre homme d’affaires Jœ McConell, c’était absurde. De plus, ce scénario sonnait faux et l’agaçait prodigieusement. Aussi son refus avait-il été un peu brutal.
En guise de vengeance, le journaliste avait choisi d’orienter son article d’une tout autre façon. Il insistait surtout sur le précédent mariage de Brant. Evidemment dans le but de mettre Kelly à son désavantage. Une photo, prise sans son accord alors qu’elle quittait les bureaux de la société, figurait dans l’article. Pâle, l’air fatigué, avec un triste tailleur gris, elle contrastait avec la resplendissante Francesca, photographiée dans les bras de Brant, sur une plage des Bahamas. Tous deux avaient l’air tellement heureux ! Cette photographie rappela cruellement à Kelly la froideur de Brant à son égard. Depuis le jour où, après leur dispute, ils avaient fixé la date du mariage, Brant s’en était tenu à la plus stricte politesse avec elle, rien de plus. Comme s’il était parvenu à son but et qu’il n’avait plus à jouer la comédie de la passion...
Francesca était d’une beauté à couper le souffle. Son sourire la rendait radieuse. Sous la photo, le journaliste avait écrit : « Le grand amour de sa vie », alors que l’article consacré à Kelly s’intitulait froidement : « La nouvelle Mme Harcourt ». Et pour couronner le tout, le journaliste rapportait les propos d’une personne restée anonyme qui révélait : « Ce mariage est une excellente affaire pour la société Harcourt et McConell. »
Qui pouvait avoir dit cela ? Un ou une des employés, sans doute. Quelle perfidie ! Chaque fois qu’elle lisait cette phrase, Kelly avait l’impression de recevoir un coup de poignard.
Kelly ferma le magazine avec impatience. Ce n’était pas le moment de penser à cet article démoralisant. En fait, si elle avait été sûre de l’amour de Brant, ces pages insignifiantes l’auraient laissée indifférente, mais là était le problème...
De nouveau, la sonnerie de la porte retentit. Il était temps de partir. En épousant Brant, faisait-elle le bon choix ? La question avait hanté son esprit toute la nuit durant, ajoutant à son désarroi. Trop tard pour reculer... Kelly prit sa veste de fourrure blanche et descendit l’escalier.
Dans l’entrée, elle s’arrêta. Il y aurait foule à l’église, ses amis, les amis de Brant, des curieux, des journalistes. Jamais elle ne pourrait affronter tout ce monde. La cérémonie lui semblait soudain une mascarade. Sans l’amour de Brant, plus rien n’avait de sens ! Mieux valait ne pas y aller.
Une troisième fois, la sonnerie se fit entendre. Elle alla ouvrir, dans l’intention d’annoncer au chauffeur sa décision de ne pas se rendre à l’église.
A sa grande surprise, ce n’était pas le chauffeur qui se tenait sur le seuil, mais un jeune livreur en uniforme qui tenait à la main une rose du plus beau rouge.
— Mademoiselle McConell ?
Sur son signe de tête, il lui tendit la fleur et partit.
Un grand bonheur envahit Kelly. Même si le livreur ne lui avait remis aucune carte, le message était clair : la rose rouge était le symbole de la passion. Avec une délicatesse inattendue, Brant lui déclarait son amour avant de la conduire devant l’autel.
— Mademoiselle McConell, si nous ne partons pas tout de suite, vous serez en retard, déclara le chauffeur qui était revenu la chercher.
— Oui, très bien, répondit-elle, les yeux fixés sur les pétales à peine ouverts. Allons-y.
Sur le parterre de l’église, une foule l’attendait. Lorsque l’on aperçut la voiture de la future mariée, toutes les têtes se retournèrent. Un murmure d’admiration l’accueillit quand Kelly descendit de la Rolls Royce, vêtue de sa somptueuse robe. Les photographes s’en donnèrent à cœur joie. Indifférente à la cohue, Kelly n’avait d’yeux que pour Brant.
Vêtu d’un costume gris perle, un œillet à la boutonnière, des gants blancs à la main, Brant était superbe. Quittant ses amis, il s’avança vers elle en souriant.
— J’ai cru que vous aviez changé d’avis, lança-t-il.
Prenant un peu de recul, il contempla la jeune femme dont les yeux pétillaient de bonheur. Brant s’émerveillait de la splendeur de la robe de taffetas et de la beauté de sa future femme.
— Vous m’avez fait attendre, Kelly, mais je dois avouer que le spectacle en valait la peine !
La douceur de sa voix la surprit agréablement. Rayonnante, elle lui tendit la main et ensemble ils entrèrent dans l’église où leurs deux vies allaient être liées à jamais.
Ensuite, tout se passa comme dans un rêve. En quelques instants Kelly McConell était devenue Mme Brant Harcourt. A la sortie de l’église, éblouie par l’étincelant soleil automnal et par les éclairs des appareils photo, Kelly serra le bras de Brant. Le couple fut entouré par leurs amis qui voulaient les féliciter. Parmi la foule, la mère de Brant se dirigea vers eux pour les embrasser affectueusement. Elle avait les larmes aux yeux. D’instinct, Kelly se sentit attirée vers cette femme qu’elle ne connaissait pas encore.
Entourant Kelly de son bras, Brant s’adressa à tous les invités.
— Nous vous donnons rendez-vous à l’hôtel Chequers Hall pour la réception.
— Brant, vous n’avez pas encore embrassé la mariée ! s’exclama quelqu’un.
Aussitôt, prenant Kelly par surprise, Brant répara cet oubli. Il se pencha vers elle et Kelly crut lire dans ses yeux une indéfinissable expression de tristesse. Mais le baiser langoureux qu’ils échangèrent chassa ce qui n’avait peut-être été qu’une illusion. Des applaudissements accueillirent ce baiser. Brant, souriant, entraîna Kelly vers la voiture qui devait prendre la route de l’hôtel.
— Il est temps de partir au Chequers Hall, mes amis ! Sinon vous allez nous faire rater l’avion de ce soir...
— Nous prenons l’avion ce soir ? Où allons-nous ?
— Tu le sauras plus tard. Le lieu de notre lune de miel est précieusement gardé secret pour éviter que l’on soit dérangés. D’ailleurs, ce matin, j’ai réglé tous les détails de l’affaire Shaunessey pour la semaine prochaine. Comme ça, au bureau, ils pourront se débrouiller seuls et nous laisser savourer ces quelques moments ensemble...

Le Chequers Hall était un vieil hôtel, au charme suranné, situé sur les bords du lac Ontario. Son calme et son luxe de bon aloi en faisaient le lieu idéal pour une telle réception. Dans le plus grand salon du premier étage, un somptueux buffet avait été dressé.
Lorsque Brant et Kelly entrèrent, de nombreux invités étaient déjà arrivés. Un majordome vint leur apporter des coupes de champagne et ils se mêlèrent à la foule. Puis Brant fut réclamé par certains de ses associés qui discutaient d’un scandale financier récent et souhaitaient l’avis de Brant.
Kelly s’éloigna. Helen Harcourt, profitant de ce que sa belle-fille était seule, vint lui tenir compagnie.
— Ah ! Kelly, je suis heureuse de pouvoir enfin discuter avec vous. Quelle ravissante belle-fille Brant vient de me donner !
— Merci, répondit Kelly, intimidée.
Helen Harcourt était d’une élégance parfaite. Vêtue d’un tailleur Chanel blanc et noir, elle parlait avec un accent anglais d’une grande distinction.
— Mon fils est très discret en matière de sentiment ! Savez-vous qu’il ne m’avait même pas dit qu’il souhaitait se remarier ? Vous imaginez ma surprise quand il m’a téléphoné, il y a quelques jours, pour m’annoncer votre mariage ! D’ailleurs, c’était la même chose la première fois, un véritable coup de foudre
Cette découverte chagrina Kelly. Helen, perspicace, s’en aperçut et voulut réparer sa maladresse.
— Pardonnez-moi, Kelly. J’ai manqué de tact en évoquant ce passé...
— Non, non, ce n’est rien, reprit Kelly, un peu émue.
— Vous êtes quelqu’un de très sensible, je le vois bien. Je ne pouvais souhaiter plus charmante belle-fille. Et Brant vous adore. Je l’ai observé lorsqu’il vous a vue arriver en voiture. Votre retard l’avait inquiété et, dès qu’il vous a aperçue, son visage s’est illuminé de bonheur. Cela faisait plaisir à voir.
Ce qu’Helen lui apprenait mit les larmes aux yeux de Kelly. Brant, heureux de leur mariage ? Elle n’avait jamais osé l’espérer.
— Vous êtes vraiment la personne dont Brant avait besoin, Kelly, continua Helen d’une voix douce.
« Il a besoin de moi ? » se demanda Kelly avec incrédulité. Elle maîtrisait à peine son émotion et ses larmes menaçaient de couler sur ses joues.
— Vous avez fait connaissance, à ce que je vois, s’exclama Brant, qui venait rejoindre les deux femmes.
S’il remarqua les yeux brillants de Kelly, il ne fit aucune réflexion à ce sujet. Brant les prit toutes les deux par les épaules.
— Oui, et ce n’est pas grâce à toi, Brant, rétorqua Helen d’un air faussement contrarié. Tu ne nous avais même pas présentées convenablement !
— Ah oui ? Eh bien, madame Harcourt, je vous présente Mme Harcourt.
— Kelly, j’espère que vous savez à quoi vous vous exposez avec Brant, car il est absolument impossible.
— Oui, je le sais déjà, répondit la jeune femme en souriant à son mari.
En plein milieu de leur conversation, Daniel fit son apparition. Dans son costume trois-pièces, il gagnait le premier prix d’élégance. Tendant la main à Brant, il lui adressa ses félicitations. Etait-ce son imagination qui donna à Kelly l’impression que les remerciements de Brant étaient un peu secs ?
— Brant, savez-vous que vous avez beaucoup de chance ? Puis-je embrasser votre femme ?
— Oui, si vous n’en prenez pas l’habitude, répondit Brant après une hésitation.
C’était dit sur le ton de la plaisanterie, mais une certaine agressivité perçait dans la voix.
— Kelly, tu es magnifique ! s’écria Daniel.
Puis, avant même qu’elle ait le temps de réagir, il déposa un baiser sur ses lèvres. Rougissant sous le coup de la surprise, Kelly fut soulagée de voir que Brant et Helen avaient été distraits par l’arrivée de quelques invités avec lesquels ils discutaient.
— Je te souhaite tout le bonheur possible, Kelly.
— Merci, Daniel. Et pour toi, à quand le mariage ?
— Pas de sitôt ! Surtout depuis que j’ai perdu l’unique amour de ma vie...
Kelly répondit d’un éclat de rire.
— A propos, as-tu aperçu ta grande amie Susanna ? reprit Daniel en baissant la voix ; Je peux t’assurer que, pendant la cérémonie, elle te jetait des regards meurtriers !
— Vraiment ? murmura Kelly en cherchant des yeux sa rivale.
Susanna se trouvait dans le salon, entourée d’une foule d’admirateurs qui buvaient ses paroles. Voilà qui n’était pas très étonnant : dans un fourreau de satin blanc, les cheveux relevés sur la nuque, Susanna était époustouflante. Jusqu’ici, Kelly n’avait jamais remarqué combien elle ressemblait à Francesca. Comme elle, Susanna avait de longs cheveux blonds, la silhouette d’un mannequin et s’habillait avec beaucoup de sophistication.
— A mon avis, en lui prenant Brant, tu t’es fait une ennemie.
— Oh ? Je ne crois pas. Regarde, elle est en bonne compagnie en ce moment. Elle ne pense probablement plus à Brant. En tout cas, merci de te faire du souci pour moi.
— C’est normal. A partir de maintenant, tu dois me considérer comme ton grand frère. Au fait, as-tu reçu mon petit cadeau ?
— Quel cadeau ?
A cet instant, Brant se tourna vers eux et interrompit leur discussion.
— Kelly, il sera bientôt l’heure de partir. Veux-tu monter te changer ?
Ce rappel fit battre le cœur de Kelly : leur départ était imminent. Pour quelle destination ? Pour quelle lune de miel ? Brant lui tendit les clés de leur chambre.
— Je viendrai te rejoindre dans un moment.

Leur chambre était d’un luxe raffiné. Tapissée de bleu, meublée avec goût, elle faisait regretter à Kelly ce départ précipité. La vue sur le lac et sur les forêts environnantes était enchanteresse. Enfin, Brant avait déjà tout prévu et lui réservait peut-être une agréable surprise.
Avec hâte, Kelly ôta sa robe et enfila un tailleur de cachemire beige. Brant pouvait entrer à tout instant et Kelly ne tenait pas à ce qu’il la surprenne en tenue légère. « Tu es ridicule ! » se dit-elle. Cette nuit, de toute façon, Brant saurait tout d’elle, alors peu importait qu’il l’aperçoive dès maintenant en lingerie de soie.
Au souvenir de cet après-midi, Kelly laissa échapper un soupir de bonheur. Le futur au côté de Brant s’annonçait radieux depuis sa discrète déclaration d’amour : cette rose qu’il lui avait envoyée, son émotion lorsqu’elle était descendue de la voiture, et son baiser sur le parvis de l’église...
Prenant son sac, ses gants et son foulard, Kelly se regarda une dernière fois dans le miroir. Elle rayonnait. D’un geste de la main, elle retira de ses cheveux quelques confettis qui avaient été lancés à la sortie de l’église. Les éclats de sa bague attirèrent son regard. Mariée, elle était mariée avec Brant Harcourt ! Kelly était comblée.
Puisque Brant ne venait pas la rejoindre, pourquoi ne pas aller le retrouver ? Peut-être que, par délicatesse, il l’avait laissée seule pour se changer. Sans doute était-il resté dans le salon à discuter avec les invités.
Une fois dans le couloir, Kelly reconnut la voix de Brant avant de l’apercevoir. Elle venait des ascenseurs, à l’extrémité du couloir. Une femme lui parlait.
— Je sais que tu ne l’aimes pas. J’ai bien vu qu’à peine la cérémonie terminée, tu regrettais déjà de l’avoir épousée.
Susanna Winters ! Un froid glacial paralysa Kelly. Elle aurait voulu s’enfuir, ne pas écouter cet échange qui lui faisait si mal, mais elle était incapable de faire le moindre mouvement.
— Kelly est ma femme, Susanna, et je...
— Oui, c’est ta femme. Et alors ? Bien sûr, tu es le genre d’homme à tenir ta parole et à être fidèle seulement par principe, même si cela doit te rendre malheureux.
— Ecoute, Susanna, mes rapports avec ma femme ne te concernent pas. Ça suffit maintenant ! répliqua-t-il, en colère.
— Oh ! Brant, ne sois si dur avec moi, s’exclama Susanna, des sanglots dans la voix. Je voulais seulement te parler de ce qui s’est passé hier soir. Après t’avoir quitté, j’étais bouleversée. Tu avais été si...
— Je t’ai dit de ne plus penser à hier ! Je ne veux pas que cela se reproduise !
— Oui, Brant. Si tu as besoin de moi, tu sais où me trouver.
Kelly n’entendit pas la réponse de Brant. Ses pas se rapprochaient. Pour rien au monde il ne devait s’apercevoir qu’elle avait écouté leur conversation. Brusquement Kelly se mit à courir. Devant la porte de la chambre, ses mains tremblaient tellement qu’elle eut du mal à mettre la clé dans la serrure. Enfin, la porte s’ouvrit. Au bord de la crise de nerfs, Kelly se précipita dans la salle de bains qu’elle ferma à clé. S’écroulant dans un fauteuil, Kelly éclata en sanglots. Des bribes de mots revenaient la tourmenter : « Tu ne l’aimes pas », « tu regrettais déjà de l’avoir épousée »... « Tu étais si... » Si quoi ? Amoureux ? Passionné ? Brant avait passé la veille de son mariage dans les bras de cette femme ! Prête à s’évanouir, Kelly eut la force de s’approcher du lavabo et d’asperger son visage d’eau fraîche.
Quelques coups se firent entendre à la porte.
— Chérie, tout va bien ? Il faudrait que nous partions bientôt.
— Oui, je sors dans un instant.
Le miroir lui renvoyait son reflet : excessivement pâle, les yeux brillants, Kelly essaya de dissimuler les marques laissées par cette violente émotion. Après qu’elle eut respiré profondément, ses traits recouvrèrent quelque sérénité. Il ne fallait pas que Brant sache qu’elle avait surpris cette scène. Lui en parler ne ferait qu’envenimer les choses. Jamais Brant n’avait promis à Kelly de l’aimer. Et elle l’avait épousé en connaissance de cause... « Tu es le genre d’homme à tenir ta parole et à être fidèle seulement par principe, même si cela doit te rendre malheureux », avait dit Susanna. Kelly ne parvenait pas à chasser ces mots de sa mémoire : s’était-elle trompée en croyant pouvoir rendre Brant heureux ?
— Kelly, tu prends un bain ? demanda encore Brant.
— Non, non. Je sors.
Enfin, elle ouvrit la porte. Dans un costume gris, Brant se tenait près de la fenêtre et regardait la surface miroitante du lac. Il se retourna et apprécia du regard la jolie silhouette de sa femme.
— Daniel avait raison, j’ai beaucoup de chance de t’avoir épousée. Tu es très belle, Kelly.
La gorge nouée, Kelly ne pouvait prononcer une seule parole. L’envie de pleurer lui piquait les yeux. Brant savait lui dire les mots qu’elle voulait entendre, il était passé maître dans ce domaine. En fait, ce que Susanna avait affirmé était exact. Brant saurait la respecter et se comporter comme un mari doit le faire. Dans leur mariage, l’amour ne serait qu’accessoire.
— Ça ne va pas, Kelly ? questionna-t-il en faisant un pas vers elle.
— Si, tout va bien. Nous devons prendre notre avion bientôt, non ? Je suis prête à partir.
— Oui, mais auparavant, je voudrais embrasser ma femme.
Avec tendresse, Brant la prit dans ses bras. Malgré sa tristesse, Kelly s’abandonna contre lui, comme pour se raccrocher à un dernier espoir. Leurs lèvres se rencontrèrent en un baiser fervent qui chassa aussitôt doutes et angoisses. Ce baiser semblait démentir tout ce que, par perfidie peut-être, Susanna avait prétendu. Enivrée par le charme de Brant, Kelly se laissait envahir par des sensations délicieuses.
— Et si nous retardions notre départ ? Si nous restions ici, tous les deux ? murmura Brant d’une voix rauque.
Cette question jeta Kelly en plein désarroi. Rester ici avec Brant ? Oui, c’était son plus cher désir. Pourtant, Kelly envisageait avec appréhension le moment où son mari lui ferait découvrir l’amour physique. Elle cherchait, par tous les moyens, à le retarder.
— Je préférerais que nous partions, Brant. De toute façon nos invités nous attendent en bas.
— Comme tu voudras.
Aussitôt, il décrocha le téléphone placé sur le secrétaire, et appela la réception.
— Allô, c’est la chambre 206. Pouvez-vous m’envoyer un porteur pour les bagages ?
Apparemment, le refus de Kelly l’avait contrarié, car Brant se tourna vers elle et lui demanda un peu sèchement :
— Satisfaite ?
Le cœur serré, Kelly préféra dissimuler son chagrin et sauver les apparences.
— Oui, merci, Brant.
Tous leurs invités les attendaient pour leur souhaiter un bon voyage de noces. Brant joua parfaitement son rôle de mari prévenant et amoureux et Kelly réussit à simuler le bonheur d’une jeune mariée. Une fois dans la voiture que conduisait un chauffeur en livrée, Kelly se tourna pour regarder la foule qui les saluait amicalement. Seule Susanna, restée à l’écart, ne souriait pas. Elle fixait Kelly avec une assurance insupportable, qui semblait dire : « Brant finira par revenir vers moi. C’est seulement une question de jours. »



Jusqu’à l’aéroport, Brant et Kelly gardèrent le silence. A quoi Brant pouvait-il bien penser ? Peut-être à Susanna ? Ou à Francesca ? Les traits de son visage étaient durs et il semblait ignorer la présence de Kelly.
Dans le hall de l’aéroport, Kelly examina les tableaux des départs, pour essayer de deviner quelle était leur destination.
— Où allons-nous, Brant ? demanda-t-elle avec une certaine excitation.
— Où voudrais-tu aller ?
La question méritait réflexion. Pendant quelques instants, elle chercha la destination idéale.
— J’aimerais bien aller quelque part où il fasse chaud, où l’on puisse se dorer au soleil sur une plage immense...
— Parfait, c’est ce que j’avais prévu. Que penses-tu de la Floride ?
— La Floride ? C’est là que nous allons ?
— Oui, si tu es d’accord. Mais si tu préfères un autre endroit...
— Oh ! non.
Dans sa joie, Kelly aurait voulu lui dire que n’importe quel endroit lui conviendrait du moment qu’ils étaient ensemble. Elle aurait voulu tomber dans ses bras et lui dire combien elle l’aimait... Ces mots, hélas, ne pouvaient franchir le seuil de ses lèvres. Par peur d’être rejetée, d’être humiliée, Kelly gardait le silence.
— Viens, murmura Brant. Allons profiter du soleil de Floride.

Il était bien tard quand ils arrivèrent à leur destination. Une fois à Miami, ils avaient pris un avion privé jusqu’à Sarasota. Là, une voiture les attendait. Encore une heure de route et la voiture s’était arrêtée dans le parc d’une vaste maison de bois blanc, dont toutes les lumières étaient allumées.
En pleine forme malgré la longueur du trajet, Kelly était sortie de la voiture la première. Seul le bruit des vagues brisait le silence. Dans l’air de la nuit, les fleurs du parc exhalaient leur parfum. La maison rayonnait de lumière et sa blancheur contrastait avec le noir pourpré du ciel. Il s’agissait d’une demeure de style colonial espagnol. Des arcades menaient à un charmant patio.
— J’ai demandé à ce qu’on allume toutes les lampes de la maison avant notre arrivée, expliqua Brant en prenant les valises.
— Cette maison t’appartient ? Je pensais que nous allions loger dans un hôtel.
— Non, je voulais te faire découvrir ma propriété de Floride. Je devrais dire plutôt notre propriété.
Ils seraient donc seuls pendant une semaine dans cette superbe demeure ? La tête de Kelly commençait à tourner.
Brant ouvrit la porte d’entrée. Des lustres étincelants illuminaient les murs blancs et les tapis d’un rose profond. De l’entrée, on apercevait sur la droite un immense salon dans lequel l’ameublement gardait sa couleur locale : des panneaux d’ébène étaient plaqués sur les murs tandis que des tapis d’une couleur cuivrée revêtaient les sols. Le choc de ces couleurs produisait une impression forte sur le visiteur. Kelly était ravie.
Brant traversa la pièce et conduisit sa femme à l’étage supérieur. Au centre de la chambre se trouvait un grand lit à baldaquin dont les rideaux de soie bleue s’accordaient avec les tapisseries turquoise de la pièce.
Après avoir déposé les valises, Brant se tourna vers Kelly et la regarda attentivement.
— As-tu faim, Kelly ? Tu n’as presque rien mangé dans l’avion.
— Non, je n’ai pas faim. Par contre je veux bien boire quelque chose, dit-elle d’une voix tremblante.
— Du thé, du café ou de l’alcool ?
— Plutôt de l’alcool.
Peut-être retrouverait-elle ainsi un peu de courage ? Brant lui répondit dans un sourire :
— Très bien. J’avais demandé à Maria de mettre du champagne au frais. Je vais le chercher. Pendant ce temps, mets-toi à l’aise. Si tu veux, prends un bain ou une douche.
— Merci, Brant.
Son mari lui apparaissait soudain comme un étranger, auquel elle ne savait que dire. Peu à peu, la panique prenait possession de la jeune femme sans qu’elle puisse se contrôler. Les mains tremblantes, elle alla chercher sa chemise de nuit et ses affaires de toilette. Puis elle s’enferma dans la salle de bains, espérant un peu de répit.
La douce chaleur et le parfum agréable du bain ne parvinrent pas à la détendre. En sortant de l’eau, Kelly s’enveloppa dans une grande serviette. Avec soin, elle appliqua sur tout son corps un lait parfumé. Enfin, Kelly enfila sa chemise de nuit de soie, puis un élégant déshabillé. Ses cheveux, détachés pour la nuit, ondoyaient souplement sur ses épaules. Sur son visage, nulle trace de maquillage. Elle était jolie ainsi, elle le savait. Mais ce soir, elle ne cherchait plus à séduire Brant. Au contraire, elle aurait voulu s’enfuir, éviter l’épreuve qui l’attendait. Souhait irréalisable... n’était trop tard. Kelly ouvrit la porte et entra dans la chambre.
Brant était étendu sur le lit. Il ne s’était pas encore dévêtu. Dès qu’elle entra, il leva les yeux vers elle et, sans mot dire, la contempla. Sur la table de nuit, une bouteille de champagne attira le regard de Kelly. Brant se redressa et, d’un geste, fit sauter le bouchon, et deux grandes flûtes de cristal furent emplies du vin pétillant et doré.
— Viens, Kelly, murmura-t-il avec tendresse.
Masquant sa gêne, Kelly s’avança vers lui et s’assit au bord du lit. Elle prit le verre qu’il lui tendait.
— A notre vie ensemble ! s’exclama Brant.
Parlait-il sérieusement ? Mieux valait ne pas chercher à le savoir. Anxieuse, Kelly vida son verre de champagne d’un trait et en demanda un autre. Brant se *******a de lui reprendre son verre et de le reposer sur la tablette.
— Je voudrais une autre coupe, Brant.
— Je sais. Mais je ne tiens pas à t’enivrer... en tout cas pas de cette façon-là, dit-il avec un sourire ambigu.
Ces paroles mirent Kelly au supplice. Comment expliquer à Brant ses craintes, comment lui faire comprendre que la simple idée de partager son lit la terrifiait ? N’y tenant plus, Kelly se leva et s’approcha de la baie vitrée. On apercevait la plage illuminée par la clarté de la lune. Au loin, quelques voiliers étaient amarrés et attendaient leurs riches propriétaires. Les portes coulissèrent et elle sortit sur la terrasse. L’air de la mer ranimait son courage.
— Que se passe-t-il, Kelly ? demanda Brant.
— Rien, rien.
— Allez, entre, ordonna-t-il impatiemment.
Brant s’était levé. Agacé par le comportement de sa femme, il vint la chercher.
— Kelly, cesse tes enfantillages.
Il essaya de la prendre par le bras. Affolée, elle recula.
— Non, Brant ! Ne me touche pas ! Je ne veux pas !
— Très bien, ma chérie. Calme-toi. Entre, s’il te plaît. Tu as besoin de sommeil.
C’était vrai. Kelly était épuisée. Le mariage, la réception, le voyage... Après ces bouleversements, elle ne souhaitait plus qu’une chose : le repos et le calme.
— Oui, tu as raison, Brant. Mais jure-moi que...
— Je te le jure.
— Où vas-tu dormir ?
— Dans le même lit que toi, Kelly. Nous nous étions mis d’accord là-dessus, rappelle-toi.
— Oui... mais...
— Je t’ai dit que je ne te toucherai pas. Alors va te coucher.
Brant disparut dans la salle de bains.
Pendant quelques secondes, Kelly resta figée sur place. Par ses craintes absurdes, elle avait tout gâché ! Retenant ses larmes, elle obéit à son mari et se glissa entre les draps soyeux. Son corps se détendait peu à peu, mais pas son esprit. Les événements de ces dernières heures défilaient dans sa tête. Kelly revoyait la rose rouge envoyée par Brant. Ce souvenir agréable fut chassé immédiatement par celui des paroles de Susanna : « A peine la cérémonie terminée, tu regrettais déjà de l’avoir épousée. » Elle se rappela ensuite le regard triste de Brant quand il l’avait embrassée sur le parvis de l’église. Ces scènes traversaient sa mémoire et meurtrissaient son cœur. Soudain, un détail lui revint à l’esprit. Daniel lui avait parlé d’un cadeau qu’il lui avait fait parvenir. Or, elle n’avait rien reçu de lui. Rien ? Mais si ! La rose rouge ! Ce présent, qui lui avait fait croire à l’amour de Brant, ne venait donc pas de son mari, mais de Daniel !
La douche s’était arrêtée. Brant allait venir se coucher auprès d’elle. La porte s’ouvrit et se referma discrètement. Immobile, Kelly retenait son souffle. Brant se glissa dans le lit et éteignit sa lampe.
Finalement, le sommeil vint emporter Kelly, un sommeil hanté par les mauvais rêves. Elle se trouvait de nouveau à l’église, mais la foule qui l’entourait, au lieu de la féliciter, se moquait d’elle. Tout le monde savait que Brant ne l’épousait que pour obtenir le contrôle de la société. Susanna s’avançait vers elle et lui disait : « Jamais vous ne pourrez vous faire aimer de Brant. » Puis, elle entendait la voix de Brant : « Désolé, Kelly, nous ne pouvons pas vivre ensemble. Je te quitte. »
Brusquement, elle ouvrit les yeux. Son cœur battait la chamade, des frissons parcouraient son corps. Progressivement, le calme revenait. A sa grande surprise, Kelly se rendit compte qu’elle partageait l’oreiller de Brant. Dans un geste de tendresse, il l’avait enlacée. Doucement elle se redressa. La lumière de l’aurore éclairait la chambre. Brant dormait paisiblement. Ses traits avaient perdu de leur dureté. Il se dégageait de ce visage une impression de vulnérabilité qui avait jusqu’alors échappé à Kelly. Emue, elle aurait voulu le réveiller et lui dire tout son amour, se confier enfin et lever tous les malentendus. Mais elle n’en eut pas le courage. Avec précaution, Kelly se dégagea de son étreinte et quitta le lit. Après s’être enveloppée dans un grand châle de soie, elle ouvrit les fenêtres et sortit.
Le soleil, qui venait de se lever, embrasait l’horizon. Le ciel était serein. Une légère brise faisait trembler les palmes des arbres. Cet endroit était un vrai paradis, le lieu idéal pour une lune de miel. Combien elle regrettait la scène d’hier soir ! Elle s’était comportée comme une idiote. Brant devait déjà se repentir de l’avoir épousée. Quelle erreur d’avoir imaginé que Brant était amoureux d’elle ! Non, il ne l’avait jamais été et ne risquait pas de le devenir.
— Pourquoi es-tu sortie ?
Kelly sursauta. Brant, à demi dévêtu, se tenait sur le seuil de la porte. Kelly détourna les yeux. La beauté athlétique de ce torse nu la troublait et la mettait mal à l’aise.
— Je regarde le lever du soleil.
Ne sachant que dire, Kelly se mit face à l’océan et fit mine de le contempler. La lumière jouait sur les vagues et leur donnait des reflets diaprés. Sans bruit, Brant s’appuya contre le parapet, près d’elle.
— C’est magnifique, n’est-ce pas ? Ce spectacle ne manque jamais de m’émouvoir. Cela nous remet à notre vraie place, minuscule et insignifiante, dans l’ordre de l’univers. On adopte un autre regard sur le monde. Face à cela, nos problèmes perdent de leur gravité...
De telles paroles étaient inattendues dans la bouche de Brant. Etonnée, elle lui jeta un regard de biais.
— Il m’est arrivé de traverser des moments d’incertitude, Kelly.
La compréhension et la gentillesse de Brant la déconcertaient. Il essayait de l’aider à parler. Paradoxalement, son attitude ne lui était d’aucun secours. La gorge serrée, Kelly se taisait. Aussi Brant reprit-il la parole :
— J’ai acheté cette propriété après la mort de Francesca. C’est ici que j’ai réussi à surmonter la douleur de sa disparition.
Après avoir tant souffert, Brant méritait d’être heureux, pensa Kelly. Désespérée, elle se sentait incapable de lui donner ce bonheur qu’elle croyait, la veille encore, possible.
— Brant, je suis désolée pour hier soir. Tu as été très patient avec moi. Beaucoup d’hommes auraient...
— Beaucoup d’hommes auraient passé outre ton refus, continua-t-il. Mais crois-tu vraiment que j’appartiens à ce type d’hommes ?
— Je ne sais pas, Brant. Il m’arrive de le croire. Tu peux être très violent parfois. Tout ce que je sais, c’est qu’entre nous... entre nous il n’y a pas d’amour. Nous avons commis une énorme erreur en nous mariant.
— Une énorme erreur ? reprit-il, en changeant de ton. Je te rappelle tes propres paroles, il y a un mois : « Ce mariage peut être une bonne affaire pour moi aussi. »
Le souvenir de cette pénible conversation lui revint. Comment lui dire ce qu’elle éprouvait réellement ? Les mots lui jouaient de mauvais tours. Ce jour-là, elle avait menti. Tout ce qu’elle voulait, c’était l’épouser sans perdre la face. Elle avait défié Brant et s’était prise à son propre jeu.
— Il n’est pas trop tard, Brant. Il y a encore une solution.
— Ah oui ? Laquelle ?
— Nous pouvons faire annuler le mariage. Je suis sûre que...
— Tu n’es sûre de rien, Kelly. Moi je le suis, et je peux te dire que notre mariage ne sera pas annulé. Hier, tu m’as fait un serment. Je ne te permets pas de le briser par caprice, simplement parce que tu as changé d’avis. Il y a bien trop de choses en jeu !
— Oui, les actions McConell, par exemple. C’est tout ce qui compte, pour toi !
— Tu connaissais les termes du contrat. Il n’y a pas à revenir là-dessus.
— Oui, d’accord. Mais qu’est-ce qui m’oblige à partager ton lit ?
— C’est cela qui te gêne ? Où est donc la femme qui, il y a quelques semaines, me suppliait presque de lui faire l’amour ?
A ce rappel, Kelly rougit de honte. Comment osait-il ? Humiliée, elle ne trouva quoi répondre.
— Ce soir-là, je t’avais offert un précieux collier. Et hier, j’ai oublié de le faire..., reprit Brant.
Kelly ne put se retenir. La gifle laissa des marques rouges sur la joue de Brant. Aussitôt, elle regretta son geste. Jamais elle n’avait giflé quelqu’un.
— Brant, pardonne-moi, mais tu es allé trop loin.
— Au contraire, Kelly, au contraire, dit-il d’une voix menaçante.
Son regard furieux inquiéta Kelly. Elle recula d’un pas. La main de Brant s’abattit sur son épaule et l’immobilisa.
— Que fais-tu, Brant ? Laisse-moi !
— Ce que j’aurais dû faire cette nuit !
Sans ménagement, Brant la souleva et la prit dans ses bras. La résistance était inutile. Pourtant, Kelly se débattait de toutes ses forces.
— Tu es fou, Brant. Laisse-moi !
Une fois parvenu dans leur chambre, Brant la jeta sur le lit. Stupéfaite, la jeune femme le regardait sans comprendre. L’effroi la fit réagir. Elle tenta d’échapper à la colère de son mari. En vain. Il la rattrapa et la plaqua sur le lit.
— Arrête, Brant, arrête ! cria-t-elle.
Ses cheveux blonds épars sur la couverture, Kelly le repoussait. D’une seule main, Brant avait emprisonné les siennes. Il couvait la jeune femme d’un regard ardent. Il l’hypnotisait comme un serpent fascine sa proie. Peu à peu, la volonté de Kelly fléchissait, l’effroi laissait place au désir. Enfin Brant posa ses lèvres brûlantes sur celles de Kelly, déclenchant une tempête d’émotions chez la jeune femme. Des frissons délicieux l’envahirent. Elle n’avait plus aucune envie de se défendre. Non, s’abandonner contre lui, céder à ses caresses de plus en plus pressantes... Brant relâcha son emprise. Kelly était libre maintenant mais ne songeait pas à s’enfuir. Brant écarta son châle de soie et doucement fit glisser sa chemise de nuit autour d’elle.
Complètement nue, alanguie sur les draps de satin, Kelly se laissa contempler par Brant.
— Tu es très belle, Kelly, murmura-t-il dans un souffle.
Déjà le désir montait en elle, impérieux. Elle enlaça Brant tendrement et se laissa emporter par les plaisirs enivrants de l’amour.

 
 

 

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